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Débat : comment les jeunes d’aujourd’hui perçoivent l’invasion allemande ?

Est-il vrai que le malheur ne vient jamais seul ? Mwezi Gisabo dira que oui. En  plus d’avoir affronté maintes difficultés internes, ce monarque affrontera aussi l’invasion extérieure lourde de conséquences. Des jeunes en ont discuté. 

Un petit flash-back au début du commencement. Nous sommes en 1885-1886. À Berlin, au pays de Bismarck, se joue le sort de l’Afrique et celui du Burundi par extension : le partage de l’Afrique entre les puissances du vieux continent. Conclusion : le pays de Mwezi Gisabo tombe dans les mains des Allemands. 

En 1896, ces derniers ne vont pas perdre de temps. Ils débarquent dans la terra incognito qu’était le Burundi. Heureusement pour eux, nous dit le jeune historien Ernest Murwaneza : « Une sorte de chemin leur avait été préparée par  leurs prédécesseurs, des explorateurs et missionnaires arrivés avant eux »

Résistants, les Burundais ! 

Il avait raison celui qui a dit que rien ne résiste à  l’unité. La « farouche » résistance qui sera opposée aux envahisseurs en est la preuve vivante. Une résistance qui avait d’ailleurs déjà fait preuve, signale Lambert Hakuziyaremye, étudiant en socio-anthropologie, lors de l’invasion de l’esclavagiste Mohamed Bin Khalfan dit Rumaliza vaincu par l’armée de Mwezi dans sa recherche forcée d’esclaves. 

Avec leur infériorité technique, ce sont les Burundais  armés de leur unité, de lances et flèches qui donneront du fil à retordre aux « conquistadores ».

Malgré la traîtrise des rebelles Kilima et Maconco, complète le politologue Ambassadeur Denis Banshimiyubusa, cette résistance était fondée sur l’esprit patriotique et la confiance des Burundais en leur roi, un roi pour qui il fallait se battre.

Cependant, il faut bien le dire, cette résistance ne fera pas long feu. Après des combats épuisants, coûteux (plusieurs morts enregistrées parmi les Badasigana, l’armée de Mwezi Gisabo), la supériorité technique des Allemands, couplée à d’autres motifs, a fini par avoir raison du camp adverse, au grand dam du roi et sa royauté. 

Les raisons de  l’échec

C’est donc le camp de Mwezi en difficultés qui tentera, tant bien que mal, de continuer la résistance, en vain. Pour Vanessa Kaneza, jeune licenciée en science politique, il y a d’abord l’instabilité politique qui affectera le pouvoir de Mwezi Gisabo. Il y a aussi la politique de divide et impera des Allemands consistant à diviser les Burundais pour mieux régner sur eux. 

Mais pour Olivier Clerson Iradukunda, à la cour royale, tout n’était pas rose. Nombreuses injustices avaient lieu. Pire encore, assène-t-il, il y avait une multiplication des prétendants au pouvoir, ce qui ne facilitera pas la tâche pour ce qui est de la gestion du pouvoir. 

Prudence ici pour le politologue Ambassadeur Denis Banshimiyubusa. Il explique :« La royauté burundaise restait tout de même légitime aux yeux des Burundais. S’il y avait eu à choisir entre les deux pouvoirs, ce n’est pas sûr que les Burundais auraient choisi les Blancs ».

Perte de confiance

Richard Nkurunziza de son côté évoque une autre raison, celle de l’affaiblissement de la confiance en la royauté en raison des divisions ayant affecté la monarchie. Allusion faite aux conflits Twarereye-Mwezi Gisabo ou ce dernier contre Kilima-Maconco, entre autres. C’est possible donc que Twarereye avait des soutiens au sein de la population. Tout comme Kilima et Maconco.

S’il reconnaît l’érosion de la confiance en la royauté, une érosion due à ces divisions, le politologue Banshimiyubusa trouve plutôt que les Allemands, en plus de leur divide et impera, avaient surtout une grande supériorité technique. 

La suite, on la connaît. Mwezi sera forcé de jeter l’éponge et de « signer » une sorte d’armistice. Cela se concrétisera à travers ce qui sera appelé le « traité » de Kiganda. Un « traité » qui, selon providence Niyogusabwa, jeune lauréate de l’université du Burundi, donnera des ailes au camp rebelle et  fragilisera beaucoup plus le pouvoir royal. On y reviendra. 

