La journée et la nuit du 7 août 2025 restera gravée dans la mémoire des professionnels de santé au Burundi. En l’absence totale d’électricité dans une période de pénurie du carburant pour les groupes électrogènes, les hôpitaux du pays ont été plongés dans le chaos, mettant en péril des vies humaines. Voici le témoignage bouleversant d’un directeur d’hôpital de l’intérieur du pays, qui raconte avec émotion le cauchemar indescriptible auquel son équipe et lui ont dû faire face.
La journée avait commencé comme tant d’autres. Ensoleillée, calme et ordonnée. Personne ne pensait que la menace que représentait le communiqué de la Regideso annoncé le 1 août 2025 en rapport avec les perturbations dans la fourniture de l’énergie électrique du 04 au 14 août 2025. La coupure de l’électricité n’avait jamais été dure que le 7 août 2025. Les interventions chirurgicales étaient alors programmées comme d’habitude. Les équipes médicales prêtes.
Vers 10 heures, tout a basculé. Le courant s’est interrompu. En pleine pénurie de carburant, l’hôpital, dépourvu de la moindre goutte de carburant pour ses groupes électrogènes, s’est retrouvé dans une situation compliquée. Les premières conséquences ont été immédiates. Au bloc opératoire, un patient venait d’être anesthésié lorsque l’électricité a disparu. Le médecin, incapable de démarrer l’intervention dans ces conditions, a exigé une décharge de la part de la direction pour toute complication éventuelle. Le cas du Dr Kabura Diomède de Gitega est toujours vif dans le cœur des médecins. Le directeur chargé des soins a dû le convaincre d’opérer à la lampe torche. Une solution désespérée dans un environnement où la précision est vitale.
Le pire
Le pire était encore à venir. Une souffrance fœtale a été signalée à 10h30 en maternité, nécessitant une césarienne en urgence. Ces césariennes d’urgence ne prédisent jamais. La mère ne pouvait attendre. Le Directeur appelle la Régideso qui lui signale que la coupure est généralisée. Il appelle l’administrateur, puis le gouverneur de la province pour alerter, mais ne trouve aucune station-service pour dépanner l’Hôpital en carburant. Acheter du carburant ‘’magendu’’ (au marché noir) pour une institution publique, sans facture, est impensable. Les auditeurs de l’inspection générale de l’Etat peuvent t’écrouer en prison pour ça. Un risque difficile à prendre.
Les médecins ont dû alors prendre des risques inouïs. Sous anesthésie rachidienne, l’intervention a été menée dans des conditions que seul Dieu peut décrire. Heureusement, le bébé a pu être sauvé. Pendant ce temps, le service de réanimation alertait. Les patients sous oxygénothérapie étaient en train de désaturer. Même chose en néonatologie où les bébés prématurés luttaient pour survivre. Les concentrateurs d’oxygène, les couveuses hébergeant les bébés prématurés, etc, dépendants de l’électricité, étaient hors service. Y a-t-il eu des cas de décès ? Je préfère ne pas en parler. Entre temps, qui sera jugé ? Le Directeur, les médecins ou la Régideso ? J’y médite encore une fois au moment où j’écris cet article.
Course contre la montre
La nuit tombée, pas toujours de courant, pas de carburant pour le groupe électrogène. Les accouchements normaux qui avaient continué au cours de la journée, ont fini par épuiser les boîtes d’accouchement stériles. Allons nous continuer à faire des accouchements sans matériels stériles ? La stérilisation est impossible sans courant électrique. Alors, retour à l’âge de pierre avec la stérilisation à l’eau chaude et à l’eau de javel. Une pratique d’un autre âge.
Le laboratoire, l’échographie, la radiologie paralysés, ne pouvaient fournir aucun résultat. Le directeur a dû même acheter des bougies de ses propres deniers pour éclairer les salles, tandis que les téléphones, déchargés, rendaient toute communication urgente impossible.
Un appel à la responsabilité
Mon témoignage est semblable à ceux de plusieurs autres burundais exerçant d’autres métiers en rapport avec électricité. À moins que la Régideso ne veuille nuire, ou saboter le nouveau gouvernement, il faut qu’il cesse de reproduire ce qu’ils ont fait aujourd’hui. Comment expliquer à des familles endeuillées que leurs proches sont morts faute d’électricité ? Comment prendre une décision pareille de raccorder le poste de Rubirizi à la ligne transport 110 kV Gahongore-Poste RN1, avec une coupure de toute une journée et une nuit, tout en ignorant qu’il n’y a aucun pneu de secours pour les hôpitaux dans une pareille période de pénurie de carburant ?
En 2025, la santé publique et les services de base ne devraient pas être sacrifiés sur l’autel des dysfonctionnements. À bon entendeur, salut !
J’espère que les parquets burundais ne devront pas chercher à étouffer ces affaires même si le présumé coupable est une institution régalienne qui pourrait avoir trouvé dans ce manège une occasion de montrer à la SOPEBU que c’est elle la plus forte (histoire de rancune qui en cache du sabotage). Le principal coupable c’est la REGIDESO