Ecouter l’histoire d’Ancilla de Mbuye a été l’un des terribles épisodes que j’ai eues à vivre de toute ma carrière de journaliste. Accusée à tort de sorcellerie par un mari mal intentionné, la dame de Mbuye a failli être brûlée vive par une population chauffée à blanc. Elle attrapera un trouble mental, mais sera tout de même emprisonnée pour un chef d’accusation fallacieux de sorcellerie. Heureusement, au bout de cette terrible histoire, la justice a été au rendez-vous. L’administration aidera Ancilla à se réintégrer dans la société. Récit.
Que dire, que faire, lorsque la personne avec qui tu as passé la moitié de ta vie, décide de se débarrasser de toi ? Comment sortir d’une honte où la petite sœur que tu as élevée avec abnégation te remplace dans le lit conjugal ? Comment ne pas devenir folle quand ton mari t’accuse d’être une sorcière pour pouvoir coucher avec ta sœur ? Comment ne pas crier avec toutes tes forces quand un mari féroce t’arrache la peau des cuisses dans l’intimité pour t’obliger de le quitter ? Comment survivre à un mari violent qui t’attache les bras dans le dos pour t’obliger à dire que tu es une sorcière, pendant qu’il t’enregistre avec un téléphone ?
Comment ne pas perdre sa tête quand ton agresseur se mue en victime et que tu es emprisonnée alors que tu es en réalité une victime des VBGs ? Comment sortir de chez ‘’Le gentil’’ pour un traumatisme que ton mari t’as infligée et espérer revivre une vie normale ?
Comment revivre parmi les gens qui ont failli te lyncher sur instigation d’un mari cruel et malhonnête ? Ceci n’est pas un scénario d’un film d’horreur que nous vous racontons. Tout cela, Ancilla Harerimana l’a vécu. Du haut de ses 36 ans, elle a vécu l’horreur pendant des années, avant que la justice ne la rétablisse dans ses droits.
La douleur pour seule issue
Tout a commencé lorsqu’elle a mis au monde son 5ème enfant. Ancilla filait le parfait amour avec son mari à Gwuya dans la commune de Mbuye. Lorsqu’elle se marie en 2007, elle est loin d’imaginer que sa vie de couple sera bouleversée par l’apparition d’une concubine, en la personne de sa sœur. Son mari qu’elle avait toujours aimé, changera subitement de comportement. Commerçant de son état, il commence à s’intéresser à sa sœur pour finalement coucher avec elle plus tard. C’est là que le calvaire va commencer. Il devient très violent, jusqu’à battre sa femme après l’avoir attachée avec une corde. Une idée germe dans sa tête : accuser sa femme de sorcellerie pour se débarrasser d’elle définitivement. Le mari enregistre les aveux extorqués sous torture. Ancilla finit par craquer et péter les plombs. Elle a même été à deux doigts de se faire brûler vive par une population chauffée à blanc par son mari.
Le comble du malheur, c’est quand elle est emprisonnée sous le chef d’accusation fallacieux de sorcellerie, puis conduite à Mpimba malgré un trouble mental dû au calvaire qu’elle subissait. Elle sera relâchée après une année d’emprisonnement pour être traitée chez ‘’Le gentil’’ pendant 4 longs mois.
La rédemption
C’est grâce à l’assistance du Cafob que son cas sera finalement pris au sérieux par l’administration. Son mari sera traîné en justice pour les sévices qu’il a fait subir à sa femme, et sera jugé pour violences aggravées. Il est actuellement écroué à la prison de Mpimba où il purge une peine de servitude pénale de 5 ans.
Mais avant cela, il a détruit leur maison pour que sa femme ne puisse pas y vivre en son absence. Heureusement, l’administration a pris les choses en main et elle est en train de reconstruire une maison pour Ancilla. L’administrateur s’est engagé en personne à lui fournir des tôles lorsque la construction de la maison sera terminée. Les autorités à la base ont l’injonction de veiller à ce que la dame n’ait aucun problème de sécurité. Le voisinage a déjà compris qu’il s’est fait berné par le mari d’Ancilla qui ne voulait que vivre avec sa sœur, en l’accusant de tous les maux. Les voisins essaient désormais de se racheter en lui construisant une maison.
Ce n’est pas seulement le voisinage qui a été berné par le mari d’Ancilla. Le Tribunal de résidence de Mbuye avait déjà prononcé le divorce à son tort. Maintenant, elle hésite, même si elle a déjà exercé un recours auprès du Tribunal de grande instance de Muramvya avec l’assistance du Cafob. Son mari étant déjà emprisonné, elle a l’impression qu’elle aura l’air de vouloir l’enfoncer aux yeux de sa belle-famille qui est déjà très remontée contre elle.
Malgré toutes ces tribulations, Ancilla est quand même allée voir son mari à la prison. Elle lui a même donné une somme de 17 mille Fbu. Elle dit être prête à reconstruire une nouvelle vie avec son mari s’il s’amende. Mais ce dernier ne semble pas reconnaître les efforts de sa femme. Il lui a enjoint de lui amener une somme de 50 mille Fbu, sinon il lui a fait savoir que ça ne valait pas la peine de revenir le voir.