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Curinyana, coupable d’être née fille

Les personnes, victimes de mots insultants ou rabaissants subis pendant leur enfance, peuvent développer un traumatisme qui aura un impact négatif ensuite sur leur avenir. Ceci est le témoignage d’une jeune adulte qui suit aujourd’hui une thérapie afin de se reconstruire.

Roxanna, appelez-moi Roxanna, c’est le petit prénom hérité de mon enfance. Prénom que j’ai aimé étant petite, mais que je déteste maintenant car il me rappelle mon enfance. Je suis une seule fille dans une fratrie de six enfants. J’ai passé la petite enfance, aux anges, entourée de mes frères. Je jouais avec eux, je les considérais comme mes protecteurs. Quand il arrivait de parler de nos rêves quand on sera adultes, ma mère, sans savoir la gravité de ses propos, disait que moi je ne serai jamais comme mes frères. « Être née fille, fût une grande erreur. Imagine-toi si j’en avais trois comme toi, ça aurait été une perte regrettable de toute ma vie », me disait-elle. Sans pouvoir saisir la teneur, innocente que j’étais, je souriais.

Des mots pour des maux

A mes 13ans, je suis déjà en 7ème. Une pauvre adolescente assidue puisqu’un jour on lui a dit qu’elle est une moins que rien, et que l’école ce n’était pas pour les filles.

La fin de l’année venue, c’est la fête à la maison. J’ai réussi avec une bonne note. Comme d’habitude, les parents achètent des habits pour leurs enfants. Sauf que chez moi, je suis la seule qui n’a pas ce privilège. En regardant les cadeaux de mes frères, je ne peux me retenir, je fonds en larmes. Dans ma tête, une seule question : « Pourquoi pas moi?». 

Pendant les vacances, je décide d’aller chez ma tante, histoire de trouver quelqu’un à qui me confier. « Suis-je née dans cette famille ou je suis adoptée ? », lui demande-je. Droit dans ses bottes, elle réplique qu’elle était même là quand j’ai vu le jour. Je ne lui dis pas, cependant, pourquoi toutes ces questions même si elle veut en savoir plus. 

Trois ans plus tard, une fête est organisée à la maison pour l’un de mes frères. Je l’appelle pour lui demander s’il veut un coup de main, maman me répète les mêmes mots. « Tu ne sers à rien ! » Lorsque les invités sont là, je cours me cacher de peur et de honte de passer devant les invités.

Réminiscence 

Toute cette période de ma vie, je croyais que je n’étais pas comme les autres. Seule contre tous, j’ai continué mes études et obtenu mon diplôme des humanités en 2015. J’ai commencé à faire des petits jobs ici et là pour me payer l’université, sachant que mes parents (disons ma mère) voulait que mon parcours scolaire s’arrête au secondaire. Ses mots résonnaient toujours dans ma tête. «Mbe wiga ngo uzomarire iki? Ko ata n’inkono y’itabi uzovamwo», 

Malgré son mépris, j’amenais de l’argent à la maison, je faisais tout pour leur prouver de l’amour et que je ne suis pas aussi nulle qu’elle le croyait, même si c’était vain à ses yeux.

Sans aucun encouragement de sa part, j’ai pu me reconstruire, me surpasser mais avec un sentiment de haine contre elle. Ce qui a aussi ruiné (ou presque) mes fréquentations amoureuses.

Maintenant, j’ai fait ma vie, je suis une fille indépendante. Je suis devenue « Curinyana », mon nom propre. J’essaie tant bien que mal de recoller les morceaux avec ma mère, mais je ne parviens pas à la cerner. Tantôt elle est reconnaissante de mes contributions pour la famille, tantôt elle est évasive et méprisante.

J’ai grandi avec cette blessure et ce manque d’affection de la part de ceux qui étaient censés me croire, m’encourager et me soutenir, mais qui m’ont repoussée comme la peste.

À toutes celles et tous ceux qui ont vécu (ou vivent) le même calvaire que moi, je vous dis juste un mot : COURAGE. Osez en parler, croyez en vous, c’est le seul remède pour remonter la pente. 

 

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