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L’Église catholique, la dernière voix de la raison ?

L’audio du sermon prononcé par le prêtre Herménégilde Coyitungiye  dans la messe du vendredi saint est devenu viral sur les réseaux sociaux, provoquant par la même occasion des critiques acerbes. Pourquoi cette homélie est-elle devenue si populaire ? Le blogueur Jean Marie Ntahimpera essaie d’y répondre.

Le prêtre Herménégilde est devenu une star et pour une bonne raison. Il est parvenu à dire tout haut ce que personne d’autre au Burundi n’ose dire en public : que la vie d’une personne n’a plus aucune valeur, que les dirigeants sont hypocrites et s’enferment dans le déni de la réalité, que les gens n’osent plus pleurer les leurs assassinés, que l’injustice et la corruption minent le pays, parce qu’il est désormais interdit de dire ou de montrer qu’il y a quelque chose qui va mal dans le pays.

Si le prêtre est salué par beaucoup comme un homme courageux disant tout haut ce que tout le monde pense tout bas, certains  proches du pouvoir eux dénoncent des propos « ravageurs » qui rappelleraient ceux de Monseigneur Simon Ntamwana qui s’était prononcé début 2015 contre le troisième mandat de Pierre Nkurunziza, inspirant au passage le slogan du mouvement contestataire « Sindumuja ».

Dire ce qu’on pense au Burundi est devenu l’exception, pas la règle

Ce que le prêtre dit dans cette audio n’est pas nouveau, ça ne relève que du bon sens. Les rapports des différentes organisations de défense des droits de l’homme ne cessent de mettre en lumière combien la situation des droits de l’homme est catastrophique. Mais l’intérêt qu’elle suscite est aussi bien révélateur de la façon dont la peur ronge les esprits. Dire ce qu’on pense est devenu l’exception au lieu d’être la règle.

Ce que l’audio révèle aussi est que l’Eglise catholique reste la dernière voix de la raison que personne ne pourra faire taire. On peut fermer les radios, les associations, les partis politiques. Mais les églises résistent.

Contrairement aux associations de défense des droits de l’homme qui travaillent de l’exil et parfois dans la clandestinité, les églises, et surtout l’Eglise catholique, sont implantées dans tous les coins et les recoins du pays. On ne les fermera pas, en tous cas pas tout de suite, pour ne pas trop fâcher les fidèles qui font la grande majorité des Burundais.

Oui, les religieux sont eux aussi des gens en chair et en os, qui ont peur pour leur vie. Ils peuvent être vilipendés, persécutés, comme tout le monde. Mais ils ne cesseront de dire ce qu’elles croient être la vérité, du moins si on prend l’exemple du père Herménégilde.

« Dieu le protégera »

Quand l’audio a commencé à circuler sur les réseaux sociaux, beaucoup se sont inquiétés que le prêtre risque d’être tué. « Ceux qui le mettent en danger sont ceux qui continuent à diffuser ce message et sa photo », disait quelqu’un dans un groupe WhatsApp.

Mais moi je pense que personne ne met en danger le prélat. Quand il prêchait, il ne s’attendait pas sans doute à susciter l’attention des réseaux sociaux. Mais il parlait en public, sans langue de bois, avec assurance, sachant que ce qu’il dit est vrai. Il savait ce qu’il faisait donc. Il savait qu’il risquait de s’attirer les foudres de ceux qui ne veulent pas que cette vérité soit dite, et qu’il pouvait même en payer de sa vie. Mais Dieu le protègera.

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