Tomber malade en ces temps de pénuries tous azimuts constitue une double peine. En plus de souffrir, l’on doit prendre son mal en patience avant d’être pris en charge. La moindre coupure de courant paralyse l’enregistrement des patients. La pénurie du carburant rend tout recours au groupe électrogène impossible. Cette blogueuse tire la sonnette d’alarme.
M. Claver* habite dans un village éloigné du chef-lieu de la province de Cibitoke, exactement à Ruhwa. Après trois jours de douleurs atroces, il se rend dans le Centre de santé de Rugombo le plus proche en quête de soins. Arrivé sur place, le verdict tombe comme un couperet. Son état nécessite une intervention chirurgicale et un transfert pour une meilleure prise en charge.
Aller de déception en déception
Malgré son âge avancé et ses pieds qui ont perdu leur vigueur d’antan, l’octogénaire n’est pas découragé. C’est plutôt avec optimisme qu’il se rend à Cibitoke en ce matin du mois de juin. Arrivé à l’hôpital, il est d’abord accueilli par une longue file d’attente à la réception. Ensuite, il fait la queue devant le petit bureau du médecin généraliste. Sauf que certaines personnes qui atterrissent de nulle part s’engouffrent directement dans le bureau sans faire la queue comme les autres.
On est à la veille du week-end et Claver doit également passer une consultation spécialisée. Hélas, il apprend que le médecin spécialiste ne travaille que 3 jours par semaine et qu’il est en congé ce jour-là. Même s’il peut trouver un logement, il préfère regagner son domicile pour revenir la semaine suivante. Un ticket simple Cibitoke-Ruhwa s’élève à 8 mille BIF.
Lundi. Claver, qui habite à 24 km de l’hôpital, se lève de bonne heure. Son optimisme nullement entamé, il trouve d’autres patients qui attendent déjà mais espère que le médecin les accueillera tous. Là encore, bis repetita. Toute la journée, c’est le ballet ininterrompu de femmes qui sont programmées pour une césarienne. Les autres, enfants, adultes, vieux, ne seront pas opérés et repartiront comme ils sont venus. Certains patients abandonnent tout espoir d’être opérés. Leurs petites bourses sont à bout de souffle. Quant à Claver, il loge chez un ami qui habite non loin de l’hôpital en attendant son tour.
Le jour suivant, il est troisième devant le bureau du chirurgien. Après un moment, il est reçu par le médecin spécialiste qui l’envoie faire des examens en vue de l’opération. Alors qu’il vient de payer les frais des examens à la caisse, il y a coupure de courant. Comble du malheur, le groupe électrogène de l’hôpital n’a pas de carburant. 10h, midi, 15h, toujours pas de signe de courant. Ce n’est que lendemain, à la troisième tentative, que Claver parviendra à faire ses examens, à revoir son médecin et à obtenir un rendez-vous pour l’opération.
De l’urgence de faire autrement
Lorsque des personnes avec une santé fragile mettent du temps à accéder aux soins, leur état de santé s’aggrave et les moyens dont ils disposent s’épuisent comme peau de chagrin. Ne faudrait-il pas se préparer en conséquence en constituant des réserves de carburant pour les structures de soins ? Par ailleurs, une meilleure digitalisation des services hospitaliers permettrait de mettre en place des plateformes où l’on peut facilement trouver des informations en temps réel sur le fonctionnement d’une structure de soins tout comme la programmation des interventions chirurgicales.
* : nom d’emprunt