article comment count is: 0

BRB : un défi de taille attend le nouveau Gouverneur

Le Chef de l’Etat vient d’opérer un changement à la tête de la Banque Centrale. Edward Normand Bigendako a été nommé Gouverneur de la Banque de la République du Burundi en remplacement à Dieudonné Murengerantwari. Tout comme ce dernier, le nouveau Gouverneur a un défi non négligeable de la persistante pénurie des devises.

Après 13 mois aux commandes de la BRB, Dieudonné Murengerantwari a été limogé le 08 octobre 2023 par le Chef de l’Etat Evariste Ndayishimiye. Les dessous de son limogeage n’ont pas été révélé par les services de la Présidence, mais « ils seraient liés aux détournements des devises », selon les employés de la Banque. 

Le nouveau patron de la Banque Centrale était jusqu’ici Administrateur Directeur Général de la Banque Nationale pour le Développement Economique (BNDE). Détenteur d’un master en Macroéconomie, Edward Normand Bigendako (quadragénaire) est un spécialiste de la macroéconomie et des politiques publiques de développement. Il n’est pas novice dans cette banque, car il y a travaillé de 2009 à 2022, avant de permuter avec son prédécesseur à la BNDE. 

Des décisions visant la libéralisation de la politique de change

Malgré son limogeage, Murengerantwari laisse derrière lui certaines décisions visant la libéralisation de la politique de change. Il a pris des mesures de suspension de certaines décisions prises par son prédécesseur, Jean Ciza. 

La réouverture des bureaux de change (suspendus depuis février 2020) en octobre 2022 a été saluée par plus d’un. Toutefois, les conditions difficiles à remplir n’ont pas débloqué la situation, notamment le capital social qui est passé de 100 millions à 500 millions de Fbu. La caution est passée de 10 millions à 50 millions Fbu. Cette situation n’a pas favorisé les cambistes, et ces derniers ont par conséquent continué à travailler dans la clandestinité. 

Murengerantwari a également levé les restrictions sur les conditions de règlements des transferts instantanés reçus de l’étranger. Depuis octobre 2022, les détenteurs des comptes en devises sont autorisés à retirer en devises les transferts instantanés reçus de l’étranger. Sous la direction de Murengerantwari, la BRB a suspendu, en avril dernier, la décision prise en 2016, interdisant les missions diplomatiques et consulaires ainsi que les organisations internationales à domicilier leurs comptes en devises que dans les banques commerciales. Toutefois, les entités et projets de l’Etat ainsi que les organisations non gouvernementales qui reçoivent des appuis extérieurs sont toujours soumis à cette mesure. 

Des nouvelles fonctions avec des défis

Le nouveau patron de la Banque Centrale n’aura surtout pas des tâches faciles. Comme Murengerantwari, Bigendako hérite d’une banque se trouvant dans une situation difficile de la politique de change marquée par le tarissement des devises. Les exportations du Burundi sont insignifiantes face aux importations. Selon le FMI, les réserves en devises continuent à diminuer. Ils s’établissaient à 59,7 millions de dollars (environ 0,5 mois d’importations) en mi-septembre (contre 1,3 mois d’importations à la fin mars 2023) en raison de la facture des importations et du report des exportations d’or. Les activités des sociétés minières ont été suspendues depuis 2021. La situation économique du pays est alarmante. Le taux d’inflation a atteint le pic. Il s’établissait à 32,6 % en mars dernier avec 49,6 % pour les produits alimentaires, selon l’Institut National des Statistiques du Burundi.

Avec une dépréciation de 38 % de la monnaie burundaise depuis le début du mois de mai 2023 (suite à la décision de la BRB passant le taux de change officiel de 2 089 Fbu à 2 875 Fbu pour 1 USD), la situation s’est encore dégradée. Cette décision prise sous les exigences du FMI pour « l’unification des marchés de change officiel et parallèle » (une des conditions pour décaisser un prêt de 271 millions USD) a plutôt fait augmenter les prix sur le marché. 

L’indépendance de la BRB est requise

La Banque Centrale a pour mission fondamentale la définition et la mise en œuvre d’une politique monétaire et de change. Cette institution qui est chargée de la détention et de la gestion des réserves de changes du Pays doit travailler indépendamment de tout ordre extérieur, selon les experts économiques. Les techniciens et experts de la banque centrale doivent mettre en place une bonne politique monétaire et des bonnes stratégies pour réussir le pari. Ils doivent prendre des décisions indépendantes pour la stabilité financière. 

Toutefois, la Banque Centrale est une administration spécialisée qui relève de la présidence de la République du Burundi comme le note ce décret du 12 octobre 2021. Sera-t-elle en mesure de travailler indépendamment et prendre des mesures qui s’imposent pour remplir sa mission principale ?

 

Est-ce que vous avez trouvé cet article utile?

Partagez-nous votre opinion