Les boutiques implantées en mairie de Bujumbura ne délivrent pas encore la facture standardisée de l’OBR, ce qui fait perdre à l’Etat beaucoup d’argent. Pourtant, d’après la loi relative aux impôts sur les revenus, la facturation électronique devrait avoir commencé avec le mois de décembre 2020. Reportage.
Au mois de février 2018, l’OBR a procédé à la réforme du système de collecte des taxes internes et des recettes non fiscales. Une facture standardisée a été mise en place pour que chaque personne qui vend une marchandise, facture selon cette opération. Sans exception, même les petits boutiquiers sont tenus de s’adapter à ce nouveau système. Objectif : mettre fin à la sous-estimation du chiffre d’affaires par certains contribuables, générant ainsi un manque à gagner pour le trésor public.
Plus d’un an après, précisément le 29 mai 2019, la facture standardisée s’est invitée au débat à l’Assemblée nationale lors de l’adoption du budget exercice 2019-2020. Les élus du peuple ont interpellé Domitien Ndihokubwayo, ministre des Finances. « La plupart des commerçants ne délivrent pas la facture initiée par l’OBR. Monsieur le ministre, quel est votre commentaire ? ». L’argentier de l’Etat s’est voulu rassurant en indiquant que « les provinces pilotes, Bujumbura mairie, Gitega et Ngozi ont été contrôlées. Elles enregistrent un taux de conformité de 63,7%. ».
Sur terrain, une toute autre réalité
9h au quartier Muyaga de la zone Gihosha. Sacs biodégradables remplis de légumes dans les mains, deux jeunes hommes entrent dans la boutique. L’un achète du haricot. L’autre s’approvisionne en huile de palme. Le boutiquier les sert directement. Ils paient et s’en vont. Le commerçant ne leur délivre pas de factures. Après quelques minutes, une jeune femme entre. Elle achète du pain. Même constat. Pas de facture.
9h30 à la gare du nord. Plusieurs boutiques de chaussures sont ouvertes. Les clients ne sont pas nombreux. Ils viennent au compte goutte. Toutes les six boutiques situées sur la RN1 ne délivrent pas de factures. Interrogés, les boutiquiers s’expliquent : « Nous payons les taxes à la commune.»
10h30, 4ème avenue du quartier Bwiza. Sur dix boutiques visitées, aucune ne délivre de facture aux clients. Un des boutiquiers explique brièvement : « J’ai donné les factures pendant un mois. J’ai dépensé 70 mille BIF pour l’achat des facturiers. Un seul facturier coûte 12.000 BIF. ». Il a par la suite remarqué qu’il ne pouvait pas se le permettre car il ne gagnait que 100 mille BIF par mois. Il a jeté l’éponge.
Un autre commerçant qui passait par là s’invite à la conversation. « La plupart des clients refusent la facture. Ce qui m’a découragé de continuer à la délivrer». Parfois, beaucoup de clients arrivent en même temps, surtout le matin et le soir. A ce moment-là, il est difficile d’établir la facture pour chaque article. D’après lui, « si l’OBR veut connaître réellement notre chiffre d’affaires, il faut mettre en place un autre mécanisme moins cher et plus rapide », suggère-t-il.
Peut-on contrôler son utilisation ?
C’est quasiment impossible. Le personnel du fisc ne peut pas faire respecter la mesure partout. Pourtant, la facturation électronique semble être la seule solution pouvant mettre fin à la sous-estimation du chiffre d’affaires par certains contribuables, générant ainsi un manque à gagner pour le trésor public.
D’aucuns se demandent pourquoi la facturation électronique n’est pas en vigueur alors qu’elle est prévue par la loi relative aux impôts sur les revenus du 23 décembre 2020. « Toute personne physique ou morale est obligée de tenir une comptabilité simplifiée ou complète et a l’obligation d’utiliser la machine de facturation électronique agréée par l’administration fiscale », lit-on dans ce projet de loi.
La mise en application de cette loi pourrait apporter deux bénéfices principaux. D’abord, la mise en œuvre de la facturation électronique permettrait au fisc de collecter plus de recettes fiscales sans augmenter le taux de l’impôt.
En outre, la facture électronique réduit de manière significative les possibilités de fraudes sur le chiffre d’affaires. Ainsi, les entreprises du secteur informel pourraient également intégrer ce système financier afin de réduire les fraudes sur les ventes des marchandises.