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L’unité nationale : 32 ans après, que retenir ?

Au-delà du folklore qui entoure la commémoration de la journée dédiée à lunité nationale, que devrons-nous retenir de cette convention ? Dans quelle mesure peut-elle contribuer à la réconciliation des Burundais qui ont tant souffert des divisions ethniques et leurs cohortes de malheurs ? Les discours qui ont récemment été prononcés par les autorités prouvent qu’il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Mais au-delà du discours, la charte de l’unité nationale peut-elle encore servir ?

Nous venons de fêter en grande pompe l’unité nationale, matérialisée par le vote d’une charte, il y a plus de 30 ans. Panser les plaies du passé, partir sur des nouvelles bases, oublier de parler la langue des hutus ou des tutsis pour apprendre à parler celle des Burundais. Voilà ce qui semble être l’ambition de la fameuse charte

L’encre de la charte n’avait pas encore séché que les vieux démons attrapaient les Burundais. La charte a été votée le 05 février 1991. A peine un an après, le pays était à feu et à sang. L’assassinat du Président Melchior Ndadaye, le 21 octobre 1993 a signé une nouvelle descente aux enfers.

Cette charte a longtemps été considérée comme « urugoto », c’est-à-dire une sorte d’anesthésie inventée par les tutsis qui étaient au pouvoir pour endormir les hutus et les maintenir dans l’oppression et l’injustice. J’ai entendu Gilles Bimazubute, l’ancien collaborateur de Ndadaye assassiné avec lui, parler de « urugoto ». A ce propos, il y a également un autre terme très évocateur que j’ai entendu de la bouche d’un dirigeant, quand il parlait de l’unité nationale : « Ubwomekerano », qui insinue quelque chose que l’on vous colle dessus sans que vous le vouliez réellement. 

Pas plus tard quau début de cette semaine, j’ai entendu Thacien Sibomana, un politicien connu dans l’arène politique burundaise, parler de « urugoto » à la radio Isanganiro. Malgré toutes ces réticences, ceux qui ont préparé la charte de l’unité nationale ont bien souligné que « la division est incompatible avec l’intérêt national, elle est toujours l’instrument d’un égoïsme pernicieux ».

Urugoto ou un socle pour (re) construire un destin commun ?

Les tutsis qui étaient aux affaires sont partis, mais la charte est restée. Que devons-nous garder de l’unité nationale, 31 ans après ? Devons-nous retenir que ce n’est qu’une fête folklorique qui ne sert à rien, et qui doit être jetée aux orties ? Ou devons-nous la prendre comme une base, un socle sur lequel il faudra construire et consolider un destin commun ? 

J’ai entendu le discours du président de la République pendant les festivités de commémoration de cette journée. J’ai compris que c’est une journée qui devrait réconcilier les Burundais, et non pas les diviser. Et à la fin du compte, le président a évoqué un fait important qui devrait interpeller. Il a dit qu’en fait, entre le petit peuple il n y’a pas de problème, et je suis tenté de le croire. Ceci voudrait dire que ceux (certains) qui voulaient garder le pouvoir ou y accéder ont une certaine responsabilité dans les problèmes que le pays a connus. 

L’unité nationale, un cheminement 

Dans tous les cas, restaurer ou réparer l’unité nationale reste le moyen le plus sûr de transcender ce que ce peuple meurtri a vécu. C’est d’ailleurs l’esprit de l’un des attendus de la charte qui dit en substance ceci : « Nous avons souffert des déchirements et voulons mettre irréversiblement fin aux divisions, afin de construire un pays sûr pour tous et pour chacun ; un pays sans discrimination ni exclusion ; un pays de paix et d’unité, un Etat de droit et de justice ».

Que dire encore ? Peut-être rappeler les propos de Martin Luther King : « Apprenons à vivre en frères, tous ensemble, ou nous mourrons en imbéciles, tous ensemble ».

 

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