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C’est décidé, mon père, tu ne me béniras pas !

Une grossesse n’est pas toujours synonyme de joie ou d’allégresse, surtout si le géniteur est un saint homme, un homme de Dieu. Pour certains, c’est la fin de toute une aventure, la fin d’un rêve qui se brise en mille morceaux. De deux maux, il faut choisir le moindre, dit-on, et dans ce genre de cas, le mariage vite fait avec le premier venu, peut rapidement devenir un mauvais raccourci.

J’en veux à la société, et après ce texte, peut-être que vous allez me comprendre. Tout a commencé par un événement banal qui a changé ma conception et ma perception de la société. J’étais conviée à une réunion de préparation du mariage de ma cousine Mireille. 

Si vous n’avez jamais été dans ces réunions, estimez-vous heureux, c’est une perte de temps ! Je sirotais mon soda, en comptant les minutes, du bout des doigts. Qu’est-ce que c’était ennuyeux ! On nous demandait notre avis par rapport à ce qu’il nous fallait comme matériel, quelles personnes, il fallait inviter et tout ce qui va avec, sans même nous dire le budget qu’ils comptaient fixer et dépenser pour cette fête, si l’on peut appeler ça une fête.

Après 3 bonnes heures, je commençais à sourire puisque je sentais que la réunion était sur sa fin. Une de nos tantes semblait pourtant ne pas être satisfaite de cette réunion. Apparemment, la liste des invités la dérangeait. C’est alors que Tante Jacqueline (Jackie comme on aime l’appeler) prononça timidement « Ubu ga mire tuzokwubahuka kugushingira so akuvyara atabizi ? » (Maintenant, Mire, oserions-nous vraiment te marier sans informer ton père biologique ? Ndlr)

Comment ça le père ? Mon oncle, le père de Mireille est décédé non ? Pourquoi alors tante Jackie dit ça ? Est-ce que les Fanta contiennent de l’alcool maintenant ? Je n’arrivais pas à comprendre. Mireille, ma cousine non plus ! Et moi qui pensais que la réunion allait se terminer… Voilà maintenant, le moment des réponses, des explications.

La mère de Mireille était gênée et lançait des regards éclairs à Jackie, mais Jackie était du genre : « Elle a le droit de savoir, surtout maintenant. »

Un amour interdit

« Ton père, le vrai est le prêtre Pierre » prononça timidement ma tante, la maman de Mireille. Quand elle dit ça, tout devint clair. En effet, le prêtre Pierre a toujours pris soin de Mireille, un peu trop à mon goût ! Après la messe du vendredi, à la fin des cours, il venait la voir, jouait avec elle et la couvrait d’affection. Il payait même ses études. Tout ceci entretenait dans notre esprit, l’idée selon laquelle les prêtres étaient en général gentils avec les enfants, surtout les orphelins.

Ma question était alors celle-ci : le père adoptif de Mireille, était-il au courant ?

La mère de Mireille raconta, non sans douleur, toute l’histoire : « Nous nous aimions tellement Pierre et moi, nous étions dans la même classe. Nous avions prévu de nous marier à la fin de nos études de pédagogie. Nous avons passé des vacances inoubliables. Tu as été conçue pendant ces bons moments. Ce qu’on ne savait pas, du moins, que moi, je ne savais pas, c’est que le père de Pierre avait déjà prévu de l’envoyer au grand séminaire. Il était tout l’espoir qu’avait sa famille, et ne devait en aucun cas les décevoir. Il était donc obligé de partir malgré lui, et j’ai dû me marier rapidement pour le couvrir. J’étais encore une enfant, j’avais peur, je ne voulais pas de mariage sans amour, mais avais-je vraiment le choix ? J’ai pris le plus gentil de ceux qui me courtisaient à cette époque comme fiancé. Il savait ce qui m’était arrivé et t’a élevée comme son propre enfant. Heureusement qu’il y a des hommes bien éduqués. Ton père adoptif a succombé au diabète deux ans plus tard. Après sa mort, ton père biologique a été ordonné prêtre, on a continué à se voir secrètement, et il a tenu à honorer ses engagements de père, mais de loin. »

Ça change tout

Quand je dis que je déteste la société, voilà exactement ce que je veux mettre en lumière ! Imaginez, se marier à un jeune âge pour sauver les apparences ! Choisir une voie que tu ne voulais pas juste parce que tu ne peux pas décevoir ton entourage ! Pierre est prêtre, mais son cœur est déjà pris ! Dieu seul sait qu’il ne voulait pas être prêtre et voilà, il ne peut assumer son rôle de père sans renoncer à son sacerdoce !  Partagée entre la rage et le dégout de cette société injuste, j’en oublie Mireille. Comment se sent-elle ? Comment peut-on se sentir après de tels aveux ?

Mireille se leva, un peu perdue, sous le choc. Elle décida qu’il y aura seulement un mariage civil. D’ailleurs, c’est celui-là qui compte le plus. Son père ne les bénira pas, c’était décidé ! C’est par ces mots que la réunion de comité de mariage prit fin. Heureusement qu’il n’y avait que la famille. Moins les gens en savaient à ce propos, mieux ça valait. C’est malheureusement encore une fois une des faces perverses de notre société que je ne cesserai de détester.

 

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