Les jeunes se ruent en masse dans les partis politiques. Quelle est leur motivation au juste ? La blogueuse Bella Lucia Nininahazwe se pose la question.
Nous sommes samedi matin. Je fais un peu de sport, de la marche. Une manière de tourner la page, car la veille j’étais un peu frustrée. Je rencontre une ex-amie de classe, elle me salue à la sauvette. Quelque chose m’impressionne. Elle porte les couleurs et l’uniforme d’un parti politique. Mais bon, je n’ai rien vu, ou je joue l’imbécile ! Je continue ma marche.
« Depuis quand es-tu membre de ce parti ? »
Un peu plus tard, je croise un autre groupe de jeunes, tous en uniforme. Là encore, je reconnais quelques visages. Ils me saluent. Tout comme la première, ils s’en vont rapidement. Mais là, je saisis par la main l’un d’eux. Il doit me révéler quelle mouche l’a piquée. « Arrête avec tes histoires ! C’est juste pour une descente à l’intérieur du pays pour la propagande de notre parti », me lance-t-il.
Une litanie d’interrogations fusent dans ma tête. Depuis quand es-tu membre de ce parti ? Pourquoi ? Des questions, encore des questions. Hélas, il est déjà parti. Je n’aurai aucune réponse.
Prise de conscience
Je suis interpellée pour ne pas dire secouée. Parmi eux, il y avait des gars avec qui on partageait les idées, commentait l’actualité, qualifiait le pouvoir d’injuste et de corrompu… Nos pauses de midi étaient bien nourries. Ironie du sort : aujourd’hui, ils courent derrière ce même parti ! Bon sang, que signifie tout cela ? Ce sont les mêmes individus, non ? Je perds la tête ou quoi ?
Le sport, j’oublie. Je fais demi-tour.
Le mystère…
«Ventriotisme»: amour du ventre (en fait, amour des choses matérielles, de l’argent)
À mi-chemin, je pense à mon professeur. Ses idées, ses leçons de vie ou encore ses blagues qui nous ramenaient à la raison, qui nous rendaient sages. « Il faut être patriote, non pas ventriote », signait-il toujours à la fin de ses parenthèses. Les deux mots principaux sont restés gravés dans ma mémoire. Indélébiles !
Arrivée à la maison, je ne me dirige pas vers la salle de bain comme d’habitude. Je prends d’abord mon Larousse et cherche la définition des deux mots. « Patriotisme : attachement sentimental à sa patrie, se manifestant par la volonté de la défendre, de la promouvoir ». Et «ventriotisme » ? Le mot n’existe pas. Les esprits tordus sont parfois créatifs ! Patriotisme : amour de la patrie ; «ventriotisme » : amour du ventre (en fait, amour des choses matérielles, de l’argent). Un dilemme : qui hait le fric au juste ? Là, je me demande où se positionnent mes chers amis.
Finalement, je me dis qu’ils ont peut-être bel et bien changé d’idéologie. Accordons-leur au moins le bénéfice du doute… « Time will tell » (Le temps nous le dira), disent les Anglais.