Au premier trimestre de cette année scolaire en cours, sur 71.942 cas d’abandons de tout le pays, Kirundo vient en tête avec 7.989. Les mauvaises conditions de vie des ménages en sont la principale cause. Bien que certaines écoles de cette province profitent de la politique des cantines scolaires, les ruptures de stock vident les salles de classe.
Midi moins le quart. Nous sommes à l’Ecole fondamentale de Rukuramigabo. Elle se trouve en commune Kirundo et est située à une dizaine de kilomètres du chef-lieu de la province. C’est le calme qui règne à cet établissement scolaire, les écoliers sont en train de suivre les leçons dans les locaux.
Tout près des salles de classes se trouve la cuisine, car cette école bénéficie de la politique de cantines scolaire. Mais le paradoxe est qu’il n’y a pas de fumée alors que l’heure de prendre le repas de midi approche.
Alain, un petit garçon de 10 ans, élève de la troisième année, passe tout près de nous et nous entamons la discussion : « Aujourd’hui nous allons partager le repas de midi ? » timoré, le garçon réplique : « Haraciye imisi atandya turonka. » ( cela fait quelques jours, qu’on ne reçoit pas de la nourriture)
Nestor Murekandonyi, chargé du stock, vient avec un trousseau de clés en ses mains et nous conduit vers la cuisine. La porte du stock est bien cadenassée. Entre les trois pierres, la cendre s’éparpille aux quatre vents. Quand Nestor ouvre la porte, à l’intérieur, de grosses marmites sont vides, bien lavés et conservées. « Le stock est vide depuis vingt jours », révèle le chargé de stock.
Quand les stocks sont vides, les classes le sont aussi
Interrogé sur les principaux défis qui hantent l’Ecofo Rukuramigabo, Jean Pierre Bamboneyeho, Directeur de cette école depuis 2020, nous explique : « Notre école est menacée par deux défis majeurs : des infrastructures vieilles et insuffisantes ainsi que le nombre d’abandons qui s’accélère de jour en jour. 18 groupes partagent 10 salles de classes, ce qui perturbe l’achèvement des programmes ».
Quant au problème d’abandons scolaires, selon Directeur Jean Pierre, seulement au premier trimestre, 121 élèves ont définitivement déserté les salles de classe. La pauvreté dans les ménages est la principale cause.
Parlant toujours du programme de cantine scolaire, le Directeur précise : « Même si notre école bénéficie du programme de cantine scolaire depuis l’an passé les ruptures de stock peuvent durer jusqu’à deux mois. Par conséquent, des élèves disparaissent dans la nature, un à un ».
Evelyne Murekatete, directrice de l’Ecofo Cewe voisine de l’Ecofo Rukuramigabo, elle aussi lance un cri d’alarme pour des cas d’absences qui deviennent fréquentes quand les stocks des cantines sont vides : « Aujourd’hui, dans une classe de 68 élèves, 24 sont absents ».
Même les parents de la localité ne restent pas bouche cousue face à ce problème. N.K déplore : « Sur la saison culturale précédente, nous n’avons rien récolté suite au changement climatique, le soleil a tapé fort sur nos cultures. Si nos enfants ne trouvent pas de quoi à manger à l’école, ils quittent petit à petit le banc de l’école et vont à l’extérieur du pays surtout à Kagera en Tanzanie ».
A quand la solution ?
« Les ruptures de stock peuvent être dues à plusieurs facteurs notamment le processus de fourniture des vivres par le PAM qui prend beaucoup de temps », fait savoir Lidoire Bigirimana, Directeur national des cantines scolaires et porte-parole du ministère de l’Education nationale et de la recherche scientifique.
Selon lui, pour juguler le problème des ruptures de stock, le Ministère de l’éducation nationale et de la recherche scientifique en collaboration avec le PAM sont en train d’initier les achats décentralisés, pour transférer les fonds aux DPE dans le but de les responsabiliser pour acheter au près des producteurs regroupés en associations et en coopératives de production.
Lidoire Bigirimana espère que cela permettra de lier la cantine scolaire à la production locale pour asseoir une cantine scolaire endogène qui participe à la promotion des indicateurs scolaires et l’économie des producteurs agricoles et d’élevage.