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Pharmacovigilance : où en est le Burundi ?

Après la mise sur marché des médicaments, le contrôle de leurs effets sur la santé des consommateurs est essentiel. Cela relève de la pharmacovigilance. Ce concept fait partie de tout système de contrôle et de régulation des médicaments. Quelles sont les avancées et les limites de la pharmacovigilance au Burundi ?  

« Tout médicament est un poison en puissance. », révélait déjà Paracelse à la veille de médecine moderne. Nous avons fini par donner raison à cet érudit du seizième siècle. Voyez-vous la notice accompagnant tout médicament ? Cette pièce porte tout un tas d’informations. Des désagréments pouvant être causés par le traitement y sont aussi mentionnés : ce sont les effets indésirables qui ont été déjà investigués. Mais il faut savoir qu’il y en a d’autres qui peuvent être imprévisibles.

Ainsi, il est clair que la surveillance des médicaments est primordiale après leur commercialisation. Le concept de pharmacovigilance intervient en ce sens.

Quid de la pharmacovigilance ?

Selon la définition de l’OMS, la pharmacovigilance englobe les processus de surveillance, d’évaluation et de préventions des réactions indésirables aux médicaments. Elle s’étend aussi aux vaccins et le sang ou ses dérivés. 

L’OMS coordonne depuis 1968 un programme de pharmacovigilance international auquel participent actuellement plus de 170 pays et territoires. Les notifications de réactions indésirables de médicaments sont compilées dans la base de données mondiale VigiBase. En principe, ces notifications proviennent des professionnels de santé ou des patients eux-mêmes. Ils doivent passer par les canaux préétablis au niveau national.  

Localement, c’est l’Autorité Burundaise de régulation des médicaments à usage humains et des aliments (ABREMA) qui est responsable de la pharmacovigilance. Dans l’Article 5 du décret N0 100 ̸ 039 du 26 Février 2021 définissant son organisation et son fonctionnement, se trouve cette mission : « S’assurer que les effets indésirables, les interactions et les informations sur la pharmacovigilance des produits surveillés à l’échèle mondiale sont détectés, analysés et exploités. »

Le Burundi, acteur de la pharmacovigilance mondiale

Le Burundi a fait des progrès dans le domaine de la pharmacovigilance. Le directeur général de l’ABREMA, Dr Phn Dedith Mbonyingingo, cite certaines réalisations : « Nous avons configuré le système de pharmacovigilance avec l’actualisation des directives nationales. Des prestataires de soins ont été formés sur la pharmacovigilance. Des outils de notification des effets secondaires ont été multipliés et disséminés. Nous avons aussi mis en place un comité d’experts pour analyser les manifestations post vaccinales (MAPI) »

Ces progrès ont donné au Burundi la carte de « membre à part entière » du Programme international de la pharmacovigilance, en juillet 2022. Il a été le 152ième pays à rejoindre ce programme. Comme le montre Dr Phn Donatien Bigirimana, chargé du Programme Médicaments Essentiels au Bureau de l’OMS du Burundi, il profite de nombreux avantages : l’accès à la base de données mondiale VigiBase et aux outils servant à mener à bien les tâches nationales de sûreté médicale. Le savoir et l’expertise des autres pays membres, sans oublier les opportunités d’appui.

Quelle est la situation sur terrain ?

Etant membre à part entière du programme mondial de pharmacovigilance, le Burundi a des obligations à honorer. Il s’agit entre autres du respect de la compatibilité des formats de notification et la qualité des rapports. Ces rapports doivent être soumis régulièrement. 

Sur ce point, Dr Mbonyingingo se montre insatisfait : « On a constaté qu’il y a une sous-notification des effets indésirables. Le mieux est de renforcer la sensibilisation en périphérie pour avoir des notifications à analyser. » 

En effet, nous avons interrogé deux médecins prestant à l’intérieur du pays pour se faire une idée de la situation sur terrain. Curieusement, la réponse a été la même : « Je ne suis pas au courant de l’existence d’un tel système de notifications des effets secondaires des médicaments au Burundi. » 

Encore du pain sur la planche

Le Burundi doit encore faire beaucoup d’efforts pour que son système de pharmacovigilance soit opérationnel et efficace. Le directeur général de l’ABREMA montre les prochaines étapes : « Nous sommes sur le point d’élaborer un plan stratégique national de pharmacovigilance. Ce plan dressera les priorités et les actions à mettre en place pour atteindre notre objectif. En plus, il aidera à adapter à notre contexte les directives internationales. »

Pour bien installer le Burundi sur les rails de la pharmacovigilance, il faut exploiter nos moyens de bord. Là, nous faisons allusion au renforcement de la sensibilisation sur l’importance de notifier les effets indésirables des médicaments. Ensuite, il faut vulgariser les outils de notification standardisés et accessibles, pour faciliter le travail des acteurs de la pharmacovigilance.

 

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