 

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Les commentaires récents (3)

  1. C regrettable q ns soyons envahis par ces fauves. Ils ont detruit notre civilisation bdaise et nous ont inculqué la barbarie. Maintenant ns ne savons quelles valeurs sont les nôtres pire ils nous ont divisé.

  2. La conférence de Berlin sur le partage de l’Afrique s’est tenu de la fin 1884 au début 1885. Les peuples d’Afrique ne savaient même pas que leurs pays avaient été partagés entre les puissances européennes. Même si les Barundi avaient été totalement unis,(sans Kilima ou Maconco) ils avaient très peu de chance de résister seuls à l’Allemagne. Une union des peuples d’Afrique aurait peut-être fait mieux. L’Éthiopie qui avait réussi à battre les Italiens en 1887( à Dogali) et en 1896 (à Adua) a fini par succomber à l’invasion italienne en 1935-36. Les Allemands ont été chassés d’Afrique par la première guerre mondiale et c’est la deuxième qui a chassé les Italiens alliés cette fois avec les Allemands en 1941 (sans minimiser le rôle de le résistance éthiopienne).
    L’Afrique de l’Est avait été affaiblie par l’épidémie de peste bovine qui avait décimé le gros bétail. La maladie avait été introduite en Erythrée en 1887 (sciemment ou par accident) par des vaches importées d’Inde par les Italiens et l’épidémie avait frappé toute l’Afrique de l’est . Elle a laissé de mauvais souvenirs dans les mémoire collectives de ces régions.
    Les souvenirs sur l’occupation allemande sont variés. Si beaucoup parmi ceux qui l’avaient connue évoquaient la peur qu’elle leur a laissé, certains regrettaient l’efficacité et la fiabilité des Allemands.
    P.S. Quand les Allemands sont arrivés, Tawrereye était mort depuis longtemps.

  3. Toutes les résistances africaines à l’invasion coloniale(pas seulement celle de Mwezi Gisabo) ont fini par céder même après quelques victoires éphémères. Que ce soit celle d’Abdel Khader en Algérie, de Samory Touré en Afrique de l’Ouest, de « Mad Mulah » en Somalie contre les Britanniques, Maherero et Cornelius Frederiks en Nambie(Sud-Oest Africain) contre les Allemands , l’issue a été la même. La victoire des Zulu du roi Cetswayo à la bataille d’Isandlwana en 1979 n’a pas empêché la conquête totale de l’Afrique du sud par les Britanniques. Les victoires éthiopiennes de l’empereur Yoahness IV en 1887 à Dogali et celle plus éclatante de Ménélik II à Adua en 1896 n’ont pas empêché l’occupation du pays par les Italiens quelques décennies plus tard.
    L’entente des pays européens lors du partage de l’Afrique à la conférence de Berlin n’a pas duré longtemps. Elle a éclaté lors des deux guerres mondiales. L’Allemagne a alors été évincée de l’Afrique lors de la première guerre suivie par l’Italie lors de la deuxième. L’Allemagne a été remplacée par la Société des Nations qui a confié ses colonies aux puissances victorieuses. La Belgique a eu le Rwanda et Le Burundi, Afrique du sud a eu le Sud -Oust Africain (Namibie) le Royaume Uni a eu Le Tanganyika, La France a eu le Togo, le Cameroun a été partagé entre la France et le Royaume uni. Les puissances coloniales victorieuses sont aussi sorties affaiblies de la seconde guerre mondiale et n’ont pas pu résister au mouvement de décolonisation. La mésentente et les guerres entre européens ont favorisé la décolonisation.
    P.S.
    Un allemand qui avait vécu au Burundi de 1914 à 1916 est revenu à Bujumbura à la fin de 1969 (ou début 1970). Il a fait une conférence avec des photos et peintures faites à l’époque autour de Bujumbura et Rumonge . Il s’agissait entre autres des photos de son boy nommé Sindano au marché de Mukaza, du Chef Nyenama en uniforme de sous-officier de l’armée allemande et de son entourage, des manguiers qu’il avait planté à l’époque et qu’il a retrouvé. Il avait aussi des photos de l’atelier de fabrication de la ligne de téléphone (ou télégraphe) établie entre Bujumbura et Cyangugu. La ligne a été faite à partir du cuivre des nombreux bijoux (inyerere) que portaient sur les jambes les femmes de la région. Les Allemands les ont recueilli et les ont fondu pour en faire la ligne de plus de 100 km qui n’a pu fonctionner qu’un seul jour. Elle a été interrompue par l’attaque des troupes belgo-congolaises de 1916 contre les Allemands .