L’enrôlement des électeurs se fait à compte-goutte. Certains administratifs n’hésitent pas à prendre des mesures pour ‘’inciter’’ les citoyens à aller se faire enregistrer. Face à ce manque d’engouement, après une conversation qu’il a eue avec son ami, ce blogueur croit avoir trouvé une idée ingénieuse pour convaincre les jeunes burundais de se faire enrôler aux élections qui pointent à l’horizon 2025 au Burundi : une case « Green card » sur le bulletin de vote. Pas bête l’idée ? Récit.
Ah, la jeunesse burundaise ! Plus sarcastique que vous, on en mourrait. Toujours prête à surprendre, même là où on s’y attend le moins. Tout le pays est en effervescence pour l’enrôlement des électeurs pour voter en 2025. Moi, comme une manière de dire bonjour à un ami, je lui propose une compagnie pour aller nous faire inscrire sur le fichier électoral 2025. Le jeune homme, dans sa vingtaine, l’air vif et le sourire en coin, me répond du tac au tac : « Allons plutôt nous inscrire pour Green card ». Nous éclatons de rire tous deux. Mais quelle réponse ! Ça quand même, je ne m’y attendais pas.
Il y a là un humour mordant, un sarcasme qui fait mouche et, surtout, un message sous-jacent. Imaginez : la question des élections est (presque) sur toutes les lèvres. La CENI a récemment rendu officiel le calendrier électoral. L’enrôlement des électeurs a commencé le 22 de ce mois d’octobre. Dès lors, chaque matin et jusqu’au 31 octobre, les agents de la CENI se pointent du matin au soir, dans tous les quartiers et collines du pays de Ntare, pour enregistrer tout Burundais qui a l’âge requis pour voter.
Sur les files, cartes d’identité en main, avec le sérieux qu’exige l’exercice citoyen, les futurs électeurs avancent pas à pas, nourris par l’espoir d’un meilleur avenir (Les sceptiques me diront que cela n’engage que ceux qui y croient encore, un peu comme le gars dont je vous parle ici). Mais non, visiblement, ce jeune homme n’a pas exactement la même vision. Pour lui, la meilleure alternative électorale serait… New York, Los Angeles ou Miami. Je l’imagine argumenter en faveur de ses convictions les plus profondes : « Oui, voter, c’est bien, mais voter pour un visa d’émigration paraît plus prometteur ».
L’urne ou l’american dream ?
Le point de vue de ce jeune homme est plus qu’intrigant. Est-ce donc le bulletin de vote qui manque d’attrait ou bien le cadre d’un avenir à bâtir ici même ? La perspective d’une démocratie à repenser cède-t-elle la place à l’idée que le rêve américain est le seul « programme politique » encore capable de séduire les jeunes ?
Bon, de l’ironie, certes. Mais derrière cette réplique décalée, c’est tout un écho : celui d’une génération qui, entre deux débats politiques, semble fixer son regard au-delà des collines. Un jeune, un simple rire nerveux peut-être, mais une résonance puissante. Celle de la fuite des cerveaux qui est le phénomène en vogue au Burundi. Alors que, malheureusement, la voie idéale pour faire changer les choses reste celle des urnes.
À quand une élection avec une case « Green card » sur le bulletin de vote, ou même un parti nommé « American Dream » au Burundi ? Je demande seulement pour cet ami. On pourrait presque en rire…, si ce n’était pas si révélateur de cette soif d’ailleurs, de cette vision floutée d’un avenir qui pourrait être ici, mais qui se déplace toujours là-bas, loin, très loin du bureau de vote de chez nous.
Bon, les amis, laissez-moi vous dire une chose. Allons nous faire enrôlés, simplement. Si nous tombons sur un bon candidat, cette raison qui vous pousse à partir changera. Si nous tombons sur un mauvais, nous aurons quand même rempli notre devoir citoyen. Bien entendu, je ne vous garantis rien.