Dans ce papier, une stagiaire nous ouvre les portes sur l’univers des laborantins. Elle décrit à sa manière ce qui s’apparente à une expérience culinaire.
C’est mon premier stage dans un laboratoire médical. Je prends le soin de me munir d’une blouse blanche. Tel un enfant de 5 ans qui contemple pour la première fois le ciel étoilé, je suis fascinée. Les laborantins défilent le long du couloir en se hâtant. Ils savent que leur tâche se veut hargneuse : concocter les bilans qui orientent vers une maladie. Ils ont aussi la pression de délivrer des résultats très exacts et dans les plus brefs délais.
Le temps de l’observation
Mon travail est un jeu d’enfant : observer. Le labo comprend des chambres closes, bien réfrigérées. Une des techniciennes m’explique que ce courant froid maintient leur matériel de préparation propre et intact. Je suis dépaysée par ces outils que je vois : des microscopes, des centrifugeuses, des agitateurs, des micropipettes, etc. Je finis par m’habituer à ce froid qui règne dans le service, mais difficilement à ces moments sempiternels où je me tiens debout à regarder les différentes préparations. Parfois, même le dégoût s’empare de moi lors de la manipulation des selles à l’aspect hideux.
Je dois noter que c’est un lieu curieux dans lequel tous les petits tubes ont une importance capitale et chaque couleur dotée d’une signification particulière. Dans cet univers, tous les gestes sont réalisés avec minutie, l’erreur est évitée comme la peste et les recettes de préparation immuables, comparables aux versets bibliques. Le calme, la rigueur et la patience sont les alliés des laborantins.
Une expérience culinaire
Un petit tour dans les services du labo équivaut à une ballade dans les cuisines des grands restaurants. À l’entrée, vous verrez bien gravés sur le mur les recettes de chaque service. Je suis même étonnée en voyant une note 4 étoiles décernée à ce laboratoire, bien encadrée et gravée sur le mur.
« Cette bonne note est aussi octroyée à des hôtels de luxe aux services impeccables. Ils nous ont évalués et ont jugé bon de nous accorder beaucoup de points. », se vante un chef de service en pointant du doigt le cadre bien accroché.
Il y a des machines où doivent faire le tour les différents échantillons. On retrouve aussi des frigos dans lesquels sont rangés les tubes selon leur nature et leur date d’arrivée.
Je découvre que les laborantins sont des chefs cuisiniers invétérés. Munis d’un tablier et de leurs outils bien aiguisés, ils connaissent par cœur la recette de leur plat. À une température ambiante, ils rassemblent le matériel ainsi que les ingrédients sur leur table de travail. Les échantillons de liquide aux densités distinctes sont bien préparés.
Ensuite, ils ajoutent des réactifs millimétrés donnant vie à de nouvelles senteurs et le mélange est incubé dans un temps précis. Le tout est introduit dans un appareil qui fait apparaître une cuisson aux allures exquises, préparée avec soin et délicatesse.
La qualité la plus indispensable du cuisinier est l’exactitude, dixit Anthelme Brillat-Savarin. Tous les ingrédients doivent être bien dosés avec une précision extrême. Si la moindre erreur se manifeste dans les bilans, le laborantin reprendra le test à zéro pour ne pas délivrer des résultats erronés pouvant fausser l’orientation diagnostique du malade.
Comme l’art de cuisiner, le travail au laboratoire comporte des éventuels dangers liés aux accidents de travail. Le laborantin manipule souvent les liquides humains : le sang, les urines, etc. Pour ce, il doit se munir des gants propres pour éviter d’être contaminé et ne pas mettre en danger sa santé.
À la fin de mon stage, je dois avouer que j’ai appris pas mal de choses auprès de ces férues du laboratoire dont le métier est à mon goût fort exigeant.