La production de la banane va decrescendo comparativement aux années antérieures. Cette culture vivrière n’est pas négligeable dans l’économie des ménages, cependant elle est menacée par les maladies, et le manque d’entretien. Les experts recommandent la réhabilitation des plantes.
La quantité de bananes produite affiche une courbe descendante selon les chiffres de la Banque Centrale. Le rapport annuel 2022 montre que la production de bananes est évaluée à 265 344 tonnes. Elle était de 1 301 443 en 2021, de 917 298 tonnes en 2020, de 1 179 759 tonnes en 2019 et de 1 6 54 955 tonnes en 2018. Elle était supérieure les années antérieures, par exemple en 2013, la production a dépassé 2 millions de tonnes.
Cela est ainsi au moment où la culture du bananier est d’une grande importance économique. Célestin Niyongere, chercheur à l’Isabu et directeur de programme production végétale, précise d’abord que cette culture produit toute l’année. C’est une source alimentaire et une source de revenus pour les ménages pour toute l’année. « Certains l’appellent même la banque des agriculteurs ». Le bananier est très riche en termes de diversité. Plusieurs variétés sont à noter : la banane à cuire, la banane dessert et la banane à bière.
Une analyse de la chaîne de valeur de la banane, réalisée en 2019, montre que la banane contribue à environ 13,7 % au PIB, 38 % du PIB agricole et 45 % à la valeur ajoutée de l’agriculture vivrière (en valeur de 2014). La chaîne de valeur de la banane génère plus de 70 % des recettes communales. Elle est estimée à 723 milliards Fbu. La banane à bière contribue à hauteur de 69 %, suivie par la banane dessert (19 %), la banane à cuire (10 %).
Différents facteurs à l’origine de la baisse
Le chef de programme production végétale évoque plusieurs raisons à l’origine de la baisse de la production de la banane. La culture du bananier est menacée par les maladies et tout le territoire du pays est actuellement touché. Niyongere cite notamment le flétrissement bactérien de bananier ou Banana Xanthomonas Wilt (BXW). C’est une grave maladie qui dévaste toutes les plantations. « Des variétés comme Mugomozi ont disparu ». Cette maladie est transmise soit par abeilles, soit par les outils utilisés par exemple pour le nettoyage des bananeraies ou dans la plantation. Un plant infecté contamine les autres plantations. Pour le cas d’espèce, il faut enlever le bourgeon mâle après la production du fruit. Cela peut aider à limiter la transmission par insectes. « Malheureusement, peu le pratique et la propagation de la maladie continue ».
L’autre maladie est le Banana Banchy Top Virus (BBTV). Elle est virale et endémique dans les régions de basse altitude. Malheureusement, elle est actuellement observable dans tout le pays. « Elle se transmet doucement mais sûrement. Une fois la plante infectée, la transmission va être systémique ». Célestin Niyongere évoque aussi la fusariose qui est une maladie à champignon. La problématique est que le support de ce champignon peut durer dans le sol plus de 40 ans.
Le deuxième facteur de la baisse de la production est la façon d’entretenir les plantations de bananier. « Les agriculteurs ont l’habitude de la considérer comme une culture pérenne qui n’a pas besoin de soins supplémentaires, qui n’est pas fertilisée ». Et cela dans des sols de plus en plus érodés où il y a peu de matière organique.
L’insuffisance hydrique est un autre défi à la production de la banane. C’est une culture qui nécessite beaucoup d’eau et s’il n’y a pas de pluies, le bananier en pâtit. A cela s’ajoute un autre défi : peu d’intervenants dans la culture du bananier dans le passé.
Réhabiliter les plantations
Cet expert propose de changer les pratiques de production de la banane. « Il faut la réhabilitation des plantations. Considérer le bananier comme d’autres cultures ». Pour lui, il ne faut pas une touffe de 20 plants, mais plutôt 3 ou 4 plants au plus. Quand il y a une maladie, il y aura moyen de gérer la touffe. La réhabilitation des plantations existantes est primordiale parce que le bananier peut être une culture pérenne à condition de le fertiliser correctement. « Mais il faudra plus de sensibilisations. Les agriculteurs sont attachés à leurs plantations et refusent de couper les bananiers pour la réhabilitation », signale Niyongere.
Au niveau de la recherche, des collections de variétés ont été faites à travers tout le pays et dans la région, pour éviter qu’elles disparaissent. Plus de 200 variétés de bananiers ont été collectées à Mahwa et au Moso. Il informe aussi que l’Isabu collabore, actuellement, avec d’autres organisations régionales produisant et multipliant les vitro plants.
Un protocole pour la mise en place des pépinières de plants a été également réalisé. « En cas de financement, les pépinières peuvent être installées partout dans le pays ». Un projet de mettre en ensemble tous les acteurs de développement et promotion de la culture du bananier est au niveau du ministère en charge de l’agriculture. Selon Niyongere, des partenaires au développement commencent à s’intéresser à cette culture. L’Union européenne va financer un projet touchant toute la chaîne de valeur de la banane.