C’est une rivière qui n’augure rien de bon : des larmes, du sang. Le souhait du blogueur Rivardo Ntadambanya est que le Burundi en soit épargné.
Cette rivière où coule le sang des innocents
Coupables de rien,
Des « immaculées » lynchées dans leurs ménages
Avec leurs enfants qui crient
Cette rivière où coulent les larmes des frères et sœurs
Des vieux et jeunes
Des hommes et femmes
Qui perdent les leurs chaque matin et chaque soir
Des êtres dont la vie disparaît
Et dont l’avenir s’efface en plein jour ;
Cette rivière aux eaux stagnantes
De férocité, de méchanceté,
D’égoïsme, de boulimie, de rage,
D’animosité, de rancune, d’agressivité…
Dans le royaume des frères et sœurs ;
Cette rivière aux eaux chaudes
De tristesse, de mélancolie, de deuil
De chagrin, de divisionnisme
Dans une fratrie ;
Cette rivière qui arrose le mensonge
L’impunité, la traîtrise, la malversation…
Et noie l’amour, l’affinité, la tolérance
L’harmonie sociale et le courage
Cette rivière dans laquelle se puise
De l’eau que le politicien boit
Pour nous diviser
Ou nous induire en conflit,
Ou nous manipuler
Comme des ponts ou des échelles
Vers la poursuite de ses propres intérêts ;
Cette rivière dans laquelle
Se lave le politicien
Qui forme une milice
Ou qui arme ses partisans
Qui leur donne des plumes à feu
Au lieu des stylos à bille
Et les dirige vers la brousse
Au détriment des auditoires
Cette rivière que traversent
Les policiers qui tirent sur les manifestants
Qui lèvent les mains,
Ou des policiers ou miliciens
Qui pillent, violent ou tuent
Sous le couvert de l’impunité,
Et les militaires qui ne rêvent
Que de troubler le royaume de Nyaburunga.
Que le Burundi ne boive pas l’eau
De cette rivière d’angoisse et d’amertume
Qu’il a bu à maintes reprises :
En 1965, en 1972, en 1988 et en 1993
Cette rivière maudite
Dans laquelle le Burundi se baigna
Pendant toute une décennie.
Dans laquelle il plongea en 1993
Pour émerger en 2004.
Cette rivière qui gronde et effraie le peuple
Cette rivière aux marées de divisions
De dictature, de haine et de népotisme ;
Cette rivière aux crues et marées de refugiés
Qui fuient le pays de leurs ancêtres
Ou les mandats terroristes
Des services de renseignements
Qui ne rêvent que de torturer
Les opposants politiques
Pour cacher les crimes
Commis par les hauts dignitaires ;
Cette rivière-barrage
De la politique du ventre ;
Cette rivière de honte
Cette rivière porte-malheur
Qui ne présage rien de bien
Qui ne réserve pas de futur
Pour le Burundi ;
Que le Burundi ne se baigne jamais
Que le Burundi ne puise jamais
Que le Burundi ne se lave jamais
Dans cette rivière !