Comme on le soulignait dans l’un de nos derniers articles, le processus de recouvrement de l’indépendance a été tout sauf consensuel. Ce manque de consensus n’épargnera pas la famille royale et se manifestera surtout lors des élections de 1961. Mais pourquoi ces élections dans un Burundi (comme beaucoup d’autres pays d’ailleurs) non habitué à cet exercice ? Un débat sur la question a tenté d’y répondre.
Un petit rappel. La recherche de l’indépendance pour les pays colonisés s’inscrit dans un mouvement mondial de décolonisation, enclenché depuis les années 1950. L’historien Émile Mworoha parle surtout de la conférence de Bandoeng en 1955. La conférence qui réclamera la fin de la colonisation donnera des ailes à plusieurs pays dont le Burundi. Ici, c’est sans parler du rôle de l’ONU et des super puissances de l’époque (USA, URSS) et d’autres pays déjà indépendants, qui eux aussi soutiendront la décolonisation.
Et faut-il le souligner, pour le cas burundais, ce processus passera par la case « élections ». Des élections qui étaient le fait des partis politiques. À Denis Barampanze, résident à Ngozi de rappeler qu’ « il y avait des partis pro et contre indépendance ». Des positions divergentes qui ne sont pas sans explication selon toujours Denis : « Des colonisateurs ne voulant pas lâcher leurs colonies et qui feront feu de tout bois pour diviser les Burundais entre eux afin de retarder l’indépendance ».
Des élections : mais pourquoi ?
Un petit rappel encore. Le terrain politique de l’époque était en grande partie occupé par deux grands acteurs. Il y avait d’un côté l’UPRONA pro-indépendance immédiate et de l’autre le PDC, partisan de l’indépendance tardive. Un positionnement que ne comprennent pas facilement les jeunes nés plusieurs années après l’indépendance. Par exemple, argumente Honoré Nzohabonayo, un jeune de Ngozi, « comment savoir qui, entre les deux tendances, était plus patriote que l’autre ? Car, voyez-vous, il semble que ce que nous avons vécu ou ce que nous vivons, c’est la conséquence de la gestion du processus de recouvrement d’indépendance ».
Pour ce jeune qui aurait été partisan de l’indépendance tardive s’il avait été là, avec peu d’écoles, avec beaucoup de défis, le Burundi n’était pas bien préparé pour l’indépendance ou pour les élections organisées pour la cause.
C’est donc principalement ces partis qui seront concernés par les élections organisées à l’époque. Des élections organisées en vue de départager ces concurrents mais aussi pour voir la tendance qui mobilisait beaucoup autour d’elle. C’est ce que pense Innocent Ngezahayo, lui aussi de Ngozi.
Et pour Prosper Hakizimana, c’était des élections à valeur test pour le colonisateur. Tester le niveau de confiance et ou de méfiance dont il jouissait. Quant à Elysée Niyubahwe, ces élections s’inscrivaient toujours dans le cadre du divide impera. Diviser les Burundais sur la question du recouvrement de l’indépendance.
Mais pour Emile Mworoha, démocratie obligeant, les élections constituent une voie incontournable pour accéder au pouvoir. Selon lui, malgré le fait que certains pays passeront par la voie armée, il faut dire que la voie des urnes était et reste le système reconnu mondialement de conquête du pouvoir. La recherche d’indépendance au Burundi ne fera pas exception. D’ailleurs, c’est que les pays sous colonisation belge dont le Burundi ou le Ruanda-Urundi étaient en retard par rapport aux autres pays africains.
En fin de compte…
Le moins que l’on puisse dire, c’est que ce processus de recouvrement de l’indépendance ne sera pas une douce sinécure. Il sera caractérisé par des péripéties tous azimuts. D’abord, ces élections de 1961 verront l’Uprona de Rwagasore, partisan de l’indépendance immédiate, sortir vainqueur. Des élections se feront sur fond de clivage au point de coûter à certains des acteurs emprisonnement et assassinat. Allusion faite ici sur l’arrestation dans un premier temps de Rwagasore puis son assassinat peu de temps avant la proclamation de l’indépendance. Un assassinat qui sera suivi par des condamnations, dont celles à mort. On y reviendra.
Essaie de faire une enquête sur la mort de Rwagasore.il y a des questions que j aimerais savoir :
– comment étaient les relations entre rwagasore et ntidendereza?
-Quels sont les relations entre Mwambutsa et les Belges
-il y aurait il pas un lien sur l assassinat de rwagasore et la guerre froide
-Quel est l état de relation entre Rwagasore et la région .
Merci
Les relations entre Rwagasore et Ntidendereza étaient mauvaises ou inexistantes mais il avait gardé des relations avec Birori malgré leur opposition. Birori a été remplacé à la tête du parti PDC par son grand frère Ntidendereza car il a été accusé de trahison après avoir signé un document commun avec Rwagasore.
Rwagasore avait de bonnes relations avec Julius Nyerere de Tanzanie, Sekou Toure en Guinee , Nkrumah au Ghana, Lumumba au Congo et Nasser en Egypte.
Les relations entre Mwambutsa et les Belges étaient meilleurs . Les belges avaient pensé à le déposer au début des années cinquante pour le remplacer par Baranyanka mais y avaient renoncé et leur hostilité envers lui a été remplacé par une sorte de sympathie contrairement à l’hostilité forte envers Rwagasore et Rudahirwa.. Colette Braekman a publié des dossiers belges sur le sujet.
Les puissances coloniales ont essayé et réussi souvent à présenter les leaders indépendantistes comme des agents des pays du bloc de l’est. Il est facile de trouver des documents de l’époque qui présentent Rwagasore ou Lumumba comme des communistes, ce qui était faux mais qui souvent avait un impact . La mort du « Communiste Rwagasore » a provoqué des cris de joie dans les couvents en Belgique.
https://diversmorkhoven.wordpress.com/2013/07/29/assassinat-du-lumumba-burundais-le-role-de-la-belgique/