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Une lettre au président de l’Assemblée nationale: « Le problème du carburant n’est pas une vue de l’esprit »

La semaine dernière, lors de l’analyse du projet de loi des Finances pour l’exercice 2024-2025, le président de l’Assemblée nationale, Daniel Gélase Ndabirabe est longuement revenu sur la pénurie du carburant. Selon lui, la pénurie ne constitue pas le cœur du problème mais plutôt certaines personnes qui font de la spéculation et qui le vendent frauduleusement.

 Monsieur le Président de l’Assemblée nationale,

C’est un secret de polichinelle, le Burundi traverse depuis plus de 3 ans des pénuries répétitives du carburant. Ces derniers jours, la situation s’est aggravée et devient intenable pour la population.

« Se déplacer devient compliqué du jour au jour. J’ai eu du mal pour arriver à Kajaga et il m’est impossible de revenir », écrivait un ami dans un groupe WhatsApp samedi dans l’après-midi.  Je comprends l’angoisse de mon ami. Vous savez pourquoi ? Je viens de passer toute la semaine à rentrer à pied depuis le centre-ville. Non parce que je n’ai pas les 650 BIF de ticket de transport, mais parce que je ne peux pas payer plus de 5000 BIF pour rentrer le soir dans un taxi collectif qu’on appelle actuellement ‘’Kusanya’’, faute de bus.

Heureusement pour moi, je ne fais qu’une heure de marche pour arriver à la maison. De surcroît, j’ai une âme charitable qui me déplace tous les jours le matin. Mais imaginez la situation des gens qui quittent Ruziba vers le centre-ville et qui doivent parcourir la même distance au retour le soir ? Que dire de ces gens qui doivent prendre 4 bus chaque jour ? Qui vivent dans la commune de Ntahangwa mais qui exercent leur métier dans la commune de Muha et vice-versa. Et ils sont nombreux. Quid du rendement d’un fonctionnaire qui arrive au bureau après deux heures de marche ?

Monsieur le Président de l’Assemblée nationale,

Je peux être d’accord avec vous sur l’existence des spéculations. Comme vous le dites, avec cette situation qu’on traverse, quelques petits malins spéculent et vendent le carburant frauduleusement. Certains ont déjà été pris en flagrant délit avec des quantités énormes de carburant dans leurs ménages.

Cependant, une chose est claire. En cas de pénurie d’un produit de première nécessité, la spéculation est malheureusement inévitable.  Tenez! Sur le marché noir, il faut actuellement plus de 20 000BIF pour acheter un petit bidon de 1,5 litres d’essence. La question est : qui voudrait acheter un litre et demi d’essence à 20 000 alors que ce même litre s’achète à 4 000 BIF dans les stations-services si ce n’est que ces dernières sont à sec.

Monsieur le Président de l’Assemblée nationale,

Cette situation ne concerne pas que les citadins. Deux semaines viennent de s’écouler sans une goutte de carburant dans quelques stations du chef-lieu d’une province du Sud du pays. Oui, la grande majorité de la population burundaise ne vit pas à Bujumbura. Certes, une bonne partie des Burundais de l’intérieur du pays s’approvisionnent en nourriture à partir de leurs champs. Mais la pénurie de carburant les attrape malgré tout. Pour la simple raison qu’ils ne jouissent pas d’une autosuffisance complète.

Qu’en est-il des autres services vitaux. Comment se déplacent-ils pour bénéficier des soins de santé ? Imaginez par exemple ce paysan qui doit quitter Camazi en commune Gisagara de la province Cankuzo pour des soins de santé à Gitega. Il peine même à arriver au chef-lieu de sa province tellement les prix du transport se sont envolés. Actuellement, il te faut débourser plus de 20 000 BIF pour poser tes pieds dans la capitale politique en provenance de Bujumbura. Et pourtant, ils ne sont pas loin ces jours où le ticket de transport pour le même trajet était de seulement 5 000 BIF.

Les exemples ne sont pas exhaustifs. Est-il besoin de rappeler qu’à cause de la pénurie du carburant, les prix de la quasi-totalité des produits montent en flèche ? Une solution durable à cette problématique s’impose.

 

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