Les lamentations se multiplient. Des voix s’élèvent pour accuser la Commission électorale nationale indépendante (CENI) d’être penchant. Preuve que la situation entre elle et certains politiciens se dégrade ?
La déclaration sortie ce jeudi 23 janvier et signée par Patrick Nkurunziza, à la tête de la coalition Burundi Bwa Bose et président du parti Frodebu dévoile tout : « La coalition Burundi Burundi Bwa Bose [….], est préoccupée par la manière dont les élections de 2025 sont en train d’être organisées. ». Le titre déjà de ladite déclaration crie à l’exclusion.
Via cette déclaration, cette coalition indique que certains leaders politiques avaient déjà d’ailleurs dénoncé des lacunes dans la mise en place de l’équipe de la Ceni, du code électoral, etc. Le plus révoltant, charge-t-elle, « la Ceni a rejeté les listes des candidatures aux communales de cette coalition en s’appuyant des motifs infondés ».
La liste des diatribes est longue. Un calendrier électoral non consensuel, non-respect du calendrier en forçant le dépôt précipité des listes des candidatures aux législatives, communales, non-respect du code électoral qui reconnaît que les partis politiques peuvent participer comme une coalition, rejet des listes de la coalition pour les législatives, etc.
Après avoir énuméré une série de manquements, cette coalition ne cache pas sa déception et va très loin : « La coalition demande aux membres de la CENI de démissionner s’ils constatent qu’ils ne sont pas capables de bien organiser les élections et d’être indépendants. »
Ici, la requête est très forte mais ça montre le climat dans lequel nos politiques, nos indépendants,… le Burundi est en train de cheminer vers les scrutins proprement dits. Ça inquiète. Ça ne présage rien de bon.
Que présagent les prochaines élections ?
Oui, les Burundais sont fatigués. Les échéances électorales n’ont pas été souvent porteuses de chance. Aujourd’hui, ils aspirent à des élections apaisées, démocratiques, transparentes, inclusives. Et la Ceni a un rôle crucial pour que ces quatre aspects transparaissent dans les prochaines élections. Oui, les autorités aiment rassurer, tranquilliser. Même le Chef de l’Etat le dit souvent : « Amatora azogenda neza ». Prions pour que cela soit une réalité.
Mais, reconnaissons que ces critiques, ces déclarations des politiques, … ne sont pas toutes fausses. D’ailleurs, elles font déjà peur. Et surtout, quand elles mettent en doute la neutralité, l’indépendance de l’arbitre. Si cela s’avère vrai, le match ne serait-il faussé à l’avance ?
Je ne suis pas très fans du football. Mais, quand le match est équilibré, j’attends souvent les fans applaudir, chanter les exploits de tel ou te autre joueur, etc. Dans les échanges, j’entends souvent dire que c’est lors de tels matchs équilibrés, avec un arbitre neutre, indépendant, que les grands joueurs se remarquent, que des noms sortent du lot, que certains joueurs deviennent des légendes, des sauveurs, etc. Et à la fin du match, l’équipe victorieuse célèbre en grande pompe sa victoire, on prime l’Homme du match. C’est une victoire méritée.
Mais, en cas d’un forfait, mêmes les supporteurs rentrent frustrés. Ils ne jubilent pas. Le spectacle n’a pas eu lieu. Et Cid de Corneille disait : « A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire. »
Et cette sortie virulente de la Coalition Burundi bwa Bose intervient après que, dernièrement, lors d’une réunion entre la Ceni et ses partenaires, certains politiciens n’ont pas mâché les mots. Même ceux qui sont qualifiés de proches du pouvoir n’ont pas pu se retenir. « Il n’y a pas de compétition dans les élections communales à cause d’une seule personne qui affecte les autres candidats restants. Si vous retirez tous les candidats à cause d’une seule personne, vous tuez la démocratie… La CENI n’a pas voulu coopérer là-dessus. Il n’y a pas de compétition à ce niveau », s’est lamenté Olivier Nkurunziza, président du parti Uprona, dans cette réunion du 17 janvier. Élections 2025 : la fin de la compétition au niveau communal ? – IWACU
Ce n’est pas seulement cela. Anicet Niyonkuru, président du parti CDP (Conseil des patriotes) a, à son tour, accusé la Ceni de manque de coopération et de flexibilité : « Vous n’avez pas accordé le temps nécessaire pour corriger les irrégularités observées dans les dossiers présentés. Il y a un manque total de flexibilité »
Sur environs 30 partis politiques, il semble que moins de 10 partis politiques ont pu avoir des candidats pour les communales dans tout le pays. Et pour les législatives, ils sont moins de 5. Et de là, on se pose la question : quel est le poids de tous ces partis sur l’échiquier politique ? Ou bien la majorité constitue-t-elle ce qu’on appelle « des partis satellites » ? Ce qui gâche d’avance le jeu démocratique.