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Petit séminaire de Mugera : bientôt 100 ans

Le petit séminaire de Mugera, la toute première école secondaire du Burundi va bientôt souffler sur ses cent bougies. Aucune personne encore en vie n’a vu ses murs s’élever harmonieusement en 1926 sur la montagne sacrée où régnaient les Imana za Mugera. Avec ses 24 702 élèves déjà formés par cette école, elle reste importante pour la qualité de l’éducation qu’elle dispense, mais aussi pour l’histoire du Pays des tambours.

Ce samedi 15 février 2025, tout le clergé du Burundi s’est réuni à Mugera pour ouvrir solennellement l’année jubilaire de 100 ans d’existence du Petit Séminaire Sainte Famille de Mugera. A cette occasion, on a fait d’une pierre deux coups, puisque s’est ouverte aussi l’année jubilaire de 100 ans d’ordination sacerdotale des deux premiers prêtres du Burundi, il s’agit de feu Émile Ngendagenda et feu Patrice Ntidendereza ordonnés à Mugera le 19 décembre 1925 par Mgr. Julien Gorju. Avec un large public de consacrés venus de tous les recoins du pays et de fidèles, l’ambiance était au rendez-vous.

Pourquoi une école à Mugera ?

Il est fort étonnant de trouver une telle école sur cette montagne sans attrait apparent. Et s’il faut penser à l’époque de sa fondation, il y a à parier que c’était dans une vraie jungle. Toutefois, Mugera cache une véritable épopée. L’endroit était de prime abord réputé comme une montagne sacrée à l’époque monarchique. Plus important encore, le célèbre roi Ntare Rugamba a habité à cet endroit. Bien plus encore, c’est cette colline mystique qui a vu naître le roi Mwezi Gisabo. Aucune guerre ni agression ne s’y passait, et si pendant la chasse la proie venait s’y réfugier, elle était sauvée comme le témoignage le recteur du sanctuaire marial du lieu. Et cette école, comment y est-elle atterrie ? Une histoire qu’on prend pour une légende mais qui est vraiment réelle (attestée par le même recteur) raconte que les missionnaires blancs, après avoir fondé la paroisse de Muyaga voulaient en fonder une autre à l’embouchure de la Ruvubu et la Ruvyironza. Quittant la Tanzanie à cheval, ils sont arrivés là où se trouve actuellement le Petit séminaire de Mugera pour voir leurs chevaux s’affaisser au sol et refuser d’avancer. Pensant que leurs bêtes sont fatiguées, ils ont décidé de poursuivre leur exploration à pied. Arrivés à Munyinya non loin de Mugera, ils ont trouvé la place mieux indiquée pour la deuxième mission au Burundi. Le lendemain, revenant à leurs chevaux toujours à terre, ils ont beau tiré sur le morts, ils ont beau cravaché, les montures sont restées figées sur place. Ils ont alors interprété cela comme un signe providentiel indiquant leur destination. Ainsi fut établie à Mugera la deuxième paroisse du Burundi avec la première cathédrale dirigée par le vicaire apostolique Mgr. Julien Gorju. Aujourd’hui, l’Eglise de Mugera n’est plus une cathédrale mais, elle est rénovée. Elle s’élève somptueusement sur cette montagne sacrée avec à son entrée une grande statue d’un cheval à terre, un monument qui témoigne de cette aventure ayant déterminé son emplacement.

24 702 têtes et âmes formées

Le petit séminaire de Mugera a été alors fondé par ce premier évêque du Burundi Julien Gorju le 11 février 1926. Faisant fi d’une autre légende peu sûre qui raconte que le terrain où il est battu a été acquis en échange d’une culotte, il faut avouer que l’apparition de cette école a été providentielle pour les milliers de jeunes burundais en quête du savoir et de la culture. Il fallait, après l’école primaire se diriger vers la Tanzanie à au moins sept jours de marche à pied, puisque les moyens de locomotion n’étaient pas si avancés à cette époque. Les petits écoliers étaient aussi orientés à Kabgayi ou à Astrida au Rwanda puis à Nyakibanda.

Le Petit séminaire de Mugera a été une première réponse à cette impasse. Avec seulement 20 garçons à ses débuts, le séminaire a jusqu’aujourd’hui formé 24 702 élèves avec 57 lauréats de cette année. Tous ces élèves y ont puisé le savoir pour ensuite servir l’Eglise et/ou la patrie. Parmi eux se trouvent 400 prêtres dont 14 évêques comme cela apparaît dans la « brève historique » dressée à l’occasion de cette année jubilaire, avec le nouvel évêque de Bubanza, Mgr. Emmanuel Ntakarutimana qui va être le quinzième. D’autres formés à cette école sont devenus d’excellents chefs de ménage, de bons économistes, juristes, journalistes, professeurs médecins, politiciens, militaires, policiers, etc. L’école a de quoi se vanter : il se trouve qu’elle a aussi formé Sylvestre Ntibantunganya, l’ancien Chef d’Etat du Burundi.

En avant malgré tout

Pendant presque cent ans d’existence, le petit séminaire de Mugera n’a pas toujours avancé comme sur des roulettes. Elle s’est heurtée à biens d’obstacles dont certains la hantent encore aujourd’hui. A titre d’exemple, la deuxième République l’a nationalisée dans le mouvement qui a affecté toutes les écoles et les institutions non-étatiques. En 1993, l’école a abrité les déplacés de guerre. Ces facteurs l’ont voué au délabrement et l’ont laissé en piteux état. Et comme si cela ne suffisait pas, le manque de moyens l’avait contrainte à abandonner le cycle inférieur pour ne garder que le cycle supérieur jusqu’à l’heure actuelle. Elle n’a cependant pas lâché prise. Des efforts sont consentis pour la tirer d’affaire. Et à l’occasion de ce jubilé, elle s’est permis un coup de lifting. Les anciens de cette prestigieuse pépinière sont sans cesse conviés à soutenir leur « mère nourricière ». Cette école a ouvert la voie à la fondation d’autres petits séminaires et plusieurs autres écoles secondaires au Burundi.

 

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Les commentaires récents (1)

  1. Je suis fier d’étre comptes parmi les 24000 formes au petit séminaire de Mugera.
    Vraiment il est juste et bon de réhabiliter cette première école secondaire car elle est non seulement une ecole-mere, mais aussi un trésor pour le Burundi qui cache beaucoup de chose pouvant être un patrimoine à présenter à l’UNESCO.