Les Burundais ne font désormais rien pour rien. Le bloggeur Yves Irakoze a fini par le comprendre et se demande si le bénévolat aurait encore sa place dans une société aussi matérialiste que le Burundi.
Tout part d’une conversation lors d’une fête entre les participants d’une organisation dans laquelle je suis bénévole. Ambiance bon enfant, rire à gorges déployées, bonne musique, de la bière, un ami me tient un discours qui laisse entendre que des sous ont été détournés lors de la préparation de ladite fête.
Preuves, indices, pistes pour enquêter ? Rien ! Juste un soupçon : « les Burundais ne font rien pour rien », me laisse-t-il comprendre. Je n’en revenais pas. C’était la première fois que je me trouvais aux prises avec de telles accusations. Plus tard, des amis bénévoles me confieront comment ils doivent vivre avec des soupçons qui pèsent constamment sur eux. Du coup, un doute commença à s’installer dans mon esprit sur la pertinence d’être bénévole au Burundi.
Pourquoi être bénévole ?
A la base l’on devient bénévole dans une organisation parce qu’il y a un idéal partagé, des objectifs dans lesquels l’on se reconnaît. La plupart des organisations associatives burundaises étant dépourvues de moyens financiers, les bénévoles sont parfois obligés de puiser dans leurs poches pour permettre la bonne marche des activités. C’est le prix à payer pour leurs idéaux. Et c’est à ces mêmes bénévoles de supporter la méfiance et le mépris de la part de ceux pour qui même rêver est une entreprise périlleuse.
Les « hostiles » au bénévolat sont nombreux. Ils ne peuvent simplement pas comprendre que l’on puisse s’engager pour une cause sans rien attendre de pécuniaire en retour. Je suis scandalisé de cette attitude mais sans m’en rendre compte, je finis par la comprendre. En effet, ces gens sont le fruit de notre société. Plus matérialiste que les Burundais tu meurs.
Dote et mariage comme preuves
Quand les Burundais s’offrent des cadeaux et de l’argent lors des fêtes, un non avisé croirait en une solidarité désintéressée. Que nenni ! Lorsque leur tour viendra d’organiser une fête, ils attendent de la personne ayant bénéficié de leurs largesses qu’elle rende la monnaie, au propre comme au figuré. Dans les mariages, certaines personnes se demandent toujours pourquoi il y a la levée du voile ( gutwikurura) alors qu’elle n’a plus sa valeur symbolique d’antan. Et pourtant, sans se voiler la face, la raison saute aux yeux : lors de la dot la famille du garçon donne tout, argent, cadeaux à la famille de la fille. Lors de la levée du voile, c’est simplement le tour de la famille de la mariée d’apporter des présents. Ainsi, la balance commerciale est équilibrée.