Une vidéo d’un membre du parti au pouvoir promettant de « casser les dents » à ceux qui voudront faire campagne pour le « non » lors du prochain référendum a fait un tollé sur les réseaux sociaux. En parallèle, des arrestations de personnes soupçonnées de promouvoir le non sont recensées. Pour le blogueur Landry Burundi, cette dérive entache l’image d’un scrutin qui se voudrait inclusif.
Comme dans la chanson de Michel Polnareff « La poupée qui fait non », certains aimeraient que le Burundais soit une poupée à dire « Oui » ! Qu’il n’ait plus le droit ni l’audace d’aller contre la pensée du chef. Le projet d’amendement de la Constitution le démontre encore une fois.
Je pensais avoir été assez étonné pour ne pas dire choqué par la vidéo en question, mais je crois que certains ont cru que leur message ne nous était pas bien parvenu et ils ont mis les points sur les i.
« La police a reçu des ordres très claires, il lui a été demandé de travailler le plus professionnellement possible avec la plus grande rigueur et la plus grande fermeté … ». Bon, quand c’est dit par le porte-parole de la police, on n’a plus besoin de plus d’explication.
Si on revient à notre vidéo, elle reflète à elle seule comment la campagne du référendum est menée. Les propos qui y sont tenus sont tout aussi ubuesques que graves. L’homme en tenu du parti Cndd-Fdd s’adresse à une assemblée de gens et essaie de leur faire comprendre que le vote au référendum constitutionnel ne peut être que « Oui » ! Pour être sûr de se faire comprendre, il fait recours à un discours qu’aurait tenu le Président de la République : « Celui qui enseignerait de voter Non au référendum aura déjà dépassé la ligne rouge ! Il aura quitté le camp des Saints et serait dans le rang des malfaiteurs ». Donc selon ce propagandiste, on n’aurait pas le droit de voter non au référendum au risque d’être considéré et traité comme malfaiteur ? Donc au Burundi on aurait plus le droit d’avoir un avis contraire, une opinion divergente ?
Le parti plus fort que l’Etat
L’homme dans la vidéo n’hésite pas à donner des instructions on ne peut plus claires sur quoi faire face à quelqu’un qui appellerait à voter contre la révision de la Constitution. Il appelle son audience à arrêter ce « malfaiteur » et de faire appel à eux (les membres du CNDD-FDD). « L’officier de la police judiciaire n’aura pas besoin d’intervenir, affirme-t-il ! On va en découdre avec ce ‘’déstabilisateur’’. Il verra de quel bois on se chauffe ! Le parti fait la loi ! »
Et pour lever toute équivoque, il dit le traitement qui attend ces partisans du « Non » qu’il nomme par ailleurs : ceux de l’opposition qui ont causé des tracas en 2015. Tous ceux-là ne méritent rien d’autre que « Guhongorwa » (être édenté). Aussi simple que ça ! Les histoires de démocratie, liberté d’opinion et que sais-je encore, semblent ne plus avoir de place dans le Burundi souverain de 2018 qui se cherche pourtant une Constitution qui « nous affranchit complètement de toute forme de domination. »
Et pour ceux qui en doutent, le cas du docteur emprisonné parce qu’il serait soupçonné d’avoir partagé dans un groupe WhatsApp un message prônant le ‘non’ au référendum est assez éloquent. (Petite parenthèse, c’est un autre docteur de moins pour un pays qui n’en compte pas des tas sur son territoire! Éclairez ma lanterne?!).
Mais au fait, s’il n’y a qu’une seule option, le « Oui », à quoi bon ce référendum ? Pourquoi perdre des fonds qui serviraient à autre chose ? Pourquoi tout ce cirque ?