Récemment, le gouvernement du Burundi a amorcé une réforme de protection sociale. Quels regards portent les jeunes dont les parents sont à la retraite sur leur fin de carrière. Ce blogueur a interrogé quelques-uns d’entre eux.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Les retraités perçoivent une rémunération modique. Un récent rapport d’une commission chargée d’analyser les réformes du secteur de la protection sociale est accablant. 4869 retraités sur 29 360 perçoivent encore une pension de retraite mensuelle qui varie entre 2.400 et 10.000 BIF.
Suite au calvaire qu’endurent leurs parents, certains jeunes ont peur pour leur retraite. Tite, 25 ans, déplore une vie misérable de ses deux parents à retraite : « Mon papa a pris sa retraite en 2014. Ma mère, deux ans après. Ils sont tous malheureux. Mon père perçoit 159 mille BIF et ma mère, 80 mille BIF par mois ».
La galère au quotidien !
D’après ce jeune homme, ils sont toujours stressés, ils ne peuvent pas payer un loyer de 250 mille BIF par mois. D’ailleurs, ils ne sont pas en mesure de payer la scolarité de leur fils cadet. « Mon père a perdu le sourire et le goût de vivre. Il est abandonné alors qu’il a, jadis, travaillé pour construire le pays », souligne ce jeune homme.
Pour cet étudiant, cette situation est inquiétante. Cette angoisse trouve essentiellement son fondement dans la crainte de ne pas pouvoir toucher une pension de retraite assez suffisante pour subvenir à ses besoins. « C’est angoissant de voir la misère de mes parents. Demain ce sera moi. Je crains pour mon niveau de vie à la retraite car je risque de commencer ma carrière à 35 ans ou plus pour prendre la retraite à 60 ans »
D’après Tite, dans les pays où le système de pension est efficace, les employés souhaitent se retirer dès la première année de la retraite. Pour eux, c’est le moment de voyager, de profiter de certains loisirs. Si l’État ajoute une année sur l’âge de la retraite, les gens le vivent comme une contrainte. Dans la fonction publique burundaise, il est difficile de partir dès la première année.
Des retraités qui sont le fardeau des plus jeunes
C’est un sentiment de désespoir pour Claudine, jeune employée dans une entreprise privée. « Je suis tourmentée quand je vois le calvaire qu’endure mon papa », lâche, cette jeune femme. Il est dans une situation déplorable. Avec le montant des pensions qui stagne ainsi que l’inflation, son pouvoir d’achat s’effondre ».
Pendant les premières années de sa retraite, son père a dépensé ce qui restait de son bas de laine à des fins de soins de santé. Après, il s’est retrouvé dans un état de dénuement total. « Mon pauvre parent racle le fond du tiroir et peine à joindre les deux bouts. », précise Claudine
Elle se dit révoltée de soutenir un fonctionnaire de l’Etat à la retraite : « C’est frustrant. Je dépense mon épargne pour soutenir mon père alors qu’il s’est sacrifié pour le pays » dit-elle, mélancolique.
Déception
« Je ne compte pas sur les institutions de protection sociale pour vivre décemment quand je ne pourrai plus vendre ma force de travail. » lâche David, jeune ingénieur au chômage. Ce dernier ne cache pas sa déception. « Les retraités sont laissés pour compte. Mon père a travaillé pour l’Etat pendant 30 ans. Il percevait une pension de 90 mille par mois. »
D’après cet agronome, son père n’a pas pu continuer à vivre la vie de Bujumbura parce que, avec sa pension, il ne pouvait pas payer son loyer. Comme il n’avait pas suffisamment de moyens pour se construire une maison, il a été obligé d’aller au village et a pu construire une maisonnette avec le peu qui lui restait. « Maladif, mon père n’a pas vécu longtemps. Il est mort après trois ans », précise-t-il.
David explique que la mort de son père est due aux mauvaises conditions de vie pendant la retraite. Avec sa santé fragile, il était obligé de vivre avec un petit budget par rapport à l’époque où il était encore jeune fonctionnaire. Quand, on dit que tel prend sa retraite, enchaîne-t-il, je vois que fin est proche.