En Tanzanie, le port de Dar es Salam gère environ 95% du commerce international de ce pays. Au Burundi, les 3/4 des volumes d’échanges commerciaux du pays passent par la route plutôt que par le lac. Pourquoi restons-nous attachés à une voie plus chère et plus longue ? Que nous manque-t-il au Burundi pour vivre de notre Lac Tanganyika ? Et si on l’exploitait ? Arguments.
Ceux qui empruntent la RN1 savent, oh combien il est pénible de rouler derrière des remorques remplies de marchandises. Il n’est pas rare de passer 30 minutes ou 1 heure de temps dans des embouteillages causés par ces poids lourds. Ceux-ci dégradent aussi très rapidement nos routes, sans parler des risques d’accidents.
La majorité des camions chargés de marchandises et venant des pays de la région empruntent cette route. Si rien n’est fait, il est évident que dans quelques années, il sera plus difficile de se déplacer sur cette route nationale qui est, par ailleurs, la plus fréquentée du Burundi.
Des chiffres éloquents
« La différence entre le coût de transport par route et le coût de transport par chemin de fer du port de Dar-es-Salaam à Kigoma et par le lac Tanganyika fait qu’on enregistre une perte de 90 USD par tonne », commentait le Capitaine Dieudonné Dukundane en novembre 2021 lors du forum national sur le développement. L’actuel ministre des infrastructures, de l’équipement et des logements sociaux était, à l’époque, directeur régional de l’environnement à l’Autorité du Lac Tanganyika.
Eric Ntangaro, le secrétaire exécutif de l’Association des Transporteurs Internationaux du Burundi (ATIB) affirme que le transport du carburant par camion, de Dar-es-Salaam à Bujumbura, dure au minimum 3 jours avec une capacité de charge située entre 28 et 30 tonnes : « Si les marchandises, le carburant inclus, passent par la voie ferroviaire, le train met moins de 48 heures pour effectuer le trajet Dar-es-Salaam-Kigoma et puis, le bateau met entre 10 heures et 12 heures pour effectuer le trajet Kigoma-Bujumbura ».
La réhabilitation du port de Bujumbura qui, depuis plus de soixante-douze ans n’avait pas été modernisé, semble prometteuse. Cette réhabilitation permettra à ce port d’accroitre sa capacité d’accueil qui, actuellement, est de 500 000 tonnes par an. Le port de Bujumbura pourra aussi désormais accueillir de gros bateaux.
Jean Baptiste Biherengende, directeur général de l’Autorité Maritime, Portuaire et Ferroviaire (AMPF) estime que la voie lacustre permettra un gain de 40% sur les dépenses en matière de transport. Un chantier naval est aussi en cours de construction.
Au niveau du ministère de l’Energie et Mines, des états généraux ont été promis pour que tous les intervenants dans ce secteur puissent donner leurs contributions sur la question de l’emprunt de la voie lacustre.
La nation d’abord !
Bien que les avantages de la voie lacustre soient multiples, l’emprunt de cette voie reste une question délicate car des intérêts s’y jouent. Selon l’économiste Prosper Niyoboke, il faut une volonté politique et une réflexion de toutes les parties prenantes car, dit-il, des questions se posent : « Que deviendront ceux qui ont investi dans le transport routier ? Jusqu’à quel niveau sont-ils prêts à céder ? »
L’économiste suggère que, pour le bien de la nation, les intérêts des individus soient secondaires par rapport aux intérêts collectifs.
Gabriel Rufyiri, président de l’Olucome propose au gouvernement de collaborer avec les importateurs pour trouver une solution qui arrange tout le monde. « Il faut que l’intérêt général soit mis en avant. », rappelle-t-il.