A l’instar d’autres produits énergétiques, le prix du gaz de cuisson ne cesse d’augmenter. Pour certains utilisateurs, cette hausse remet en question les efforts consentis pour promouvoir la cuisine écologique. D’autres estiment que la fixation des prix de ce produit est obscure. Quant à l’autorité de contrôle de l’énergie, les prix sont établis par les commerçants en raison de l’absence d’une loi appropriée. Cependant, d’ici peu, la réglementation des prix sera mise en place.
« La flambée des prix ne connaît aucun répit, et voilà que le gaz de cuisson s’ajoute à la liste des coupables », s’exclame J.M, propriétaire d’un restaurant en ville de Bujumbura. D’une voix empreinte de colère, cet homme d’affaires se lâche : « Nous avions mis tous nos espoirs dans une transition vers une énergie plus propre et économique, mais les signaux actuels ne nous laissent guère place à l’optimisme. »
D’après les estimations de cet entrepreneur, sa consommation hebdomadaire de gaz de cuisson s’élève en moyenne à 4 bouteilles de 12 kg chacune. Ce qui représente une dépense de 68 000 BIF par bouteille. Comparativement à l’année 2021, explique cet hôtelier, où l’achat de 12 kg de gaz coûtait seulement 52 800 BIF, soit une hausse de 15 200 BIF. Cette augmentation est considérable, vu la situation économique dont ce secteur fait face. « Cet envol pose un problème considérable pour un tel produit stratégique, promu comme une alternative au charbon de bois », ajoute J.M.
Cette hausse de prix du gaz de cuisson a de graves répercussions sur les ménages et les entreprises qui dépendent de cette source d’énergie. « Si les prix continuent d’augmenter à ce rythme, cela remettra en question tous les efforts consentis pour promouvoir le green cooking comme une option plus propre et plus durable.», craint J.M
La fixation des prix est opaque
Si cette tendance persiste, explique-t-il, certains seront contraints de continuer à utiliser le charbon du bois, et d’autres méthodes de cuisson traditionnelles, ce qui contribuerait à la déforestation et à la détérioration de notre environnement, déjà menacé.
Selon J.M, la situation actuelle, où les importateurs de gaz se comptent sur les doigts de la main et bénéficient des exonérations, leur permet de fixer des prix avantageux pour leur propre intérêt. Cette réalité engendre un déséquilibre économique flagrant, portant un coup direct au pouvoir d’achat des consommateurs.
A l’instar d’autres pays, martèle-t-il, l’Etat doit réglementer les prix du gaz de cuisson, au même titre que ceux du carburant : « Il est étonnant de constater que la structure des tarifs du gaz reste obscure, malgré sa nature stratégique, comparable à celle de l’essence, du mazout ou du pétrole », affirme avec conviction notre source.
Le gaz à cuisson tend à devenir un produit de luxe
L’augmentation des prix du gaz préoccupe également les ménages qui ont opté pour la cuisine propre, car ils voient leurs dépenses augmenter continuellement alors que leurs revenus ne suivent pas. Ce qui était autrefois considéré comme une solution économique et écologique, à savoir le gaz de cuisson, devient peu à peu un luxe pour de nombreuses familles.
M. M, habitant en commune de Ntahangwa exprime son désarroi face à la flambée des prix du gaz : « Je n’en peux plus. Depuis deux ans, je me suis tournée vers le gaz de cuisson pour préparer les repas de ma famille parce qu’il était moins cher. Pourtant, les prix ne cessent de grimper, ajoutant un fardeau financier supplémentaire à notre vie déjà difficile.»
En l’espace de deux ans, le prix d’une bouteille de gaz de 12 kg est passé de 48 000 BIF à 66 000 BIF. Une hausse considérable qui pèse lourdement sur le portefeuille familial. Si cette tendance persiste, martèle cette femme, le gaz de cuisson deviendra un produit de luxe, que beaucoup ne pourront plus se permettre.
Les prix varient d’un point de vente à l’autre
A Bujumbura, les prix du gaz de cuisson varient d’un point de vente à l’autre. Dans certains endroits, une bouteille de gaz de 12 kg est vendue à 72 000 BIF, tandis que dans d’autres, le même s’achète à 68 000 BIF. K.A, vendeur détaillant, explique cette différence de prix: « Nous achetons au prix de 5 500 BIF par kilogramme, mais nous le vendons à 6 000 BIF.»
Cette situation difficile est corroborée par d’autres vendeurs de gaz de cuisson à Bujumbura. « Nous sommes confrontés à des difficultés financières, car nous devons payer le loyer, les salaires du personnel et les frais d’électricité. Parfois, nous passons une semaine entière sans avoir un seul client.», raconte D.H.
L’Etat régule les prix
Face à la hausse des prix, Willy Ciza, directeur des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique au ministère de l’Énergie s’explique : « La hausse des prix du gaz de cuisson est directement liée de l’augmentation des prix de produits pétroliers »
Ce responsable précise que le prix du gaz de cuisson est fixé par le gouvernement, à l’instar d’autres produits pétroliers via l’Autorité de Régulation des Secteurs de l’Eau potable et de l’Energie (AREEN). « Cet organe suit de près les fluctuations des prix du gaz de cuisson sur le marché international, afin d’ajuster les tarifs, garantissant ainsi que ni les consommateurs ni les commerçants ne subissent les conséquences de la variation des prix.»,
D’ailleurs, le ministère contrôle le respect des prix arrêtés. « Nous faisons des contrôles et des inspections rigoureux dans les sociétés importatrices de gaz de cuisson pour nous assurer qu’elles respectent la législation en vigueur et les prix. », déclare M. Ciza.
Cependant, selon Didace Ndivyariye, directeur technique de l’Autorité de Régulation des Secteurs de l’Eau Potable et de l’Énergie, les prix du gaz de cuisson ne sont pas réglementés actuellement, ce qui permet aux importateurs et aux distributeurs de fixer librement les tarifs. Il déclare : « Les prix sont fixés par les importateurs et les distributeurs de gaz ». En revanche, l’organe de régulation se charge actuellement de fixer et de contrôler les prix de l’essence, du mazout et du pétrole.
Enfin, une révision de la loi sur l’énergie est en cours et prévoit d’inclure la fixation et le contrôle des prix du gaz dans cette nouvelle législation. Cette mesure vise à instaurer une plus grande transparence et une régulation plus stricte du marché du gaz de cuisson.