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Pénurie du carburant : les conducteurs à bout de souffle

La crise actuelle  à la une sur  tous les médias du pays de Ntare fait biens de victimes. Pendant que les sources du carburant ont l’air de tarir partout, se déplacer d’un coin à l’autre est un vrai casse-tête. L’auteur de ces lignes  et ses compagnons de voyage se sont retrouvés piégés sur leur chemin de Gitega vers Bujumbura tandis que le chauffeur y a laissé une petite fortune à cause de tracasseries policières. Récit.

 Un vendredi à l’aube, je me prépare assez élégamment pour descendre sur Bujumbura. Avec cette pénurie de carburant, j’ai peur de ne pas pouvoir m’en sortir aussi facilement. J’arrive à l’endroit communément appelé Masanganzira au lever du jour et je commence tout de suite à chercher un moyen de transport. Après plusieurs tours dans le parking sans succès, un chauffeur me propose de monter dans son bus de marque Hiace pour 20 000 BIF. Pour rappel, le coût de transport Bujumbura-Gitega, fixé le 19 février 2024 par le ministère du commerce, du transport, de l’industrie et du tourisme, s’élève à 9 300 BIF.

Cependant, j’accepte le prix du chauffeur sans négocier. Au bout d’une demi-heure, le véhicule est déjà plein à craquer. Avant de partir, le convoyeur remplit son réservoir avec de l’essence contenue dans des bouteilles d’eau en plastique tirées de je-ne-sais où. Le chauffeur fait tourner le moteur et nous embarquons vers 9H45.

Un périple bien pénible

Notre transporteur engage le véhicule vers Bujumbura. A l’intérieur, le convoyeur nous répète sans cesse de nous serrer pour prendre d’autres clients en cours du chemin. Impossible de résister à ses injections. C’est pour, dit-il, « récupérer son capital ». Personne n’ose le contredire. A Giheta, nous échappons de justesse  au contrôle de roulage grâce à un policier à bord du Hiace qui indique à son collègue : « Afande, iyi nahejeje kuyicontrola » (J’ai déjà fait le contrôle de cette voiture, ndlr). Malheureusement, cet ange gardien descend en cours de chemin. Le convoyeur continue de nous entasser les uns sur les autres sans rompre. Notre périple est bien pénible et fatiguant. Mais cela ne nous gêne pas, nous nous estimons plutôt chanceux.

Le convoyeur passe un coup de fil à son collègue  qui l’avait devancé pour s’assurer de ne pas tomber sur un contrôle policier inattendu. Celui-ci l’informe qu’il y a un autre poste de contrôle juste après le chef-lieu de la province Muramvya. Avant d’y arriver, notre convoyeur prend une moto pour un client en excès dans le bus en lui disant de l’attendre un peu loin du poste de contrôle. Peine perdue, le contrôle sera très strict.

Fureur dans le bus

Les agents sont impitoyables dans leur contrôle. Après avoir vérifié les documents comme d’habitude, un policier chuchote à l’oreille de l’un des passagers : « Combien as-tu payé ?» La réponse est donnée en toute innocente mais l’agent en fait une affaire très grave. C’est là que commence une attente sans fin pour nous. Les policiers vont escorter le chauffeur accompagné de son convoyeur dans un coin isolé pour un conciliabule qui semble durer une éternité. Après  une heure d’attente, nous commençons à nous impatienter. Nous descendons pour chercher vainement un autre transport.

Ce n’est qu’après presque deux heures que le chauffeur et son ami réapparaissent tous furieux, complètement dévastés. Le chauffeur brandit une contravention de 2 00 000 BIF pour « hausse des prix ». Et de se  lamenter : «Ehe raba ivyo bangiriye ! Igikinju nakiguze 20 000 BIF. None igitoro kizimvye ni jewe nca ndavyishura ? Aha ndabamanukanye ku buntu» (Regardez ce qu’ils viennent de me faire. J’ai acheté une bouteille d’essence à 20 000 BIF. Si le carburant est cher, est-ce à moi d’en payer les pots cassés? Maintenant, c’est comme si je vais vous déplacer gratuitement). Au bord du volant, le chauffeur ne cesse de se tirer les cheveux, de jurer, de secouer la tête de telle sorte que nous avons peur d’être précipités dans un ravin. Nous arrivons à Bujumbura vers 15h30. Presque 6 heures de route. Quel gâchis!

Malgré leur manière peu scrupuleuse de surcharger le véhicule, nous sommes tous consternés par cette perte que le chauffeur et son convoyeur viennent de subir. Par après, j’ai appris que le convoyeur avait tenté de régler l’affaire à l’amiable par le sempiternel pot de vin. Le policier voulait un « petit » 10 000 BIF. Le convoyeur insiste, quant à lui, pour ne donner que 5 000 BIF seulement mais sans succès. L’affaire finit dans les mains du « chef ». Avec toutes les conséquences qui ont suivi.

 

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