Le 28 mai de chaque année, est la journée internationale de l’hygiène menstruelle. Alors que tous les sujets sur les menstrues au cours des dernières années essaient de briser le silence sur la nature taboue des menstrues et proclamer que chaque fille/femme doivent avoir accès aux protections hygiéniques pendant ses règles, quid de la gestion des règles dans les milieux publics au Burundi ?
Les menstrues, bien que je n’en vis pas, est un sujet qui me prend à cœur. Déjà en 2018, je vous parlais des astuces pour des menstrues sans douleur, et le rôle des hommes dans les menstruations. En 2019, je vous montrais ce que coûtent financièrement les menstrues dans la vie d’une Burundaise, et pourquoi il faut détaxer les règles. Au vu de la campagne Ntakorimukwezi, et témoignages sur les menstruations, je ne croyais plus qu’un jour, je trouverai quelque chose à vous parler sur ce sujet.
De façon inattendue, en mars 2024, un sujet tombe. J’étais à l’Hôpital Régional de Gitega en train de suivre l’éducation pour la santé (EPS) à l’endroit des garde-malades en Chirurgie. Le thème de cette EPS portait sur la gestion de l’hygiène menstruelle. Au fait, il paraît qu’un garde-malade avait jeté des serviettes hygiéniques dans l’une des deux toilettes à siège du service, jusqu’à ce que ce dernier soit bouché. Voilà pourquoi ce thème en milieu hospitalier.
Débat
Plusieurs témoignages ont jailli de cette discussion. Le garde-malade présumé coupable d’avoir bouché la toilette a été identifiée par un malade qui l’avait vu tâcher sa robe la nuit dernière. Ce présumé coupable se sentait stigmatisé dans cette assemblée, et a demandé à l’infirmière comment gérer ses règles de façon intime sans être connu par tous, qu’on n’est pas fautif quand il n’y a pas où jeter les serviettes hygiéniques utilisées, et que les toilettes sont non fermable de l’intérieur, sans point d’eau à l’intérieur ou savon pour l’hygiène adéquate.
Le sujet a même franchi le cadre du milieu hospitalier quand une autre garde-malade écolière a témoigné comment un jour, elle a taché sa jupe et a manqué comment mettre son cotex, car dans son école, les garçons ont les mêmes toilettes que les filles, et ces toilettes sont trop sales et sans portes pour s’y sentir à l’aise en se changeant. Les jours suivant, elle a préféré s’absenter à l’école plutôt que de vivre ses règles dans des conditions aussi indignes que cela.
Des autres ont soulevé le défi de gestion des règles de survenue surprise par manque de toilettes tout court, à certains endroits comme le parking des bus à Ngozi, et certaines églises dans les milieux rurales.
Vulnérabilité
En repensant aux interventions de ces malades et gardes malades ce jour-là, j’ai compris comment il est trop difficile à une femme d’assurer son hygiène pendant ses règles, avec dignité, lorsqu’elle est privée de toilettes décentes, voire de toilettes tout court, d’accès à un point d’eau propre et en quantité suffisante, de savon, et des moyens de s’en débarrasser convenablement.
J’ai compris que sans ces toilettes adaptées à l’hygiène des menstrues en milieu public, les femmes et filles sont obligés de se cacher pour changer leurs serviettes. Cela conduit aussi à l’absentéisme des filles dans ces écoles où il n’y a pas différenciation entre les toilettes des filles et des garçons, justifiant les chiffres qui montrent qu’entre 2021-2022, 7 504 filles sur 27 937 se sont absentées de l’école en raison de leurs menstruations. Sans oublier que le manque de propreté, de portes fermables, d’eau et de savon dans ces toilettes rendent les filles vulnérables aux infections du tractus vaginal, à l’inconfort et l’anxiété.
Que faire ?
Des progrès ont certes été réalisés, mais la faiblesse des infrastructures sanitaires au Burundi est la cause d’une mauvaise hygiène menstruelle, qui affecte le bien-être social, économique et scolaire des filles et femmes. La moindre des choses à faire est de s’assurer qu’il y ait au moins une latrine séparée pour les filles dans les écoles, qui soit gardée propre et qui puisse être bien fermée avec un verrou.
La récente journée mondiale de l’hygiène menstruelle devrait être une occasion de nous atteler à cette tâche, pour qu’à l’avenir, un phénomène aussi normal et naturel que les règles, ne soit plus synonyme de handicap pour les femmes et les jeunes filles dans les milieux publics.