C’est un secret de polichinelle : le 31 décembre est vécu avec beaucoup d’émotions. Et si on décidait de revenir sur ce qui est sans doute le plus important jour de l’année ? Qu’est-ce qui s’y passe ? Comment un jeune de Bujumbura (et d’ailleurs) le vit-il ?
24 heures. C’est la durée d’une journée. C’est aussi le temps assigné à Jack Bauer dans la série 24 Heures chrono, « pour sauver le monde ». On reprend le trajet avec notre Divin, à la Jack Bauer. La dernière fois, nous avons fouiné dans ses poches pour savoir combien il dépense chaque semaine. Maintenant, on va le suivre un 31 décembre. Comprenez bien que Divin est notre cobaye fictif. Basé sur des témoignages réels qu’on a recueillis, on trace son trajet.
Ces événements se déroulent entre 00:00 et 08h du matin
Divin est un fêtard. Ça, vous le savez déjà.
🍻 Du lundi au dimanche, la semaine de Divin est rythmée par l'alcool. Buvettes low coast ou bars huppés, ça lui est égal.
Mais à quel prix? Nous avons reconstitué la facture-type hebdomadaire d'un tel train de vie. Salée : https://t.co/352xOWCVyL#ZaNzoga #Zirabasesaguza pic.twitter.com/p8KTTFCtoV
— Yaga Burundi (@YBurundi) August 11, 2022
Il serait impossible pour lui donc de ne pas avoir pu passer une nuit bien arrosée un 30 décembre en attendant le 31. « Il faut bien préparer le terrain », se dit-il. Le voilà qui rentre à 2 heures du matin. « Je dois rentrer tôt, demain est un grand jour », a-t-il insisté devant sa bande qui voulait qu’il reste longtemps. 2 heures du matin, c’est très tôt pour ce jeune homme habitué à squatter les bars et les boîtes de nuit de Buja-la-belle jusqu’à l’aube. Il rentre, bois de l’eau (son astuce pour chasser le hangover matinal) et se couche.
Ces événements se déroulent entre 10h et 13h du matin
Divin se réveille mal au point. Apparemment, on ne soigne pas si facilement la gueule de bois. En quelques minutes, il prend son petit-déjeuner et se jette sur son téléphone. Dans un groupe WhatsApp de sa bande au nom très évocateur « Tuvyatse » (on y met le feu, Ndlr). Il s’agit de ce genre de groupes où les jeunes y parlent du tout et de rien, mais surtout des maps (jargon pour désigner un rendez-vous). « On commence par où les gars ? », écrit un des amis de Divin. La discussion s’enflamme. S’enchaîne alors une longue liste des bars. C’est décidé, ils vont d’abord boire une ou deux bières dans le quartier et après, place à l’un de ses bars du centre-ville. « Les bros, n’oublient pas : le bar doit être fréquenté par beaucoup de meufs ». Les jeunes, aujourd’hui, ne sirotent pas que les boissons alcoolisées : « On consomme l’endroit », aiment-ils dire.
Le premier map de la soirée pris, Divin prend son déjeuner et fais une sieste. « La nuit sera très longue », justifie-t-il. Et il a raison.
Ces événements se déroulent entre 17h et 23h
Dans une famille burundaise, un 31 décembre est traditionnellement fêté en famille. C’est ainsi que chez Divin, on trinque entre frères et sœurs, cousins et cousines, tantes et oncles, etc. À 23 heures, Divin reçoit un message, « Tu es où, on t’attend chez… ». Sa bande est déjà dans un bar du quartier, Ku kadirisha. Une, deux bouteilles après, ils prennent le chemin. La nuit vient juste de commencer. Divin est déjà un peu ivre.
Ces événements se déroulent entre 23h et 2h du matin
Le nouvel an approche. Plus que quelques minutes. Le DJ du bar dans lequel se trouve Divin et sa bande maintenant, joue les hits du moment. La sueur sur le front, ils dansent tous les moves possibles. Bière après bière. Minuit arrive. On compte les secondes qui restent de 10 à 0 : « 10, 9, 8,…4, 3, 2, 1, Bonaneeeeeeee ! ». Des cris se font entendre partout. « Tuvyatse !!!! », lance Divin à sa bande.
Bouteille après bouteille, Divin et sa bande, l’alcool est déjà plein dans le corps. Mais c’est un 1er janvier déjà. Le DJ met Abidjan Farot d’Espoir 2000. Et au moment du « c’est vrai on a rien, mais on consomme jusqu’au matin, ce qui est sûr, on est là » qui enlève à la bande Tuvyatse tout espoir de rentrer. Divin est presque à sa dixième bouteille. Après, tout Tuvyatse décide de bouger. « Tout jeune, qui se respecte ne reste pas dans un seul bar » est parmi les slogans de Divin et sa bande Tuvyatse. « On va où ? ». Bujumbura accueille chaque 31 décembre un concert sur l’une de ses plages. C’est un map qui réunit toute la Gen Z de la capitale économique. Tuvyatse a déjà sa propre voiture, pas besoin de chercher un taxi (ils sont rares à trouver le 31 décembre). Direction, la plage.
Ces événements se déroulent entre 2h et 7h du matin
La bande à Divin et oui, sont tous ivres. Même, celui qui conduit. Ils s’en foutent des risques. Ils aiment dire : « Hari uwukimara imyaka ijana ? », littéralement « qui atteint encore cent ans aujourd’hui ? ». Expression issue d’un hit du moment. Et ils ne sont pas les seuls. Pourvu que le 31 décembre soit fêté à fond.
Sur notre plage à sable blanc, une foule danse. Les membres de Tuvyatse rejoignent une autre bande. Et ils dansent jusqu’à l’aube. Une bouteille après l’autre. Le si beau lever du soleil qui tapit au-dessus du Tanganyika se pointe à l’horizon. Il est 6 heures du matin. Toute la bande à Divin et lui sont ivres et fatigués à mort. « Il faut renter ! ».
Dans la voiture, c’est un groupe de jeunes somnolent qui rentre. Divin atteint la porte d’entrée à 6h53 exactement. Ivre. Il vomit avant de tomber comme un zombie sur son lit. En attendant, le map du 1er janvier soir. La fête n’est pas finie.