article comment count is: 0

Elections 2025 : quid des groupes sociaux sous-représentés ?

A l’approche des élections, qui arrivent à grands pas, les organisations des femmes, des jeunes et des personnes vivant avec handicap demandent plus de représentativité dans les organes de prise de décision.

Le dernier recensement en date montre que les femmes et les jeunes représentent respectivement plus de 50 % et plus de 65 % de la population burundaise. 2/3 de la population sont des jeunes de moins de 25 ans. 

Si ces deux catégories de personnes représentent un grand nombre de la population, elles sont de loin sous-représentées dans les instances de prise de décisions. Elles le sont encore moins dans les hautes sphères des partis politiques, organes dont émanent les listes pour les postes au niveau de l’Etat.

Les femmes sont sous-représentées

Une étude réalisée par le Burundi Leadership Training Program (BLTP), en 2017 sur la représentativité et la participation des femmes et des jeunes dans les cadres juridique et institutionnel des partis politiques dévoile la situation réelle.

Au niveau du parti CNDD-FDD, il n’y a aucune femme sur les 5 membres du conseil des sages. Dans le comité exécutif, on dénombre seulement 2 femmes contre 8 hommes. Sur 28 membres du bureau politique, les femmes étaient au nombre de 2.

Au niveau du Sahwanya Frodebu, sur 3 membres de la direction du parti, aucune femme. Sur 18 représentants provinciaux du parti, il y avait une femme.

Pour le Groupe politique de Rwasa, une seule femme figurait dans le comité exécutif contre 9 hommes. Tous les 5 représentants régionaux étaient des hommes. 

Néanmoins, des efforts ont été faits au niveau des partis FNL et UPRONA. Dans le comité exécutif du parti FNL, les femmes étaient au nombre de 4 contre 7 hommes, soit 36 %. Au niveau du bureau politique, les femmes représentaient 40,6 %. Pour le parti UPRONA, au niveau du Comité Central, les femmes représentaient 30 %. 

L’âge n’est jamais mentionné…

Selon la même étude, les données en rapport avec la représentation des jeunes dans les organes de prise de décisions dans les partis politiques font indiscutablement défaut à tous les niveaux, que ce soit au niveau du ministère de l’Intérieur qui a en charge la gestion des partis, que ce soit au niveau des partis eux-mêmes.

« Le service qui s’occupe des partis politique déclare que les actes des congrès électifs mentionnent les noms, l’ethnie et le sexe des membres des différents organes, mais jamais l’âge ». Les partis ne demandent pas aux candidats qui se de préciser leur âge. Les quelques résultats obtenus grâce aux focus groups montrent que les jeunes ne sont pas du tout représentés au sein des comités exécutifs ou dans les directions des partis. 

Au sein de l’UPRONA, il n’y a aucun jeune sur les 3 membres de la direction du parti et sur 7 membres du conseil supérieur d’orientation du parti. Pour le FNL, sur 11 membres du comité exécutif, aucun jeune. Toutefois, ce parti accordait une place importante aux jeunes pour les représentants provinciaux du parti. Sur 18 membres, les jeunes étaient au nombre de 15. 

Ce faible taux des femmes et des jeunes dans les organes de direction des partis a pour conséquence que ces derniers soient moins représentés dans les organes du gouvernement. Pire, le quota minimal de 30 % prévu par l’Accord d’Arusha n’est pas respecté. 

Le BLTP révèle que les facteurs importants expliquant cette faible représentation des femmes et des jeunes dans les hautes sphères des partis politiques sont liés aux statuts sociaux de la femme et du jeune dans le contexte burundais.

Le manque de temps lié aux responsabilités familiales et les tâches ménagères figure parmi les raisons qui empêchent les femmes d’occuper les hautes sphères des partis politiques, selon l’enquête de cette organisation.

Une étude de Focode, la marginalisation des jeunes dans les hautes sphères des partis est liée à des stéréotypes selon lesquels les jeunes ne sont pas mûrs ou n’ont pas d’expérience, etc. Certains politiciens les considèrent comme des objets de politique sociale ou comme des fauteurs de troubles, des gens dont l’énergie est bonne à être exploitée à n’importe quelle fin.

Une éducation culturelle ?

