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L’enseignement fondamental : l’heure du diagnostic ?

Depuis 2013, le Burundi a mis en œuvre une importante réforme de son système éducatif. L’ancien système a été remplacé par l’enseignement fondamental et post-fondamental, passant de deux cycles à un cycle complet d’éducation de base scindé en 4 cycles. Neuf ans après, quel bilan ? 

Pour bien comprendre, il faut remonter le temps. Nous sommes le 10 septembre 2013. Une loi portant organisation de l’enseignement de base et secondaire est adoptée par l’Assemblée nationale. « L’enseignement fondamental est introduit en remplacement du système éducatif fondé sur le collège et le lycée. Elle née suite à l’intégration du Burundi à l’EAC », peut-on lire dans cette loi.

Dès lors, l’enseignement fondamental devait couvrir neuf années d’enseignement, l’ancienne 4ème année du collège a été définitivement supprimée trois ans plus tard. Dans le  Plan Transitoire de l’Education au Burundi 2018-2020, au début du système, on constatera que 58% des nouveaux entrants en 1ère année du primaire étaient âgés de 7 ans, alors que la réforme du fondamental fixe l’âge officiel d’entrée à 6 ans. 

Les redoublements, une épine 

Une des caractéristiques du système éducatif fondamental burundais est le taux élevé de redoublement. Selon l’étude de 2020 sur l’évaluation des apprentissages et analyse des pratiques de classe au Burundi, le taux de redoublement élevé a des conséquences multiples: augmentation des probabilités d’abandon, dégradation des conditions d’apprentissage par une surcharge des classes et gaspillage de ressources financières. 

Les études internationales sont d’ailleurs unanimes : le redoublement n’est pas bénéfique sur le plan pédagogique. Ce qui met en doute la qualité des élèves boursiers qui devront aller se couler dans la moule de l’enseignement à l’étranger. 

Pour Emmanuel Mashandari, enseignant et président de la Coalition Spéciale des Syndicats des Enseignants pour la Solidarité Nationale (Cossessona), la qualité de l’enseignement se dégrade à cause de plusieurs facteurs qui incombent en grande partie aux concepteurs du système de l’école fondamental. Ce syndicaliste n’y va pas par quatre chemins : « L’Etat ne s’est pas bien préparé pour assurer une bonne transition entre l’ancien et le nouveau système. Les enseignants, n’étant pas prêts, ont pris le train en marche ».

Oui au perfectionnement et non à l’évaluation

A cause de ce plat pas bien mariné, le ministère ayant l’enseignement dans ses attributions avait récemment annoncé une évaluation de niveau des enseignants. Cette décision décriée par les syndicalistes a finalement a été suspendue pour trouver un terrain d’entente. Pour Mashandari, la loi du 19 Août 1998 portant disposition particulière applicable aux fonctionnaires enseignants est pourtant bien claire. L’article 22 précise : « L’enseignant a, en cours de carrière, le droit d’améliorer et de compléter sa formation initiale par voie de perfectionnement. Les conditions sont déterminées par une ordonnance ministérielle signée par le ou les ministres ayant l’enseignement dans ses (leurs) attributions ». L’article ajoute que tous les cinq ans, l’enseignant a droit au perfectionnement. La durée cumulée de perfectionnement durant les cinq ans est de 60 jours au minimum. Le constat pour ce syndicaliste est que la formation continue des enseignants est très insuffisante, voire même absente. 

Pour lui, les intervenants dans le secteur de l’éducation doivent revoir et diagnostiquer tout le système au lieu de jeter la pierre à l’enseignant. Pour rehausser le niveau d’apprentissage, les décideurs doivent repenser le nouveau système éducatif, car, comme disait le pédagogue Roger Coussinet, « ce n’est pas en étant enseigné et parce qu’on est enseigné qu’on apprend ». 

 

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