Légende photo : Les législatives du 18 septembre 1961 largement remportées par l'Uprona. Sur 64 sièges à pourvoir , l'Uprona a obtenu 58 sièges et seulement 6 sièges pour le Front Commun (cfr J.E.Vyizigiro)
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Le Burundi et les partis politiques : une histoire qui remonte loin

Les partis politiques burundais fondés vers la fin des années 1950 joueront un rôle de premier plan dans la perspective du recouvrement de l’indépendance. Et ce ne sera pas sans divergences. 

Dès leur formation, les partis politiques burundais se distinguent par une double tendance. À ceux qui revendiquent une indépendance immédiate, s’opposent les partisans de l’indépendance tardive, appelant d’abord à la démocratisation des institutions.

Tandis qu’au Rwanda, les oppositions ethniques constituent le support des principaux partis, au Burundi, la rivalité des princes est à l’origine de deux grands partis politiques : l’Uprona et le PDC. La principale friction entre les deux partis concerne la question de l’indépendance. Le premier étant pro-indépendance et le deuxième pour l’indépendance tardive.

En effet, dès le départ, l’Uprona créé dès 1959 mais agréé le 7 janvier 1960   propose l’obtention pour le 1er janvier 1960 d’une large autonomie interne avec le conseil délibératif afin de préparer efficacement la prochaine indépendance. 

Ce parti, qui veut réunir toutes les forces en vue d’une lutte décidée pour l’indépendance prochaine, ne manquera pas d’inquiéter la puissance tutélaire. Ce qui poussera ce dernier à profiter des rivalités Bezi-Batare pour les opposer et les exploiter. C’est dans ce cadre que naîtra le PDC, Parti démocrate-chrétien dont les leaders sont des Batare. 

Agréé le 5 février 1960, le PDC déclare avoir pour objet, l’action basée sur la collaboration sincère, continue et dynamique entre tous les membres et de se préoccuper de tous les problèmes politiques, sociaux, économiques, moraux et culturels du Burundi. Il insiste aussi sur la démocratisation des institutions avant l’accession à l’indépendance. 

Quid du Parti du Peuple ?

Le 4 février 1960 est agréé un parti dénommé Parti du Peuple. Le principal point de son programme consiste en la lutte contre les privilèges et les discriminations, la promotion politique, sociale, culturelle et économique des « déshérités », le respect de la monarchie constitutionnelle et l’étroite collaboration avec la Belgique.

Les options de ce parti sont largement semblables à ceux des partis démocratiques du Rwanda, l’Aprosoma et le Parmehutu. Comme ces deux partis, le PP ne s’oppose pas à l’accession du Burundi à l’autonomie. Cependant, il estime qu’une certaine émancipation politique, culturelle et économique doit précéder cette autonomie et doit être par conséquent provisoirement poursuivi sous la tutelle de la Belgique.

Quand  les « cartels » s’invitent

Si l’Uprona, le PDC et le PP sont les plus connus des partis politiques à la veille de l’indépendance, il faut dire qu’entre août 1959 et novembre 1961, le Burundi compte plus de 25 partis. 

Un peu comme pour remédier à la dispersion politique qui altère l’efficacité des messages en les multipliant, et c’est Aude Laroque qui l’écrit, des « cartels » (ou coalitions) sont formés. Ils regroupent les partis de sensibilités équivalentes.

Résultat, cinq partis démocrates et monarchistes se regroupent en juillet 1960 sous la houlette de l’Uprona. Il  s’agit de la Démocratie nationale du Burundi, du Parti des jeunes travailleurs du Burundi, du Parti conservateur, de la Voix du peuple murundi ainsi que Abanyamajambere b’i Burundi. Avec un programme qui reflète les préoccupations upronistes, celles de la lutte contre le PDC et  pour l’indépendance immédiate. 

De l’autre côté, le Front commun populaire se réunit en octobre 1960 autour du PDC. Il s’agit de douze partis (Le Parti démocrate-chrétien, le Parti démocrate rural, le Parti du peuple murundi, le Rassemblement des travailleurs du Burundi, le Mouvement progressiste du Burundi, l’Union nationale du Burundi, l’Union démocratique paysanne, le Rassemblement populaire du Burundi, le Mouvement rural du Burundi et Abanyamajambere b’i Burundi) qui s’associent dans la perspective des élections communales de novembre et décembre 1960. 

Vient enfin, le dernier cartel, l’Union des partis populaires. Il est formé en mars 1961 et regroupe des formations autour du PP. C’était Le Parti du Peuple, l’Union pour la promotion hutu, la Voix du peuple murundi, l’Union nationale du Burundi et le Rassemblement populaire du Burundi. 

L’on pourrait croire que ces cartels allaient simplifier la lecture de la vie politique burundaise. Au contraire, la rivalité la plus profonde à cette époque oppose les grands partis qui ont à leur tête les princes. Et c’était sur un point essentiel : celui du recouvrement de l’indépendance. On y reviendra.  

 

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Les commentaires récents (1)

  1. Cette classification des partis en populaires, démocratiques et autres par Aude Laroque est fantaisiste. Elle utilise souvent un langage militant qui dénote un parti pris flagrant. Ces partis qu’elle qualifie de populaires se sont en réalité révélés impopulaires vu le faible score qu’ils ont fait aux élections de 1961.