Le 15 juin 2025, au Vatican, a été béatifié un jeune congolais du nom de Floribert Bwana Chui Bin Kositi, comme martyr « de l’honnêteté et de l’intégrité morale ». Fonctionnaire, il a dit non à la corruption et a été tué à cause de ça. Un modèle qui pourrait inspirer beaucoup de fonctionnaires et décideurs Burundais.
Floribert Bwana Chui avait 26 ans. Jeune fonctionnaire congolais de Goma, tout près de chez nous, il est directeur du bureau de la douane pour les marchandises. En juin 2007, il reçoit la demande d’entrée dans le pays de trois tonnes de riz, mais ses services découvrent qu’il s’agit d’une marchandise périmée potentiellement nocive. Il refuse l’autorisation d’importation pour ne pas mettre en danger la vie de ses concitoyens.
Les marchands, les acteurs économiques, et même les fonctionnaires de l’État font pression. On lui propose 3 000 $ de pot-de-vin, mais il reste inflexible. Il confia : « Si je ne détruis pas ce qui est dangereux pour le salut de tant de personnes, si j’accepte de me laisser corrompre, c’est comme si j’acceptais ma propre destruction. L’argent du pot-de-vin va bientôt disparaître. Et les gens qui consommeraient ce riz, que deviendront-ils ? En tant que chrétien, je ne peux pas accepter que la vie des gens soit sacrifiée ».
Malgré les menaces, Floribert Bwana Chui donne l’ordre de détruire la cargaison. Un mois après, il est porté disparu le 7 juillet 2007. Son corps sera retrouvé le 9 juillet 2007 sur la rive du lac Kivu, atrocement mutilé, son corps couvert de brûlures et de plaies. Son crime ? Avoir choisi l’intégrité.
Une inspiration
Au Burundi, cette histoire résonne comme une gifle morale. Combien de fonctionnaires, de cadres politiques et sécuritaires pourraient raconter une version inverse ? Celle où l’on accepte l’argent sale sans penser aux conséquences sur la population ? Celle où l’on ferme les yeux sur les marchés truqués, les produits avariés, les semences impropres qui ruinent les agriculteurs…
Le courage de Floribert Bwana Chui est un miroir tendu à notre société. Combien de temps encore allons-nous fermer les yeux face à la corruption ? Les chiffres, révélateur de ce fléau qui gangrène nos institutions, sont accablants. 165e place sur 180 pays selon l’indice de perception de la corruption de Transparency International 2024, 43e place sur 54 pays en Afrique selon le rapport de la Fondation Mo Ibrahim.
Au-delà des chiffres, la corruption n’est pas une abstraction. Ayant déjà acquis un petit dictionnaire rundi à lui, la corruption a aussi un visage. Celui des semences périmées distribuées aux agriculteurs de Mukike, qui n’ont jamais germé, plongeant des familles dans la famine. Celui des marchés publics attribués à des proches, au mépris de l’intérêt général. Celui de l’argent détourné qui vole l’avenir de nos enfants.
Un clin d’œil aux fonctionnaires
Les discours ne suffisent plus. Les dénonciations en tribune, les promesses creuses, les lois jamais appliquées, tout cela ne change rien. Floribert nous rappelle une vérité simple : l’intégrité est un choix quotidien. Ce Floribert, qui a refusé de se laisser corrompre, n’était ni un super-héros, ni un politicien. Juste un jeune fonctionnaire ordinaire avec un courage extraordinaire.
Dans un pays comme le Burundi, où les églises sont pleines le dimanche, mais où la corruption prospère, son exemple devrait être un modèle pour notre génération si nous voulons réellement cheminer vers un Burundi émergeant en 2040, Burundi développé en 2060. Chaque Burundais, à son niveau, peut résister en osant dire « non » à la corruption. Refuser un pot-de-vin. Dénoncer une fraude. Exiger la transparence. Cela demande du courage, mais c’est possible. Éduquons nos enfants à l’honnêteté. Valorisons les fonctionnaires intègres. Faisons de l’intégrité une valeur nationale, pas une exception.
Bonjour,
Je suis touché par ce témoignage et je me demande si il y a « un Floribert » au Burundi. La corruption est tellement partout qu’elle apparait comme un mode de vie. De beaux discours oui, mais pas de mécanismes de réprimer le mal, car à mon avis, on a peur de s’éclabousser. Le vol, les magouilles, la violence, etc. Toutes les antivaleurs sont plus présentes que « Floribert » n’aurait meme pas 12 ans.