Le rapport à la corpulence n’est pas du tout le même selon que nous soyons dans un pays développé ou un pays sous-développé. Pour certains, le surpoids, avoir des rondeurs est un atout. Au Burundi, nous qualifions d’umubosi (boss) une personne qui exhibe fièrement son embonpoint, tandis dans d’autres pays, cela relève d’un problème de santé publique.
Une étude menée en Ouganda révèle qu’en l’absence d’informations financières fiables sur leurs clients, les représentants des banques chargés d’accorder des prêts font plus facilement confiance aux personnes corpulentes, rapporte le New York Times. De pareilles investigations n’ont pas encore été menées au Burundi sur la confiance que les agents de banque accordent aux clients bien en chair. Par ailleurs, force est de constater qu’au Burundi comme dans la plupart des pays africains, le surpoids est associée à la puissance ou à la richesse.
L.M, 25 ans, habitant à Mutanga Sud se souvient de quelques avantages de sa forte corpulence quand il était plus jeune : « J’étais respecté dans certains évènements et j’avais un cercle d’amis, tous plus âgés que moi du fait de ma corpulence imposante ».
Imburujwa, un signe d’aisance
Chez nous, on les appelle à tort, parfois à raison des boss. Ce sont ces hommes en surpoids, qui exhibent fièrement leurs mburujwa (ventres bombés) trahis par leurs chemises qui menacent d’éclater à tout moment. Ils sont craints et/ou respectés dans la société.
Toutefois, ce surplus de graisse n’est pas du tout rassurant, explique un docteur. Cela est dû à leur alimentation de base : de la viande et de l’alcool. Le Dr Edmond Mwaruro alerte sur ce style de vie alimentaire qui cause beaucoup de méfaits sur la santé : « L’obésité abdominale qui se traduit par un excès de graisses au niveau de l’abdomen est associée à une augmentation du risque cardiovasculaire, le développement de certaines maladies comme le diabète de type 2, la stéatose hépatique, etc. ».
Ce n’est un secret pour personne, les Burundaises bien en chair ont le vent en poupe. Elles sont si convoitées que même le lexique a changé en leur faveur. « Urya mukobwa afise ama tailles ! », une expression qui s’extasie devant une fille ayant des formes généreuses, entendre surtout ingidi (grosses fesses, Ndlr). Le Dr Edmond Mwaruro signale également que cet excès de graisses au niveau des fesses peut aussi être lié à un autre type d’obésité appelé l’obésité gynoïde qui est associée à un risque élevé de complications mécaniques comme l’arthose du genou.
Selon ce docteur, avoir des formes ne pose pas problème, cependant, il faut surveiller son IMC (Indice de Masse Corporelle) afin d’avoir un poids compatible avec sa taille. Sinon tout excès est mauvais, l’obésité comme l’anorexie.
En occident c’est tout le contraire
Dans les pays développés, la minceur est un atout considérable auprès de la gent masculine et des agences publicitaires ou de mannequinat. Les personnes en surpoids ne sont pas du tout privilégiées. Annie*, une burundaise de 24 ans vivant aux Etats Unis, nous parle du rapport des américains à l’obésité. « Les personnes obèses sont souvent les moins aisées de la société car les aliments malsains (riches en graisses et en sucre) sont les moins chers. Les gens riches prennent soin de leur corps pour ne pas être en surpoids. », indique-t-elle.
D’où un risque pour ces gens défavorisés de développer l’obésité. « De nos jours, aux Etats Unis, l’obésité est un sujet tabou. Dire à une personne qu’elle est obèse, c’est comme l’insulter », continue la jeune fille. Pour expliciter ses propos, Annie cite le body shaming qui consiste à se moquer de quelqu’un à cause de son physique considéré comme atypique. C’est pourquoi des mouvements ont été créés pour que les personnes obèses se sentent incluses dans la société et soient plus épanouies psychiquement tels que le body positive qui prône l’acceptation de son propre corps.
In fine, les Burundais devraient changer leur regard sur le surpoids. Mais, en attendant, allez dire à un campagnard maigrichon qu’être en surpoids est un signe de mauvaise santé, il vous prendra pour un blagueur sûrement.