Quand on évoque le changement climatique, on pense aux forêts qui disparaissent, aux usines polluantes ou aux voitures qui étouffent l’air et leurs lots de conséquences. On oublie souvent les gestes du quotidien et, plus encore, l’impact particulier sur les femmes. Pourtant, derrière chaque inondation ou catastrophe naturelle, se cachent des vies féminines bouleversées, des détresses que l’on préfère trop souvent passer sous silence.
Nous sommes en 2024. ReliefWeb rapporte que plus de 47 000 personnes ont été forcées de quitter leur foyer. Un fait significatif : 56% parmi eux étaient des femmes. Ce nouvel exode porte à près de 80 000 le nombre total de déplacés internes, dont plus de la moitié sont des femmes et des jeunes de moins de 18 ans.
Quand les pluies détruisent les maisons et que les familles doivent se réfugier dans des abris temporaires, les problèmes prennent une autre forme. Les filles et les femmes sont particulièrement frappées de plein fouet. La raison ? Un environnement inadapté à leur hygiène.
Dans ces tentes improvisées, les familles vivent entassées. Les femmes et les filles n’ont ni espace privé pour se changer, ni conditions adéquates pour gérer leurs menstruations comme en temps normal. La promiscuité et l’absence d’intimité créent non seulement de la gêne, mais aussi de la vulnérabilité. La nuit, tout devient plus dangereux : l’obscurité favorise le harcèlement et les agressions. Les adolescentes et les jeunes femmes sont les premières exposées.
Des abris… sûrs ?
L’hygiène menstruelle devient un véritable parcours du combattant. Sans serviettes hygiéniques suffisantes, sans eau propre, sans espaces intimes pour se laver, beaucoup improvisent avec des morceaux de tissu, au risque de développer des infections. La promiscuité, l’eau stagnante et l’absence de soins adaptés aggravent encore la situation, exposant les femmes en général, et les femmes enceintes en particulier, à de graves maladies. Et pendant que tout cela se passe, ce sont encore elles qui portent la charge de s’occuper des enfants, des personnes âgées et des malades, alors qu’elles-mêmes sont en détresse.
Pourtant, les choses pourraient être différentes. Des abris sûrs devraient offrir des espaces séparés et sécurisés pour les femmes et les enfants, des sanitaires propres et éclairés, des kits d’hygiène adaptés, une présence de sécurité et des soins de santé de base pensés pour elles. Parler « d’abris sûrs », c’est reconnaître que les catastrophes naturelles, résultant du changement climatique, ne frappent pas tout le monde de la même façon. Les femmes paient un prix supplémentaire, non seulement à cause de l’eau qui monte, mais aussi à cause du silence autour de leurs besoins spécifiques.
Et si on changeait d’approche ?
Les femmes burundaises ne sont pas seulement victimes du changement climatique. Elles en sont aussi actrices, souvent malgré elles. « Actrices !Vraiment ? », diront certains. Évidemment, puisqu’après avoir utilisé les serviettes hygiéniques et les couches pour bébés, ce sont elles qui les jettent derrière la maison ou dans les caniveaux. Composés de plastique, ces déchets mettent entre 500 et 800 ans à se décomposer. Elles ont donc toute légitimité à être incluses dans la réflexion et les actions de prévention.
Protéger l’environnement, ce n’est pas seulement planter des arbres. C’est aussi permettre aux femmes et aux filles de vivre leur quotidien, que ce soit chez elles ou dans les camps de déplacés, sans polluer ni souffrir en silence. C’est aussi les impliquer dans les instances décisionnelles en matière de protection de l’environnement et de prévention des catastrophes naturelles.
Tant que leurs besoins spécifiques resteront ignorés, les femmes continueront de payer le prix caché du changement climatique.
Cet article a été réalisé grâce au programme “Féministes pour des alternatives climat et environnement (FACE)”, soutenu par l’Agence française de développement, CCFD-Terre Solidaire et ACORD Burundi.