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La pénurie du carburant asphyxie l’économie nationale

La pénurie du carburant touche désormais l’ensemble des secteurs de la vie du pays. Les opérateurs télécom, les industriels, les transporteurs ou encore les investisseurs du secteur immobilier travaillent en mode ralenti. La pénurie du carburant menace des milliers d’emploi et fait saigner les caisses de l’Etat. Cette situation encourage la fuite des capitaux et limite les investissements.

 Au-delà de longues files d’attente, des passagers qui reportent leurs voyages ou des citadins qui s’initient à la marche, la pénurie du carburant a de lourdes conséquences économiques. Le mouvement des camions qui effectuaient des navettes dans la capitale économique est en nette diminution. Ces dernières années, de lourds investissements ont été orientés dans l’achat des camions « gros porteurs », mais la plupart des engins restent immobiliser pendant plusieurs semaines voire des mois, faute de carburant.

Un chauffeur d’un camion en mairie de Bujumbura nous a confié qu’il vient de passer plus de deux mois sans s’approvisionner dans les stations-services. Il achète du carburant au marché noir. Un bidon de 20 litres de gasoil frôle les 250 000 BIF alors que le prix officiel est de 3 925 BIF par litre. La pénurie persistante du carburant paralyse l’activité économique. Certains opérateurs économiques désemparés décident de revendre leurs engins dans les pays voisins Un instinct de tout investisseur qui essaie désespérément de sauver ce qui peut l’être en cas de crise financière. D’autres tentent de réinvestir dans d’autres secteurs ou de délocaliser carrément leurs activités.

Le secteur immobilier mis à mal

Les acteurs du secteur immobilier déplorent cette crise des hydrocarbures qui s’éternise. Le chiffre d’affaires dans le secteur de la construction a fortement chuté. Les chantiers tournent au ralenti et les ingénieures doivent réviser leurs devis en fonction des cours des matériaux de construction sur le marché. Pour assurer la continuité des activités, les entreprises locales du moins celles qui sont en mesure, font le recours aux moyens de bord.  D’autres mettent leurs chantiers en stand-by le temps que la situation se rétablisse.

La pénurie du carburant sur le marché officiel tire les prix des matériaux locaux notamment les moellons, le sable et les briques. En temps normal, un camion-benne peut faire entre 8 et 10 tours par jour surtout pendant la période estivale. Pour le moment avec un bidon de 20 litres, un camion ne fait que deux à trois tours par jour. C’est une grande perte pour ceux qui ont investi dans ce secteur. D’où la flambée des prix des matériaux de construction. Un camion-benne de sable coûte 150 000 BIF alors que celui de moellons se négocie à 250 000 BIF.

Une crise qui assèche les caisses de l’Etat

La carence des produits pétroliers influe sur le coût de production des industries locales dans la mesure où les industriels font le recours aux énergies de secours (groupes électrogènes) pour contourner le problème de déficit énergétique. En cas de pénurie répétée, l’indice de production industrielle devient faible. Ce qui affecte leurs ventes à cause de la rupture de la chaîne d’approvisionnement et de livraison des produits.

La crise des hydrocarbures entre dans une nouvelle phase. Les recettes publiques sont en nette régression. L’Office burundais des recettes (OBR) affiche un déficit de plus de 100 milliards de BIF par rapport à ses prévisions trimestrielles. Par conséquent, le gouvernement multiplie les stratagèmes pour recouvrer 300 milliards d’arriérés fiscaux. La société de télécommunication Viettel Burundi a déjà régularisé une somme colossale de 1,3 milliard de BIF représentant sa dette fiscale. Le secteur des télécoms est dans le viseur du gouvernement. Celui-ci reproche aux opérateurs télécom d’échouer à leur mission d’assurer la connectivité du pays. Les opérateurs n’arrivent pas à assurer l’alimentation en carburant pour faire tourner les antennes-relais à plein régime. Un argument qui ne tient pas la route aux yeux du gouvernement. Cependant, il est de la responsabilité de l’Etat d’asseoir les conditions favorables aux investisseurs. Accuser à tort les opérateurs économiques de paralyser l’activité économique ne résout en rien les défis conjoncturels et structurels persistants auxquels le pays fait face.

De la poudre aux yeux

Les stratégies jusque-là arrêtées pour pallier à la pénurie récurrente du carburant se limitent à des actions de manœuvre dilatoire. Bref, l’environnement des affaires morose affecte les investissements privés tant nationaux qu’étrangers. La crise des hydrocarbures amplifie l’inflation dans un contexte de pauvreté monétaire accrue.

Le gouvernement tente d’apporter des solutions durables à cette problématique avec la création de la Société pétrolière du Burundi (SOPEBU). La télédistribution des produits pétroliers n’est pas une solution miracle. Le nœud du problème reste la pénurie chronique des devises qui asphyxie l’économie nationale. Le pays doit mobiliser autant de devises pour répondre à une demande croissante (plus de 30 millions de litres de carburant par mois).  L’importation de l’or noir nous coûte chaque année environ 300 millions USD alors que les recettes d’exportations sont en chute libre.

 

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