Dans le cadre de leurs fonctions, les sources institutionnelles sont indispensables au travail des journalistes. Or, les responsables de certaines institutions refusent systématiquement de répondre à leurs sollicitations. Une autre préoccupation : à l’ère des nouvelles technologies de communication, chaque institution publique devrait au moins disposer d’une plateforme accessible au public, où elle publie régulièrement les informations, redevabilité oblige. Tous ces obstacles entravent le droit à l’information, pourtant consacré par la législation en vigueur. Coup de gueule.
Partons d’un exemple récent. Nous sommes début juillet lorsque je contacte le Directeur général d’une institution publique pour obtenir des précisions sur un dossier en cours. Le premier appel est cordial. Il me donne rendez-vous, puis un second, puis un autre… et au final, je ne suis jamais reçu. Silence radio.
Ne voulant pas abandonner, je me tourne vers le porte-parole du ministère de tutelle. Celui-ci me redirige vers une direction technique censée détenir les informations que je recherche. Là encore, le Directeur général me renvoie vers une autre direction, qui elle-même me renvoie vers la direction provinciale. Cette dernière, à son tour, me réfère à un autre Directeur général. Ce dernier, après avoir accepté de me parler, reporte nos rendez-vous à plusieurs reprises… sine die. Finalement, nous ne nous verrons jamais. Un collègue me confirme que cette pratique ne date pas d’hier. Comme le disaient les anciens : « Akari mu mpene niko kari no mu ntāma ».
Pourtant, la loi reconnaît au journaliste le libre accès aux sources !
Ce qui m’est arrivé n’est pas un cas isolé. À quelques exceptions près, de nombreuses institutions publiques communiquent difficilement avec les journalistes lorsqu’elles sont sollicitées. Lorsqu’un journaliste tente d’éclairer l’opinion, on le balade, on l’épuise… jusqu’à ce qu’il abandonne.
Le gouverneur fraîchement nommé de la province de Burunga a jeté un pavé dans la mare en incitant les responsables à fournir des informations aux journalistes lorsqu’ils sont sollicités. Et il n’est pas le seul : le président de la République lui-même a exhorté les administratifs à ne pas bouder les médias.
Les ministères fonctionnent. Les activités se poursuivent. Le service public n’est pas à l’arrêt. Les décisions sont prises, les projets avancent, les budgets sont dépensés. Or, le citoyen a besoin de savoir ce que font ses représentants — surtout que les agents publics sont censés être à son service.
Une loi spécifique sur l’accès à l’information ?
Rappelons que la Constitution de la République du Burundi garantit la liberté d’expression et d’opinion à l’article 31. La loi régissant la presse au Burundi, elle, évoque l’accès à l’information à l’article 52 en ces termes : « Dans l’exercice de son activité, le journaliste a libre accès aux sources d’information. Il peut enquêter et commenter librement les faits de la vie publique. Toutefois, il est tenu, dans l’expression de cette liberté, au respect des lois, des droits et des libertés d’autrui. »
J’ajouterais qu’il doit aussi avoir accès à ces sources dans des délais raisonnables. Car dans la réalité, les chargés de communication demandent parfois aux journalistes d’écrire une lettre au Directeur général ou au ministre. Une procédure chronophage, alors que le journaliste travaille souvent dans l’urgence. D’autres exigent l’envoi préalable d’un questionnaire, histoire de se préparer. Mais tout cela prend du temps et complique encore davantage le travail journalistique.
À un moment, il avait même été question de mettre en place une loi spécifique sur l’accès à l’information. Mais où en est cette loi aujourd’hui ? Nous avons contacté Mireille Kanyange, directrice de la Maison de la presse, pour en savoir plus. Elle nous a confirmé qu’un projet de loi sur l’accès à l’information avait bel et bien existé, mais qu’il n’a jamais été soumis à l’Assemblée nationale pour examen.