Entre les couacs de l’ANAGESSA et la pénurie d’engrais, la politique agricole actuelle semble avancer à tâtons, bien loin de la cohérence attendue. Pourtant, l’agriculture est censée être la priorité nationale, si l’on en croit au slogan « que chaque bouche ait de quoi manger et de l’argent et pour chaque poche ». Peut-on parler d’un sabotage de la politique agricole du président de la République ? En analysant la situation actuelle, on se rend vite compte que les choses ne sont pas si simples. Analyse.
Depuis sa création en 2019, cette politique cumule des échecs. (Même les députés s’inquiètent). Un retour en arrière en 2022 pour mieux comprendre. Cette année la production achetée par l’ANAGESSA a pourri dans les stocks.
En 2024, il y a eu un retard de paiement des agriculteurs qui ont vendu leurs récoltes. Pourtant, un budget de 145 milliards Fbu a été voté pour cette agence. En même temps, les missions de l’ANAGESSA suscitent de plus en plus d’interrogations.
Deux scénarios pour mieux comprendre la situation. Avant la création de l’ANAGESSA, le marché agricole était dominé par des commerçants qui profitaient de la détresse des agriculteurs en achetant leurs récoltes à des prix dérisoires pour les revendre ensuite beaucoup plus cher. De l’autre côté, certains agriculteurs préféraient garder leurs récoltes sur eux avec le risque de voir leur production pourrir faute de moyens suffisants de conservation. Mais alors, en quoi l’ANAGESSA est-elle différente ?
Quid de l’anticipation ?
Lors de la collecte en avril 2024, l’agence a acheté le maïs aux agriculteurs à seulement 1 700 BIF/kg. Aujourd’hui, alors que le prix sur le marché libre varie entre 2 800 et 3 000 BIF/kg, l’ANAGESSA le revend à 2 100 BIF/kg. Une différence qui interroge.
Les questions s’accumulent, mais les réponses se font rares. Pendant ce temps, les agriculteurs continuent de souffrir. Les engrais sont quasiment introuvables et/ou arrivent bien très tard. Pire encore, le peu d’engrais disponible semble profiter en priorité aux fonctionnaires pratiquant l’agriculture.
Comment se fait-il alors qu’à chaque saison agricole, les mêmes erreurs se répètent ? Pourquoi ceux qui devraient anticiper ces besoins (le ministère de l’Agriculture, gouverneurs, administrateurs, les DPAE) semblent toujours agir tardivement ?
Une politique agricole pour quels résultats ?
À mon avis, lorsque les mêmes dysfonctionnements se répètent année après année, il ne s’agit plus d’erreurs isolées, mais bien d’un problème systémique. Comment expliquer cela ? Vous vous rendez compte : 145 milliards de Fbu pour l’ANAGESSA !
Lorsqu’on regarde les programmes agricoles sur papier, tout semble bien ficelé. Des plans ambitieux, des objectifs louables. Mais dès qu’on passe à l’exécution, tout se grippe.
Les personnes nommées à la tête de certains programmes agricole n’ont souvent ni les compétences ni l’expérience nécessaires pour les piloter efficacement. Pour preuve, il suffit de revenir sur le premier Forum National de Développement, où Deogratias Niyonkuru, ancien Conseiller Stratégique en Développement, a souligné un fait alarmant : des millions de dollars retournent aux bailleurs faute de gestion efficace. Une situation qui illustre parfaitement le décalage entre les ambitions affichées et la réalité du terrain.
Tant que l’agriculture ne sera pas considérée comme le moteur de développement, on continuera de voir les mêmes erreurs, les mêmes promesses sans lendemain. Et qui en paie le prix ? je vous laisse imaginer.