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À Ntega, l’ombre d’un passé trouble plane encore

Ntega et Marangara, respectivement des communes de Kirundo et Ngozi, sont tristement connues pour les massacres de 1988. Trois décennies après, les stigmates demeurent, en témoigne un débat qui a été récemment organisé au chef lieu de la commune Ntega

Trente deux ans après, les événements de Ntega-Marangara sont encore présents dans les mémoires des habitants de Ntega. Au début du débat, un intervenant demande s’il n’y aura pas des répercussions par rapport à son intervention. Les organisateurs le rassurent. Il ne sera pas inquiété pour ses propos.

Très rapidement, le débat s’oriente sur une des figures importantes du Burundi d’alors, si ce n’est la plus importante : le président Pierre Buyoya. Il est question de savoir ce que les gens de Ntega retiennent de lui. 

Nkeshimana Cyprien, un homme dans la cinquantaine, brosse un tableau sombre. « Des milices proches de l’Uprona ont surfé sur sa venue pour jouer les petits caïds. Ils disaient que Bagaza était le roi des Hutus mais que Buyoya allait remettre les choses en place », explique M. Nkeshimana pour décrire les racines de la psychose qui commençait à s’installer déjà dans les milieux hutus. Murangera Xavier, le voisin de Cyprien renchérit avec un détail : « Il y avait des rencontres nocturnes de jeunes tutsis et ils conseillaient aux hutus de lire les textes de l’Apocalypse. »

Il va sans dire parler des événements de 1988 à Ntega n’est pas loin de parler de la corde dans la maison d’un pendu. Comme déjà cité, ce sont des moments encore frais dans les mémoires. Une patate chaude. Le traumatisme est encore présent. L’intervenant suivant demande la dérogation de s’exprimer sous couvert d’anonymat. Pour lui, « Buyoya est victime de la mauvaise gestion de Bagaza sur la crise de 1972. Il ne faut pas le blâmer systématiquement. »

« Une crise par procuration! »

Le professeur Elias Sentamba tente de nuancer le débat. Dans la salle se trouvent des protagonistes qui étaient, pour les uns, parties prenantes au moment des faits. Les passions sont vives, l’objectivité s’effrite. Une nuance apportant une lumière scientifique émanant du politologue équilibre le débat. « Les gens de Ntega et Marangara, vous vous êtes retrouvés au milieu de luttes dont les enjeux vous dépassaient et ces luttes étaient téléguidées de loin. » 

Ces paroles jettent un froid dans l’auditoire. Pr Sentamba continue avec son argumentaire. « Le colonel Bagaza n’a pas su gérer les traumatismes de 72. Il a misé sur l’essor économique, faisant fi de panser les blessures provoquées par l’ « Ikiza ». Or, les réfugiés réunis au sein du Palipehutu n’ont pas cessé de brandir la menace d’une récidive de 72. Ils étaient très actifs en Europe. Ils alertaient la communauté internationale et appelaient à la cessation des aides. Le Palipehutu avait aussi une forte assise dans les milieux de réfugiés Burundais au Rwanda qui influençaient ceux qui étaient restés au pays. »

Mais pourquoi alors Ntega et Marangara ont été le théâtre de massacres macabres ? Le politologue explique que, « de par leur proximité avec le Rwanda, elles étaient un fief de l’idéologie de Palipehutu. Les frictions entre les composantes étaient vues comme émanant de l’action du Palipehutu. Donc à mâter. »

Les jeunes (qui ont très peu participé au débat) ont donné l’image de ne pas trop se soucier des joutes verbales de leurs aînés. Le seul point de convergence avec ces derniers est le souhait de savoir la vérité et vivre en harmonie sans traîner les démons du passé dans les esprits. 

 

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Les commentaires récents (1)

  1. Le débat a tendance à contourner les faits réel.dire que Buyoya a voulu réprimer la population parce qu,elle avait l’idéologie du palipehutu c,est,tout simplement Buyoya n’aimait pas les hutu même dans son livre mission possible ,il a confirmé ça