article comment count is: 0

Burundi : les soins psychiatriques, un luxe pour beaucoup

Les chiffres font froid dans le dos, l’existence des maladies mentales est une réalité au Burundi. Mais l’accès aux soins reste un « luxe » que beaucoup ne peuvent s’offrir, sauf pour les plus démunis qui peuvent bénéficier de la main charitable de l’Etat. 

« Les patients que nous prenons en charge sont les personnes vulnérables. Ils doivent se munir d’une ordonnance médicale, une carte d’assurance-maladie et une attestation d’indigence. Via notre partenariat avec le Centre Neuro Psychiatrique de Kamenge (CNK), parfois, nous couvrons tous les frais, parfois nous couvrons une partie. Quand ils sont pris en charge par notre programme, ils reçoivent régulièrement des médicaments et des soins satisfaisants », indique Alice Manirambona, conseillère au Ministère des Droits de la Personne Humaine, des Affaires Sociales et du Genre au département de l’intégration sociale. Pour les personnes qui sont sous ce programme, la gratuité facilite donc l’accès aux soins, pourvu qu’on arrive à réunir la ribambelle des documents requis. 

La cherté des soins 

Les personnes aisées vont généralement se faire soigner à l’étranger, en Inde, en France ou dans la sous-région. Mais qu’en est-il des personnes qui ne sont pas assez riches pour se permettre ce luxe et ni assez pauvres pour bénéficier du statut d’indigent ? Car un traitement qui coûte entre cent vingt mille (63$) et deux cent cinquante mille par mois (131$) pour un habitant d’un pays où selon la banque mondiale (2016), le revenu mensuel moyen par habitant est de 23$,  est un vrai luxe.

C’est le cas de Gaudence* veuve et mère de cinq enfants, qui travaille dans une petite entreprise privée : « Quand je suis allée Kwa Le Gentil (CNPK, ndlr) on m’a dit que mon fils est schizophrène. Les premiers mois, j’ai fait de mon mieux pour assurer son traitement avec l’aide de la famille à l’étranger. Mais, aujourd’hui, on ne m’envoie plus rien et je dois subvenir aux besoins des quatre autres enfants. J’ai donc arrêté d’y aller même si ça me fait mal de le voir souffrir », raconte-t-elle d’une voix triste. 

L’abandon…

Aristote Ndagijimana, agent social au Centre Neuro Psychiatrique de Kamenge, déplore le fait que même certaines familles qui parviennent à interner leurs malades ne viennent pas les récupérer quand elles sont guéries. « Certains ont peur de venir les récupérer en disant qu’elles ne sont pas encore guéries et on constate juste que d’autres nous donnent de faux numéros. Cela arrive très souvent et ça ruine l’hôpital car il doit chaque fois puiser dans ses fonds pour résoudre ces problèmes et chercher un moyen de réintégrer l’individu. »

Dans de pareilles conditions, même si la famille venait à récupérer le patient, ils le laisseraient sûrement livré à lui-même, ne se souciant ni de lui ni de son traitement qui est pour la plupart des cas journalier. Les conséquences ne sont autres qu’une rechute assurée. Un internement donc nécessaire et un retour à la case départ. Ce cercle vicieux fera que le malade ne guérira jamais n’y succombe pas un jour. 

Il suggère que les centres neuropsychiatriques et l’État devraient trouver un accord pour prioriser la gratuité des soins chez toutes les personnes atteintes d’une quelconque difficulté psychiatrique. Pour lui, les maladies mentales devraient être reconnues comme des maladies chroniques comme le diabète et autres. 

Alice Manirambona abonde dans le même sens, l’intégration des soins mentaux aux soins primaires aiderait à renforcer la sensibilisation. « Certaines personnes ne savent même pas par où se diriger pour faire soigner le malade mental et ignorent carrément l’existence des centres neuropsychiatriques »

 

Est-ce que vous avez trouvé cet article utile?

Partagez-nous votre opinion