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[Opinion] Que vaut un plan révisé sans bilan du plan initial ?

Une table ronde des partenaires au développement et des investisseurs privés  est en cours à Bujumbura. Ce grand rendez-vous vise à mobiliser les ressources pour réaliser la Vision Burundi 2040-2060. Parmi les objectifs de cette table ronde figure la présentation  du PND (Plan National de Développement) révisé et de son plan d’actions prioritaires. Quid du bilan du plan initial ? Analyse.

Lancé en août 2018, le Plan National de Développement de 2018-2027 était censé guider toutes les initiatives de développement entreprises au Burundi. Six ans après, où en sommes-nous ?  Au vu de la situation économique actuelle, ne serait-il pas utopique de prédire un taux de croissance à deux chiffres cette année (2024), comme cela était initialement prévu ?

L’heure du bilan

Six ans après, la croissance économique tant attendue n’est pas au rendez-vous. Au contraire, le pays s’appauvrit à la vitesse V. Pour preuve (et ce n’est qu’un exemple), le taux de croissance économique ne cesse d’aller decrescendo.

D’après le plan initial, une croissance à deux chiffres (11% pour être précis) était prévue à partir de 2022. Néanmoins, selon un rapport du Fonds monétaire international (FMI), le Burundi a dû se satisfaire d’une croissance de 3,6 % en 2022.

Ce n’est pas tout. Le secteur agricole, pilier important du PND, était censé enregistrer un taux de croissance moyen de 8,3 % contre 0,6 % sur la période 2008-2017. Or, la production agricole ne cesse de chuter. Par ailleurs, les questions ne se posent pas uniquement dans ce secteur, mais dans presque tous les secteurs présentés comme prioritaires.

À titre d’exemple, le franc burundais se déprécie, l’inflation se chiffrait à 18,2 % au mois d’août dernier. Or, si le taux d’inflation atteint 10 %, la situation est déjà critique. Si nous frôlons les 20 % actuellement, c’est une preuve que la situation devient de plus en plus insoutenable. Dans ce contexte, il n’est pas étonnant que les investissements étrangers soient réticents.

Plus de questions que de réponses

Comment est-il possible de réviser un plan national sans même publier un bilan clair et accessible ? Comment les citoyens peuvent-ils juger des progrès réalisés ou des échecs rencontrés ? Le gouvernement tient-il vraiment compte des aspirations de sa population ou s’agit-il simplement d’une formalité bureaucratique ?

Une révision d’un plan aussi important pour notre pays aurait dû être précédée par une évaluation transparente et accessible du plan initial sur la période 2018-2023.

Or, l’absence de cette étape soulève des préoccupations quant à la continuité et à l’impact réel du plan qui sera présenté lors de la table ronde, car les citoyens et les parties prenantes ne disposent pas d’outil pour évaluer les succès ou échecs passés avant de s’engager dans le plan révisé.

Des plans contradictoires

Le secteur agricole était un pilier important du PND initial. Or, dans le plan révisé, l’analyse budgétaire montre que l’agriculture bénéficie d’une proportion relativement faible des ressources allouées. Le projet d’intensification des cultures vivrières est doté d’un budget quinquennal de 4 562,9 milliards BIF, soit environ 5,3 % du budget total estimé à 85 704,8 milliards BIF​.

En comparaison, des projets comme la réforme administrative (20 212,2 milliards BIF) ou la gestion fiscale (11 743,4 milliards BIF) reçoivent des financements nettement supérieurs​. Où allons-nous si les priorités continuent d’être mal alignées avec les besoins sur terrain ?

Ce billet est comme un cri d’alarme, Le PND devrait être un outil stratégique afin de bâtir un avenir meilleur pour notre pays. Même chose pour la Vision du Burundi 2040-2060. Mais sans une révision profonde et une transparence accrue, il risque de devenir un simple document de plus destiné à moisir dans un tiroir.

 

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