Prier les yeux et le cerveau fermés ? 

Les gourous, l’autre menace qui plane sur la société moderne. Ces derniers temps les prophéties malsaines commencent à faire des victimes, ici au Burundi et ailleurs. Jusqu’à quand les fidèles vont-t-ils suivre ces faux prophètes qui exploitent leur peur pour leur faire faire des choses insensées ? Cette blogueuse tire la sonnette d’alarme. 

11 heures passées. Je me perds deux fois avant de pénétrer enfin dans les enceintes de l’Église Life Church Center en plein quartier Nyakabiga sous la chaleur accablante. Je vois une foule immense de fidèles, les yeux rivés sur le pasteur Marc Kagisye dont la voix éloquente et énergétique provoque des frissons. «N’ibintu bingahe waruzi ko utazorengana warenganye ? » (Il y a combien de choses que tu ne croyais pas surpasser mais que tu as surpassé ?), interroge avec vivacité le pasteur Marc en exhortant les fidèles à garder toujours espoir face aux aléas de la vie. « Les escrocs de ces jours bâtissent sur votre insécurité. ». Il pointe du doigt ces faux prophètes qui désarçonnent les gens. 

D’ailleurs, je viens m’entretenir avec lui sur ce sujet. « Nous ne devrions pas fonder notre existence en nous basant sur la peur car la peur ne va pas de pair avec l’espoir. » Ces mots résonnent en moi et je médite sur cette peur qui nous pousse parfois à commettre des choses atroces.

Gare aux prophètes aux intentions sournoises

L’histoire la plus effrayante s’est déroulée au Kenya. Un pasteur du nom de Paul Mackenzie Nthenge a invité ses adeptes, membres de l’Église internationale de la Bonne Nouvelle à jeûner jusqu’à la mort. Ce qui est le plus scandaleux, c’est le nombre de victimes : Plus de 70 dépouilles ont été retrouvées dans une forêt de l’est du Kenya depuis le 14 avril. Selon lui, c’est le chemin le plus court pour atteindre le paradis. Je suis étonnée en lisant l’article qui relate ces faits que c’est un ancien chauffeur de taxi qui est devenu le pasteur d’une Église de 3000 adeptes. Ce pasteur accusé de recourir à des préceptes religieux extrêmes est entre les mains des forces de l’ordre depuis le 15 avril.

Au Burundi, les adeptes d’Eusébie ont encore fait la une des média récemment. Une femme malade s’est rendu dans une de leurs structurée religieuses et y est décédée. Seraient-ce leurs convictions religieuses qui les empêchent de recourir à la médecine ? Un autre fait étrange, des hommes et des femmes ont été retrouvés à Kamenge dans une chambre spirituelle. Ils se sont enfermés pour une période d’une année afin de prier en ignorant carrément leur hygiène corporelle. Avant cela, ils avaient d’abord brûlé tout ce qu’ils avaient comme possessions. 

Un point commun dans toutes ces histoires : la conviction que la fin du monde approche qui pousse ces fidèles à s’engager dans les extrêmes pour trouver le salut. Comme le pasteur l’indique dans ses enseignements, cette peur peut-être exploitée par des faux prophètes.

Pourtant la loi essaie de mettre des balises. L’article 51 régissant le régime des sanctions de la loi nº 1/35 du 31 décembre 2014 portant cadre organique des confessions religieuses énonce que : « Les leaders religieux qui abusent de leurs fidèles jusqu’à attenter à leur intégrité physique et morale (viol, incitation au suicide, offrande d’être humains) sont punis selon les dispositions du Code Pénal (…) »

Discerner la vraie doctrine des fausses

C’est pour comprendre tout cela que je me suis adressée au pasteur Marc Kagisye.  Il commence par me donner des versets qui pointent du doigt ces pseudos prophètes. « Mais l’Esprit dit expressément que, dans les derniers temps, quelques-uns abandonneront la foi, pour s’attacher à des esprits séducteurs et à des doctrines de démons. » (1 Timothée 4:1)

Le pasteur Marc énumère les raisons qui expliquent l’aveuglement des fidèles envers « leurs guides spirituels ». En premier lieu, c’est la méconnaissance de la vérité. Il est donc impératif pour les chrétiens d’étudier en profondeur la parole de Dieu pour s’éloigner de la manipulation. En deuxième lieu, ce sont les peurs qui piègent les fidèles à travers certains enseignements des gens malintentionnés. Ces faux prophètes vont exploiter la peur de leurs fidèles pour en faire des esclaves. La vraie doctrine de la foi nous amène à être dépendants du Christ et non pas des hommes. 

En troisième lieu, il y a une soif de Dieu. Dans sa quête de Dieu, la personne peut tomber entre de mauvaises mains. En quatrième lieu, il y a ce souci de l’éternité qui entraîne les fidèles dans les excès pour atteindre le paradis et vivre éternellement. Selon lui, ce sont ces raisons qui font que les fidèles peuvent devenir des proies potentielles pour ces gourous.

« Les chrétiens devraient lire et comprendre la parole de Dieu pour discerner la vraie doctrine des fausses. Les fidèles ont la responsabilité d’examiner la prophétie pour ne pas suivre aveuglement tout enseignement », renchérit-t-il en soulignant le fait que certaines Églises africaines misent beaucoup sur le sensationnel que sur l’étude de la Bible.