Le brancard artisanal, connu sous le nom d’inderuzo, demeure un outil indispensable au Burundi. Il est plus usité en milieu rural suite à l’indisponibilité des moyens de transport motorisés ou à cause des difficultés d’accès dues à un réseau routier souvent impraticable. Ce professionnel de santé œuvrant en milieu rural ne tarit pas d’éloges pour ce matériel et pour ses avantages.
Représentez-vous ce décor qui n’est pas rare au Burundi : une contrée rurale, reculée, au relief accidenté et où les moyens de transport motorisés ne sont pas facilement abordables. Imaginez alors un habitant de ce bled qui tombe gravement malade et qui doit être évacué d’urgence vers un établissement de santé. Comment pensez-vous qu’il va y parvenir dans ces conditions critiques ? Certainement pas par hélicoptère comme dans les films de sauvetage.
Heureusement, l’Homo sapiens a toujours su s’adapter aux contraintes de la nature. C’est ainsi que depuis des lustres l’inderuzo artisanal s’est imposé comme la solution idéale face à ce défi.
En tant que professionnel de santé ayant presté en milieu rural, j’ai eu l’occasion d’analyser de près cette alternative judicieuse.
Le « brancard-ambulance »
A mes début d’exercice de l’art de guérir en milieu rural, j’avoue que je n’étais pas familier à voir un brancard transportant un malade enveloppé dans une couverture. Cela me renvoyait l’image d’un malade à l’agonie. Mais, j’ai vite réalisé que ce n’est pas toujours le cas et que c’est un moyen de transport aidant dans de nombreuses situations, à défaut des engins motorisés.
Je me souviens de la première fois que j’ai accueilli un malade apporté sur un brancard. Il avait été victime d’un accident de travail, tombé du haut d’un palmier à huile. Il avait perdu l’usage de ses jambes à cause d’un probable traumatisme de sa colonne vertébrale. Cela étant plus sérieux, une ambulance a été dépêchée pour le transférer à l’échelon supérieur. Ce jour-là, j’ai admiré l’efficacité du brancard et des brancardiers. Ils avaient traversé monts et vallées pour parvenir au Centre de santé, accomplissant parfaitement leur rôle dans la chaîne de soins.
Un lien de cohésion sociale
Par curiosité, j’ai entrepris une petite investigation sur l’organisation relative à ce transport des malades à Kigwena (Rumonge). Après avoir ciblé des ménages où l’on conserve des brancards.
J’ai choisi de visiter le foyer de Vyimana Samuel (72 ans) qui habite sur la sous-colline Kirongorokegwa (colline Nyakuguma). Après lui avoir dévoilé la raison de ma visite, il me montre là où est accroché un brancard sur un mur. « Ce modèle est à la fois léger et robuste. Il est fait de fibres d’origine végétale. Cela facilite le portage des malades dans diverses situations. », explique-t-il.
Il nous relate des débuts de l’utilisation de cet outil dans sa localité : « Il y a quelques années, notre sous-colline n’était pas aussi peuplé qu’aujourd’hui. Nous avions beaucoup de difficultés à acheminer des personnes gravement malades au centre de santé proche. C’est ainsi que nous avons mis réuni nos efforts pour résoudre ce problème en acquérant notre premier brancard artisanal. »
Ce septuagénaire souligne l’importance de cet outil pour sa communauté précisant qu’ils en sont à leur troisième brancard et tous proviennent des contributions locales. Si des habitants des localités voisines en ont besoin, ils n’hésitent pas à leur prêter cet équipement.
Samuel insiste également sur le rôle fondamental de l’entraide dans ce système : « En cas de besoin, la famille du patient alerte l’entourage et selon la disponibilité de chacun, les porteurs se mobilisent rapidement pour prêter main forte ».