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Les nuits d’angoisse des parents face à la pénurie de carburant

Entre frustrations à l’hôpital et galères pour trouver un moyen de déplacement, cette crise du carburant met les nerfs des parents ayant des bébés à rudes épreuves. Vivement que les promesses faites se traduisent en solutions pérennes? Témoignage.

Mon cas n’est pas isolé, j’en suis certaine. Il est minuit passé, quand mon bébé commence à sentir des malaises. Sa température monte dangereusement, (atteignant les 400). Le temps presse, je dois aller à l’hôpital. Mais, la voiture de mon mari est à sec depuis trois mois, faute de carburant (yarabitse). Pas d’autre choix que de se rendre à l’hôpital public le plus proche de chez nous.

Arrivés à l’hôpital vers 1h du matin, nous sommes accueillis par un gardien somnolent qui nous demande d’aller frapper à la fenêtre de la réception. Je tiens mon enfant dans mes bras, le thermomètre clignotant dans ma main. Mon mari frappe à la porte. Rien. Il frappe encore, et une voix agacée se fait entendre à l’intérieur : « Nimureke basha kungora ndiryamiye » (Laissez-moi tranquille, je dors). Mon mari insiste, jusqu’à ce que la réceptionniste finisse par ouvrir la porte, visiblement furieuse. Elle remplit rapidement une fiche, et nous renvoie chez le médecin.

Le médecin jette un œil à notre situation et prescrit des examens. Mon mari retourne à la réception pour régler les factures, car nous avons oublié l’extrait de naissance. Le prélèvement est fait, et le laborantin nous demande d’attendre 30 minutes. Mais, étrangement, à peine dix minutes plus tard, il revient avec les résultats. (Mama wee lol !) Je suis choquée. Comment est-ce possible ?

En peu de temps, nous retournons voir le médecin qui, sans beaucoup perdre son temps, prescrit des médicaments. Pas même un médicament pour réduire la fièvre (Yaherutse uwo nagiye ndamuhaye). Et voilà, à 2h du matin, nous sommes de retour à la maison, l’enfant toujours brûlant (380).

Un parcours du combattant

À 4h du matin, la fièvre monte encore. Cette fois-ci, pas de demi-mesure : direction l’hôpital Polyceb. Mais là encore, les obstacles se dressent. Nous nous préparons, puis nous allons au rond-point Iwabo n’abantu pour chercher un taxi. Nous demandons le tarif : « Ni 50 000 Fbu igitoro harabavye natwe tukironka ku bibuni » (C’est 50 000 Fbu, la faute incombe à la  pénurie de carburant)  répond le taximan. Incroyable. Autrefois, ce trajet nous aurait coûté 10 000 Fbu.

Nous refusons, espérant voir arrivé plutôt un bus de transport en commun, mais rien. Finalement, nous trouvons un taxi « cangacanga » pour 6 000 Fbu. Un soulagement.

Dans le taxi, les discussions fusent sur les promesses du Président concernant le carburant. Je sentais la fatigue et le désespoir dans chaque mot. Tout le monde est à bout. Enfin, nous arrivons à l’hôpital. Le médecin diagnostique une angine sévère chez mon enfant et s’étonne que le premier médecin n’ait rien vu. Je n’ai pas de réponse, juste un vide. Je repense à cette lettre que j’avais écrite au ministre de la Santé, pleine d’espoir.

Le retour est tout aussi compliqué. Nous devons à nouveau prendre un « cangacanga » pour 10 000 Fbu. À l’intérieur, les discussions sur le carburant continuent. L’espoir semble si fragile, mais tout le monde y tient encore. Cependant, l’attente est interminable. Entre spéculation et corruption, chacun essaie de profiter de cette crise. Même les pompistes jouent le jeu pour se faire du cash

Des questions, encore et encore. Où est-ce que ça coince ? Même pendant la guerre civile de 1993 à 2005, le pays n’a jamais connu ça, même pendant l’embargo, malgré les frontières fermées, la pénurie de carburant  n’a jamais été aussi aiguë.

Même si les Burundais ne laissent rien apparaître dans leur attitude, l’exaspération est totale.

Une lueur d’espoir… ?

Malgré cette pénurie, il est encourageant de voir que des camions en provenance de la Tanzanie commencent à réapprovisionner le pays. L’accès au carburant s’améliore progressivement, mais il est crucial de maintenir ces efforts pour assurer une disponibilité continue et durable. Monsieur le Président, si la situation continue sur cette lancée, je suis sûre et certaine que le peuple burundais vous félicitera pour avoir géré cette grave crise avec courage.

 

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