La représentation des femmes, des jeunes est un processus qui demande une éducation culturelle et sociale sur leur inclusion politique aux différents postes. L’éducation traditionnelle ne considère pas l’apport de la jeunesse au développement du pays, explique Médiatrice Niyokwizigira, représentante légale de l’Association pour la Promotion de la Fille Burundaise (APFB).

Cette jeune fille appelle les femmes qui occupent les postes d’œuvrer pour que le monde fasse confiance en leurs sœurs. « Qu’elles sachent qu’elles ne sont pas là pour juste occuper les 30 %, plutôt qu’elles sont là pour mettre une pierre à l’édifice au développement de la nation ».

Comme les femmes ont au moins 30 % de la représentativité dans les organes de prise de décision, Mlle Niyokwizigira demande que la représentativité de la jeunesse soit aussi fixée avec un pourcentage à l’appui.

Le Burundi Leadership Training Program (BLTP), quant à lui, recommande au gouvernement de revoir les statuts et les règlements d’ordre intérieur en consacrant la parité homme-femme et en fixant un quota de 40 % de représentation des jeunes dans les instances de prise de décisions des partis.

Les personnes vivant avec handicap, point représentées

Les personnes vivant avec handicap sont une autre catégorie de la population qui n’est pas représentée dans les organes de prise de décision, affirme Rémy Ndereyimana, secrétaire exécutif de la fédération des associations des personnes vivant avec handicap. 

Toutefois, il précise que des textes réglementaires notamment la convention des Nations Unies relatives aux personnes vivant avec handicap, ratifiée par le Burundi et des discours politiques ambitieux existent. C’est leur mise en application qui pose encore problème suite au manque de la volonté des décideurs politiques. 

Malgré que la Constitution ne prévoit pas de cooptation pour les personnes vivant avec handicap, elles devraient être inclues dans les organes de prise de décisions : « Le Burundi doit faire comme les autres pays pour l’implication des personnes vivant avec handicap dans les instances de prise de décision ». Selon M. Ndereyimana, les pays de la communauté de l’Afrique de l’Est comme le Rwanda ou la Tanzanie sont déjà au stade avancé. Des représentants des personnes vivant avec handicap sont présents au parlement et au gouvernement et jusqu’aux services décentralisés des pays.

Et de lancer : « On reconnaît un gouvernement responsable par sa capacité d’inclure ou de faire participer les catégories les plus faibles ». 

S’appuyant sur la Convention des Nations Unies relatives aux personnes vivant avec handicap, Rémy Ndereyimana précise que les personnes vivant avec handicap devraient être représentées par les personnes élues par leurs pairs et qui ne sont pas des militants des partis politiques. « Ces derniers défendent les intérêts du parti, mais les représentants des personnes vivant avec handicap défendent les intérêts de leurs pairs ». Elles devraient provenir des organisations engagées pour la défense des droits des personnes vivant avec handicap. 

Qu’ils élisent avec dignité

Pour les prochaines élections de 2025, Rémy Ndereyimana demande d’abord la mise en œuvre des mécanismes facilitant les personnes vivant avec handicap. Les aveugles, les sourds devraient élire avec dignité. Ils devraient connaître les politiciens et leurs programmes. « Dans les campagnes électorales, le secrétaire exécutif de la fédération des personnes vivant avec handicap propose de rendre disponible des interprètes en langage des signes pour les sourds ».  

Lors des votes, il faut des bulletins avec braille. La dignité relève que le vote soit personnel sans passer par une personne intermédiaire. « Nous sommes disposés à montrer comment faire à moindre coût tout en respectant la dignité ». Il faut aussi des endroits accessibles pour les chaises roulantes. 

M.Ndereyimana demande aux autorités du pays de montrer une volonté en incluant les personnes vivant avec handicap comme le font d’autres pays. « Cela montrerait que le gouvernement a des ambitions humanitaires. Qu’il est prêt à mettre en œuvre les objectifs de développement durable».

Il recommande aux personnes vivant avec handicap de militer et se faire élire au sein des partis politiques tout en défendant leurs droits. Remy Nderiyimana appelle les responsables des partis politiques à inclure les personnes vivant avec handicap sur les listes des partis politiques.

 

Est-ce que vous avez trouvé cet article utile?

Partagez-nous votre opinion