Les malades mentaux doivent-ils être incarcérés lorsque qu’ils enfreignent les lois de la République ? Que peut-on dire de la protection légale de cette catégorie de personnes ? Ce blogueur a parlé à un juriste et a feuilleté quelques textes juridiques.
Certains cas d’autorités qui n’ont pas hésité à embastiller des malades mentaux pour avoir commis des forfaits ont déjà défrayé la chronique. Et pourtant, la loi burundaise protège les malade mentaux au civile et au pénal. L’article 25 du code pénal en vigueur au Burundi est sans équivoque : « N’est pas punissable, celui qui souffrait d’une maladie ou d’une déficience mentale qui le privait de la faculté de comprendre le caractère délictueux ou la nature de son comportement, ou de maîtriser celui‐ci pour le conformer aux exigences de la loi ». A ce niveau déjà, on comprend que la place de ceux que la société appelle ‘’les fous’’ n’est pas en prison ou dans d’autres lieux de détention. C’est ce qu’indique Me Aminadab Mbonyumukiza de l’Ordre des Avocats près la Cour d’Appel de Gitega.
Dans la terminologie juridique, on parle de l’irresponsabilité. La loi burundaise précise les causes de l’irresponsabilité pénale, à savoir : la démence, la minorité, la contrainte. Mais que comprendre par « irresponsabilité pénale » ?
Quelques notions sur la responsabilité pénale
La responsabilité pénale est l’obligation de répondre juridiquement des infractions pénales dans lesquelles on est impliqué. Cela implique la possibilité d’être poursuivi pénalement et finalement condamné par la justice pénale. Or, pour qu’il y ait infraction, il faut que 3 éléments soit réunis : l’élément moral (l’intention ou agir en connaissance de cause), l’élément matériel (les agissements concrets) et l’élément légal (les faits prévus et punissables pas la loi). Dans le cas des malades mentaux, il se pose le problème de la capacité de discernement d’où leur irresponsabilité pénale.
Mais nuance, nuance ! Celui qui s’administre des substances qui lui ôtent la raison n’entre pas dans cette catégorie des irresponsables selon le prescrit de l’article 26 du code pénal qui dispose que : « Celui qui s’est volontairement privé de l’usage de ses facultés mentales au moment de l’infraction demeure pénalement responsable, même si cette privation n’a pas été provoquée dans le but de commettre l’infraction ».
Civilement, les malades mentaux sont aussi protégés. Pour démontrer cette protection légale Me Aminadab évoque l’article 8 du Code Civil Livre III qui édicte 4 conditions pour pouvoir contracter. Une de ces conditions est la capacité. Ainsi les incapables ne peuvent pas contracter. L’incapacité fait référence entre autres à la défaillance des facultés mentales sur laquelle se base la loi pour interdire aux malades mentaux de contracter.
Lire la loi (et son esprit) avant d’embastiller
On l’a dit et on le répète, la place des malades mentaux n’est pas en prison. Encore est-il important de mentionner que même le législateur le conçoit comme tel, car l’article 44 du code de procédure pénale stipule que : « l’Officier de Police Judiciaire ou du Ministère public peut procéder à l’arrestation d’une personne dont l’état mental constitue un danger immédiat pour elle-même ou pour autrui ». Plus loin, il ajoute un complément qui vient donner un sens à ce qu’on est entrain d’évoquer dans ce texte : « Il doit, soit la conduire immédiatement dans l’établissement le plus proche possédant un service médical de psychiatrie, soit la conduire vers un centre de soins appropriés, soit en dernier recours le mettre en rétention dans un lieu sûr à charge pour lui de le transférer dans les vingt-quatre heures vers un centre approprié aux frais du Trésor public ». Qu’est-ce qu’on peut encore dire ? Ah oui ! Que les concernés lisent l’esprit et la lettre de ces articles qu’on vient de citer et qu’ils les aient à l’esprit la prochaine fois qu’ils auront à arrêter ‘’un fou à lier’’