Dans le temps, comme dit un conte, le Burundais riait bien volontiers à gorge déployée lors des conversations, le soir autour du feu, ou, plus souvent encore, autour d’une cruche de bière. Mais, hélas, ces joyeux moments ne se retrouvent plus aujourd’hui dans notre société. Pourquoi ? Sommes-nous blasés ou est-ce la misère des gens ?
Il semblerait qu’une maladie nouvelle se soit déclarée au Burundi. Le Burundais perd peu à peu l’habitude de rire. Il devient taciturne, morose. Il oublie que rire, selon l’expression d’un célèbre écrivain, est le propre de l’homme, en particulier le Burundais.
Je ne suis malheureusement pas le seul à avoir fait cette grave constatation. Tant il est vrai que de nos jours, on ne trouve plus beaucoup d’occasions de rire. Et l’humour n’existe plus. Les fêtes sont devenues symboliques et on prend sa bière, les rares fois où on arrive à se l’acheter, seul, et en pensant à comment faire pour manger le lendemain. Mais heureusement, paraît-il, le Burundais a une très grande capacité de résilience.
Nécessité absolue de retrouver le rire
Comment faire dans cette situation de misère généralisée où le salaire des fonctionnaires ne leur permet plus de joindre les deux bouts du mois ? Et les paysans cultivateurs ne trouvant plus d’acheteurs de leurs produits, les salariés et fonctionnaires étant criblés de dettes 29 jours sur 30 ?
Les Burundais disent que Dieu n’oublie jamais ses enfants. Ils ont impérativement besoin de retrouver leur rire joyeux, clair, sonore, celui de ces gens sans dette qui caractérisait nos ancêtres, le soir à la maison autour d’une cruche de bière traditionnelle, impeke ou urwarwa selon les régions.
Retrouver son rire, c’est encore possible
Comment retrouver son rire ? Il y a plusieurs façons de s’y prendre, mais surtout, ne jamais désespérer. D’abord garder espoir de quitter cette situation : la nuit paraît longue, mais elle finit par laisser place au jour. Ensuite, travailler et ne jamais baisser les bras car le bonheur sourit aux audacieux. Oui, travailler chez soi ou chez les autres moyennant une bonne rémunération, car il faut vendre ses forces de travail au bon prix. Ainsi, vous pourrez vous épanouir socialement et acheter ce dont vous aurez besoin pour vivre. Donc pour retrouver le rire.
Et aussi, il faut créer ou adhérer à des clubs de danse ou à des associations et coopératives d’entraide mutuelle, de prières et/ou de production. En kirundi, on dit que « tubiri tuvurana ubupfu » pour dire que la solidarité est indispensable en ces moments difficiles, et c’est vrai que quand on est en groupe, on se renforce mutuellement sous plusieurs aspects. Ainsi, on retrouve le sourire automatiquement, et même le rire si le groupe ressent la joie de revivre pleinement. Donc, surtout ne pas se retirer dans son coin sans possibilité d’échanger avec d’autres gens.
En fin de compte, on devrait absolument rire le plus souvent possible et à tous les âges, pour vivre longtemps. On le sait, le rire augmente l’espérance de vie. Et on ne devrait pas attendre l’âge de 56 ans auquel, paradoxalement, s’épanouiraient les humoristes. Et n’est pas humoriste qui veut.