article comment count is: 1

Taxi-vélo à Gitega : se développer au détriment des plus démunis ?

Depuis le 15 février, les taxis-vélo ont été excommuniés du centre-ville de Gitega pour préserver une image digne d’une capitale politique du Burundi. À l’ère de l’entrepreneuriat où plusieurs jeunes luttent contre le chômage à travers ce métier, ils se demandent actuellement à quel saint se vouer.

Il est 11h. Au carrefour du monument Monseigneur Ruhuna, ils sont nombreux et se taquinent mutuellement. C’est une équipe d’une quarantaine de jeunes dans la force de l’âge qui attendent patiemment, juchées sur leurs vélos. Tous espèrent gagner leur vie en faisant du transport. Parmi eux, Nimubona Jean, taxi-vélo depuis 10 ans. Après ses études universitaires en 2009, la vie ne lui a pas souri. Entre continuer à pointer au chômage et gagner son maigre pain quotidien, il a vite choisi. Il s’est acheté un vélo et a décidé de suer pour survivre. « Avec 15 à 20 clients par jour, j’empochais entre 150.000 et 180.000 Fbu/mois. Je parvenais ainsi à payer le loyer, nourrir ma famille, éduquer mes enfants et financer le petit commerce de ma femme. Mais aujourd’hui, c’est à peine si je peux avoir cinq clients », confie Jean, avant de plaider pour les taxi-vélo, qui selon lui, ne cherchent pas à s’enrichir, mais juste de survivre au chômage et à la pauvreté. 

Tâche d’huile

Annoncée le 11 février par l’administration de la commune Gitega, la nouvelle mesure qui crée un périmètre infranchissable pour les taxi-vélo leur interdisant l’accès au centre-ville, a bouleversé leur vie. À la merci des policiers qui veillent à sa mise en application, ces taxis-vélos ne savent plus sur quel pied danser. Pour Nimubona Jean, « la nouvelle mesure va diminuer la clientèle, car la plus part des services que les gens sollicitent sont au centre-ville alors qu’on n’y a plus accès ». Même son de cloche pour Marius, élève à l’Ecofo Kwibuka et taxi-vélo après l’école. Orphelin de père et de mère, il paye ses études et s’occupe tant bien que mal de ses deux petits frères grâce à ce métier. « Avec cette mesure, ce que je vais gagner ne suffira plus pour joindre les deux bouts du mois. Comment allons-nous survivre ? Allons-nous manger cette belle image de la capitale dont on nous vante ?», s’interroge-t-il avec amertume.

La belle image oui, mais…

 La ville de Gitega, en pleine expansion depuis qu’elle est devenue capitale politique, est désormais un lieu opportun pour entreprendre. En effet, des quartiers résidentiels périphériques comme Bwoga, Rweza, Musave, Nyabiharage, Karera, Nyabisindu, Rutonde, Masanganzira, etc. vers le centre-ville, nombreux sont ceux qui se déplacent régulièrement à vélo. Ce que corrobore Pierre Ikoriciza, un fonctionnaire de Magarama. « Avec mon maigre salaire, je prends un taxi-vélo parce que c’est le moyen de déplacement accessible ici à Gitega. Il est aussi moins coûteux et surtout rapide quand tu as une urgence. Où est-ce que je vais trouver les moyens pour prendre un taxi-moto ou un taxi-voiture ? », se demande-t-il, avant d’ajouter que les deux bus qui viennent d’entrer en activité ne vont pas remplacer les taxi-vélos. Il rappelle que la tentative d’introduire les bus  s’est déjà soldé par un échec dans le passé avec l’entreprise Volcano.

Que Gitega s’urbanise et se développe, est une étape à saluer. Mais, dans un pays comme le nôtre où le taux de chômage est élevé et un PIB par habitant de moins 300 dollars américains, une urbanisation mal gérée peut causer des dégâts aux habitants et laisser quelques-uns sur le carreau. 

 

Est-ce que vous avez trouvé cet article utile?

Partagez-nous votre opinion

Les commentaires récents (1)

  1. Que Gitega s’urbanise et se développe, est une étape à saluer. Mais, une urbanisation mal gérée peut causer des dégâts aux habitants et laisser quelques-uns sur le carreau. Franchement, vous avez raison et je remercie Yaga pour ce soutien au taxi-velo de Gitega en racontant leur calvaire. Yaga, je vous adore.