Par cette lettre qui dévoile combien un scanner est indispensable dans un hôpital, cette étudiante en médecine incite de façon indirecte les décideurs à réfléchir sur le sujet. Elle lance un appel à l’aide au scanner.
Cher scanner,
Où es-tu ? Quand viendras-tu ? Je t’attends depuis si longtemps. Quand aurai-je l’immense honneur de te contempler de mes propres yeux à l’hôpital roi Khaled ? Si tu savais combien les patients qui agonisent dans leurs lits ont tant besoin de toi. Si tu savais combien les étudiants et les stagiaires rêvent de te voir, te toucher et te manipuler. Si tu savais combien les docteurs attendent ton seul verdict pour administrer les soins appropriés à leurs patients. Si tu savais tout ça, peut-être te hâterais-tu de nous combler de ta présence au centre hospitalo-universitaire (CHU) de Kamenge, communément appelé hôpital roi Khaled.
Très cher…
La seule fois où je t’ai vu, c’était derrière un écran. J’avais des étoiles dans les yeux tellement tu étais fascinant. Je parie que tous ceux que tu prends sous ton aile en sortent éblouis et excités d’avoir vécu une expérience à tes côtés. Seuls ceux qui ont peur de l’inconnu éprouvent une anxiété en ta présence. Il y a même des malades qui insistent pour faire recours à toi, même lorsque tu n’es pas indispensable, convaincus que seul toi pourra les guérir.
En fréquentant la faculté de médecine, j’avais l’espoir de te voir les yeux dans les yeux. Comment s’imaginer qu’un centre hospitalo-universitaire peut manquer d’un outil aussi indispensable. Après tout, tu es l’examen d’imagerie de 1ère intention dans les pathologies que nous recevons fréquemment à l’hôpital roi Khaled (les AVC, les néoplasies, les pneumopathies, etc.) Faute de moyens, les médecins recourent à d’autres examens disponibles au CHU à un prix accessible. Des personnes venues de tous les coins du pays, souvent très défavorisées, se retrouvent dans cet hôpital. Les quelques hôpitaux du Burundi où tu es présent, ton prix est hors portée. Certains sont obligés de collecter de l’argent pour recevoir ton aide. Pire, d’autres sont abandonnés à leur triste sort par manque d’argent.
Tes vertus te permettent d’obtenir des images du corps en coupes fines au moyen des rayons X. Ensuite, ces images sont reconstituées par ordinateur (en 2 voire 3 dimensions), ce qui permet une analyse précise de différentes régions du corps. Le peu que je sais sur toi, je l’ai appris dans mon cours de radiologie. Tu n’imagines pas combien c’était dur de mémoriser tout un chapitre sur toi à l’aide de quelques images fournies par notre professeur. D’autant plus dur que je ne t’ai jamais vu et que je ne te verrai sans doute jamais lors de mon cursus universitaire. Je me souviens du regard désolé de notre professeur en t’évoquant sans qu’il puisse nous montrer ton fonctionnement et tes prouesses.
Des promesses en l’air ?
Cher ami Scanner,
Certains éducateurs nous avaient promis que tu allais bientôt arriver parmi nous. Nous avions espoir que ta venue était très proche. Les rumeurs couraient que l’année 2022 allait marquer ton arrivée à l’hôpital roi Khaled. Maintenant, 2023 va bientôt s’écouler sans aucun signe de ta présence. Je commence à perdre espoir.
Il y a quelques mois, je faisais mes stages dans le service d’imagerie. Les médecins manipulaient des échographes ou des appareils qui utilisaient des rayons X pour obtenir des clichés radiologiques, mais jamais l’arsenal qui te constitue. Parfois, ils nous projetaient tes photos, nous enseignaient à interpréter tes images. Par conséquent, te voir toujours derrière l’écran faisait retentir ton absence encore plus dans mon cœur. J’étais dépitée de terminer ce service, le seul où j’aurais pu te contempler longtemps.
Quatre années sont passées depuis mon arrivée dans le centre hospitalo-universitaire. Quatre années où je t’attends en vain. Je suis convaincue que ta présence pourrait contribuer à sauver des vies par ton seul diagnostic et aiderait les étudiants ainsi que les stagiaires dans leur apprentissage. Si les décideurs en étaient conscients, peut-être nous ne souffririons pas de ton absence ?
C’est vraiment dommage , un hôpital universitaire qui a beaucoup de très grands spècialistes mais qui n’a pas un scanner.
Birateye isonii.
Et Merci à Karell d’avoir écrit cette lettre.