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Les prénoms des nouveaux nés : la continuité du missionnaire ?

Il faudra remonter le temps d’une ou deux décennies pour constater que le choix des prénoms des nouveaux nés à Bujumbura suit une certaine tendance, parfois surprenante. Concernant les noms que portent les Burundais, un billet s’y est penché pour y voir un peu plus clairement. Mais, qu’est ce qui se passe lors du choix du prénom ? Les parents suivent-ils un mouvement naturel, précis ? Existe-t-il une certaine explication rationnellement compréhensible ou pas ?

Ian, Liora, Cayden, Hess, Kylian, Timéo, Noray, Mila etc. sont venus bien après les Arthur, Bonfils, Kévin, Tony, Francis, Patrick, Christian,… qui eux avaient succédés aux Balthazar, Prosper, Augustin, Côme, Didace, Emmanuel, et autres. Sans trop se fier à l’arbre généalogique, un œil et une oreille avisés sauront nuancer ces prénoms et leurs époques. Comme la curiosité est la mère de la science, lorsque la question de savoir comment les nouveaux parents choisissent les prénoms de leurs enfants, les réponses furent variées et complexes les unes par rapport aux autres. Sans pour autant suivre une certaine logique de la « psychanalyse », certains parents y vont sans trop connaitre la raison, d’autres vont chercher les noms sur internet pour des raisons de croyances parfois religieuses et enfin il y a des parents qui vivent à l’étranger mais qui veulent garder le lien avec leur Burundi originel et préfèrent nommer leurs progénitures avec des noms et des prénoms totalement burundais (Kwezi-Nganji, Impano-Ntwari, Gicu, Rema, Keza, Shima, etc.).

Rétrospective

En reprenant une partie du texte « Histoire des mentalités et histoire des missions au Burundi, ca.1880-1960 » de l’historien Gaëtan Feltz, tirée du recueil « History in Africa, a Journal of Debates, Methods, and Source Analysis » publié par le Cambridge University Press, on s’aperçoit que « Pour l’histoire du Burundi contemporain, l’expansion missionnaire débute dans la seconde moitié du 19è siècle […] notamment à Rumonge (1879-1881) et une assise plus ferme dès la fin du 19è siècle. […]. Cette forme d’expansion, au Burundi, fut surtout le fait du catholicisme par le biais de la Société des Missionnaires d’Afrique, plus communément désignée sous le nom de Pères Blancs. » Pour asseoir sa domination, le « Missionnaire » a procédé par le baptême des « Indigènes » qui se matérialise par l’octroi des prénoms européens, pour la plupart des cas, en supplément aux noms typiquement burundais. Ceux qui refusaient le baptême se voyaient mis au ban de la modernité et gardaient leur ferme croyance en Kiranga, le représentant de Dieu au Burundi.

Retour à l’instant présent

Dans le billet cité ci-haut, la loi n° 1/1 du 15 Janvier 1980 portant code des personnes et de la famille, stipule que le déclarant de la naissance est celui qui donne le nom et que le choix du nom est libre. Ce qui est logique. Le hic, ou la nuance, primo, c’est la façon dont les nouveaux prénoms, souvent pas faciles à écrire, à lire ou à mémoriser (pour les grands parents surtout), secundo, ces prénoms trouvent leurs significations dans d’autres civilisations comme chez les hébreux, les grecs, les asiatiques, etc. Ceci expliquant cela, il s’agirait d’une ouverture de la culture burundaise à d’autres cultures du monde, souhaitable sur tous les plans. Pourrait-on bien comprendre que la pratique du « Missionnaire » aurait eu un effet et son inverse dans la mesure où, à ce jour, les nouveaux parents citadins recherchent des prénoms toujours plus complexes et de moins en moins communs ? Ou alors cette tendance parviendra-t-elle dans les contrées relativement éloignées des centres urbains ? J’aurais comme l’impression de suggérer à mon futur moi d’oser encore plus l’originalité s’il advenait que je sois amené à donner un nom à mon enfant et l’appeler Loreleï. Et vous ?

 

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