Au terme d’une année à la tête du pays, le numéro un burundais aura le mérite d’avoir effectué beaucoup de déplacements à l’extérieur. Et c’est d’autant plus vrai quand on sait que son prédécesseur n’avait effectué qu’une seule sortie durant son tout dernier mandat.
Retour dans un passé pas si lointain. En 2015, lorsque le pays sombre dans une crise politique, tout semble s’arrêter. L’heure est grave. L’instabilité politique bat son plein. Au même moment, le Burundi devient un paria sur la scène internationale. Illustration de cet état de fait : le président à la tête du pays, feu Pierre Nkurunziza passera presque tout son dernier mandat sans sortir du pays. Il ne s’est rendu qu’en Tanzanie pour une visite de quelques heures. Il faut dire qu’à l’époque, le pays n’est pas vu d’un bon œil par une partie de l’opinion internationale. Il est d’ailleurs sous sanctions de certaines organisations internationales et/ou gouvernementales, ceux de l’occident en l’occurrence.
2020 ou la réouverture du Burundi à l’international
Mai 2020. Cinq ans après 2015, des élections générales sont organisées. Gitega se dote de nouvelles institutions. Le mandat controversé vient de prendre fin. Le pays a un nouveau dirigeant, en la personne du Général-Major Evariste Ndayishimiye, pour un mandat de sept ans conformément à ce que prévoit la constitution de 2018.
Sans revenir sur le bilan de ses réalisations après une année à la magistrature suprême (les autres s’en chargeront), il faut dire tout de même qu’il aura fait beaucoup de voyages à l’étranger, contrairement à son prédécesseur.
Tanzanie, Guinée Equatoriale, Egypte, Congo Brazzaville, l’Ouganda. C’est sans oublier le Kenya, ce pays de l’EAC qu’il vient de visiter en grande pompe. L’on se rappelle qu’à l’occasion de certains voyages, il était accompagné d’une grande délégation. En tout, il a effectué six voyages à l’extérieur du pays en une année.
Que comprendre de ces voyages ?
Ce sont des explications que nous devons à Innocent Ndereyimana, expert en relations internationales : « Le non déplacement du président Pierre Nkurunziza durant son dernier quinquennat n’a pas été sans toucher directement ou indirectement la visibilité du pays dans le concert des nations, autant sur le plan régional qu’international. »
C’est donc au président actuel d’enclencher des contacts directs avec les autres chefs d’Etat surtout ceux de la Communauté Est Africaine dont nous partageons certains intérêts communs. Des contacts qui constituent une plus-value en matière de diplomatie par rapport aux envois d’autres représentants ou émissaires.
Ces « nombreuses » visites du chef d’Etat burundais sont donc une tentative de sortir le Burundi de l’enclavement diplomatique dans lequel notre pays vit depuis près six ans.
Des visites pour quelles raisons ?
Juste après son investiture, Evariste Ndayishimiye est vite allé voir ses voisins. A commencer par le pays de Nyerere, la Tanzanie. Plus tard, ce sera le tour de l’Ouganda et du Kenya. Dans l’EAC, seuls le Rwanda et le Sud Soudan n’ont pas encore accueilli notre président. Le premier pour des raisons que l’on peut facilement deviner. Et dans tous ces pays, les affaires ont toujours été au menu des discussions.
A part les visites effectuées au niveau des pays limitrophes, l’expert insiste sur les deux visites officielles effectuées par le numéro un burundais respectivement en Guinée équatoriale et en République arabe d’Egypte. Deux pays qui, fiers de leur siège non permanent au Conseil de Sécurité des Nations-Unies, ont défendu et soutenu mordicus la « logique souverainiste » du gouvernement du Burundi. D’ailleurs, lors de son voyage en Egypte, le 23 mars 2021, l’homme fort de Gitega ne manquera pas de saluer le rôle majeur joué par le pays d’Abdel Fattah Al-Sissi dans la défense des intérêts africains. A l’époque, il avait salué le rôle de ce dernier « quand la communauté internationale s’était liguée contre le Burundi et voulait influencer les pays africains ».
Encore qu’avec le pays des pharaons, le Burundi partage beaucoup de chose, à commencer par le Nil. Et vous n’ignorez pas les enjeux autour de ce fleuve. L’intérêt que semble porter l’Egypte pour le Burundi ne peut donc que s’expliquer.
En outre, étant donné les difficultés économiques que connait le pays, le président Ndayishimye essaierait, à travers ces voyages, d’inviter les investisseurs étrangers à venir s’installer au Burundi. En témoigne, la délégation d’hommes d’affaires qui l’ont accompagné, avec à la clé la signature d’un bon nombre d’accords de coopération dans différents secteurs de la vie du pays.
Ce sont donc des visites effectuées sur base des enjeux politico-diplomatiques, géopolitiques et économiques mais qui n’en sont qu’au début, après les soubresauts de 2015. Sûrement que d’autres suivront dans le cadre des tentatives de normalisation des relations avec d’autres pays. Le souhait est que ce processus n’accouche pas d’une souri.